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La modernité et l’unité par la volonté (xvie-xviiie siècle): Machiavel, Hobbes, Locke, Rousseau

Publié le 12/02/2022

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Le statut de l’État selon Machiavel Connaît-on bien ce qui existe et ce que les hommes accomplissent ? N’a-t-on pas, longtemps, préféré décrire ce que les hommes devraient être (bons), au prix déjuger à partir d’illusions plutôt que de ce qui existe immédiatement (désirs et égoïsmes plus ou moins dissimulés) ? La préoccupation du réel féconde la détermination de l’action. Comment s’engager dans la politique si l’on ne comprend pas que les projets doivent sourdre de l’analyse du présent ? Quelles relations entretiennent politique et morale, sachant que la réponse à cette question exige une définition de ce que l’on nomme « politique » ? Quelle valeur prêter à ce terme, l’État (lo stato), dans la mesure où l’unité qu’il promet — la définition du terme implique cette unité et s’y réduit — requiert aussi de statuer sur ses attributions ? En somme, les premières philosophies politiques modernes restituent d’abord un immense travail de révision de l’esprit politique qui, en commençant par définir l’homme moins comme une créature que comme un être d’action éclairée et collective, obligent à percevoir du politique des dimensions inédites. Lorsqu’il sollicite l’Antiquité romaine afin de mieux affirmer l’originalité du moment présent — nouveauté des charges du prince, nouvel avenir de la cité, nouveauté de l’impact du peuple dans la politique, nouveau statut de l’armée — Nicolas Machiavel (1469-1527) n’épargne pas la philosophie politique antérieure : il ne saurait exister ni modèle, ni ordre naturel, ni norme, en matière politique. En publiant Le Prince (1513) et les Discours sur la décade de Tite-Live (1513-1519), il contribue à une autre intelligibilité de la politique et du pouvoir. La politique fourbit les atouts d’une action calculée visant à conduire le peuple, grâce aux contradictions de celui-ci. Elle ne repose nullement sur un consentement. Puisque l’unité du corps politique n’est pas donnée, c’est l’action


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L’invention du droit naturel Où l’on voit que le rapport à la monarchie se pense maintenant en termes d’alternative et non plus en termes d’amélioration. La notion d’un droit naturel se substitue à celle du droit divin, afin de confirmer que le rapport social ne se pense plus en termes théologico-politiques mais en termes d’artifice (d’art humain). La conception d’un pouvoir transcendant est prise à partie au profit de l’idée d’une subordination des gouvernants à la légitimité du peuple souverain. Il est vrai qu’à en juger par son étymologie, démocratie (démos et krateiri), le point de vue conquis ne paraît pas neuf. Nul ne saurait toutefois ramener l’idée moderne de démocratie à son idée antique. La liberté ne se restreint pas aux seuls citoyens de la polis. Elle reste rivée universellement à la* multitude, à la masse composée d’individus égaux du point de vue du droit, même s’ils ne disposent pas du même pouvoir. Mais qu’en est-il du droit naturel, évoqué par tant d’auteurs désormais ? Se succèdent autour de cette thématique des auteurs aussi importants que l’avocat protestant hollandais Hugo Grotius (1583-1645), le juriste allemand Samuel Pufendorf (1632-1694), les philosophes anglais Thomas Hobbes (1588-1679) et John Locke (1632-1704), et bien d’autres qui tâchent de penser ainsi jusqu’à nos jours. De façon polémique, elle promet la critique du droit divin, la nécessité d’établir un État de droit, non sans tomber dans de nouvelles contradictions, dont celle d’allier une référence à la nature à l’idéal artificiel de l’État. Elle transfère le fondement de l’autorité politique dans des conventions destinées à asseoir le corps politique sur de nouveaux principes. En outre, elle soutient la nécessité de renoncer à identifier la loi à la volonté du roi, en la nouant à ces accords dans lesquels chaque homme, devenu citoyen, doit pouvoir se reconnaître. Afin de penser un tel État de droit et une telle figure de la loi, il importe toutefois d’enrichir la théorie d’une conception de la légitimité. Ainsi naît la figure moderne de l’unité politique,

« La modernité et l'unité par la volonté (XVI°-XVIII° siècle) Entre la naissance de l'État moderne (xvr siècle) et la Révolution française (1789), l'émergence de la modernité (humanisme, ratio­ nalisme classique et Lumières) oblige la philosophie politique à restructurer ses thèses.

Laïcité et promesse d'une dignité inédite de l'homme donnent corps à un pouvoir qui ne se fon. »

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