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KANT: Le véritable champ du génie

Publié le 06/05/2005

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Le véritable champ du génie est celui de l'imagination, parce qu'elle est créatrice et qu'elle se trouve moins que d'autres facultés sous la contrainte des règles ; ce qui la rend d'autant plus capable d'originalité. La démarche mécanique de l'enseignement, en forçant à toute heure l'élève à l'imitation, est assurément préjudiciable à la levée de germe du génie, en son originalité. Tout art réclame cependant certaines règles mécaniques fondamentales, celle de l'adéquation de l'oeuvre à l'idée sous-jacente, c'est-à-dire la vérité dans la représentation de l'objet conçu en pensée. Cette exigence doit être apprise avec la rigueur de l'école, elle est à la vérité un effet de l'imitation. Quant à libérer l'imagination de cette contrainte et à laisser le talent hors du banal procéder sans règle et s'exalter jusqu'à contredire la nature, cela pourrait bien donner une folie originale qui ne serait tout de même pas exemplaire, et ne pourrait donc pas non plus être rangée dans le génie. KANT
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« Le sentiment du sublime : l'effroi de l'infini Le sentiment du sublime n'est plus un sentiment agréable, plaisant, mais est au contraire un sentiment de plaisir plusprofond et contradictoire en ce qu'il confine à la douleur.

Cette étroite confusion entre plaisir et douleur est ce queles anglais appellent par un terme pour nous intraduisible, le delight (cf.

Burke, Delightful horror , " horreur délicieuse ").

Il remplit tout l'esprit et en exclut toute autre représentation : l'homme se perd dans la représentationdu sublime, contemple véritablement.

Il dépend d'images et de sensations propre à faire naître une forte tensioncorporelle, se traduit par un véritable effort de la part du spectateur (alors que le beau consiste dans la douceur etles sensations qui détendent les nerfs).Le sublime se traduit par un arrêt des forces vitales, par un sentiment depeine puis par un épanchement et une émotion génératrice de joie (alors que le beau provoque un sentimentd'épanouissement et de plaisir).

Ainsi, de cet effort que je fais pour saisir la forme de l'immensément grand, formequi au moment où il me semble la contenir disparaît, se dissout totalement ; de cette crainte qui s'empare de moiface au déchaînement des éléments qui manifestent la disproportion de l'homme d'avec la nature, naît un plaisiresthétique total, dans l'ouverture à l'infinie grandeur et à l'infinie puissance d'une nature qui me dépasseabsolument, mais aussi - et dans le même temps - un sentiment d'effroi lié à ce sentiment d'étrangeté radicale, dedisproportion de l'homme à l'égard de la nature, de déréliction (" Etat de l'homme jeté (sans raison) dans le monde qui se sent abandonné à ses propres forces, sans lumières ni secours à attendre d'une puissance supérieure.

"Lalande, Dictionnaire philosophique ). C'est sur ce sentiment de disproportion qu'il faut insister : l'esthétique du sublime n'a pas qu'une dimensionesthétique en ce qu'elle ne vise pas seulement le plaisir désintéressé du sujet mais qu'elle a un visée véritablementmétaphysique en soulignant la disproportion de l'homme et d'une nature immense qui n'est pas faite pour le recevoir(cf.

Pascal, Pensées , fr.

206 : " Le silence éternel de ces espaces infinis m'effraie (au sens fort, produit un sentiment d'effroi).

") Le sublime est véritablement d'ordre métaphysique en ce qu'il met en jeu esthétiquement nonplus les objets du monde dans une esthétique du beau qui ressortit à une physique comme appréhension des objetsde la nature (fusis), mais l'univers dans son immensité, le monde dans sa totalité et les rapports que l'homme yentretient. Texte 5 " Disproportion de l'homme. Que l'homme contemple donc la nature entière dans sa haute et pleine majesté, qu'il éloigne sa vue des objets basqui l'environnent.

Qu'il regarde cette éclatante lumière mise comme une lampe éternelle pour éclairer l'univers, que laterre lui paraisse comme un point au prix du vaste tour que cet astre décrit, et qu'il s'étonne de ce que ce vastetour lui-même n'est qu'une pointe très délicate à l'égard de celui que ces astres, qui roulent dans le firmament,embrassent.

Mais si notre vue s'arrête là que l'imagination passe outre, elle se lassera plutôt de concevoir que lanature de fournir.

Tout le monde visible n'est qu'un trait imperceptible dans l'ample sein de la nature.

Nulle idée n'enapproche, nous avons beau enfler nos conceptions au-delà des espaces imaginables, nous n'enfantons que desatomes au prix de la réalité des choses.

C'est une sphère infinie dont le centre est partout, la circonférence nullepart.

Enfin c'est le plus grand caractère sensible de la toute puissance de Dieu que notre imagination se perde danscette pensée. Que l'homme étant revenu à soi considère ce qu'il est au prix de ce qui est, qu'il se regarde comme égaré, et que dece petit cachot où il se trouve logé, j'entends l'univers, il apprenne à estimer la terre, les royaumes, les villes, lesmaisons et soi-même, son juste prix. Qu'est-ce qu'un homme dans l'infini ? Mais pour lui présenter un autre prodige aussi étonnant, qu'il recherche dans ce qu'il connaît les choses les plusdélicates, qu'un ciron lui offre dans la petitesse de son corps des parties incomparablement plus petites, des jambesavec des jointures, des veines dans ses jambes, du sang dans ses veines, des humeurs dans ce sang, des gouttesdans ces humeurs, des vapeurs dans ces gouttes, que divisant encore ces dernières choses il épuise ses forces ences conceptions et que le dernier objet où il peut arriver soit maintenant celui de notre discours.

Il pensera peut-être que c'est là l'extrême petitesse de la nature. Je veux lui faire voir là-dedans un abîme nouveau.

Je lui veux peindre non seulement l'univers visible, maisl'immensité qu'on peut concevoir de la nature dans ce raccourci d'atome, qu'il y voie une infinité d'univers, dontchacun a son firmament, ses planètes, sa terre, en la même proportion que le monde visible, dans cette terre desanimaux, et enfin des cirons dans lesquels il retrouvera ce que les premiers ont donné, et trouvant encore dans lesautre la même chose sans fin et sans repos, qu'il se perdra dans ces merveilles aussi étonnantes dans leurpetitesse, que les autres par leur étendue, car qui n'admirera que notre corps, qui tantôt n'était pas perceptibledans l'univers imperceptible lui-même dans le sein du tout, soit à présent un colosse, un monde ou plutôt un tout àl'égard du néant où l'on ne peut arriver.

Qui se considérera de la sorte s'effraiera de soi-même et se considérantsoutenu dans la masse que la nature lui a donné entre ces deux abîmes de l'infini et du néant, il tremblera dans lavue de ces merveilles et je crois que sa curiosité se changeant en admiration, il sera plus disposer à les contempleren silence qu'à les rechercher avec présomption. Car enfin qu'est-ce que l'homme dans la nature ? Un néant à l'égard de l'infini, un tout à l'égard du néant, un milieuentre rien et tout, infiniment éloigné de comprendre les extrêmes ; la fin des choses et leurs principes sont pour lui. »

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