LA POLITIQUE CHEZ PLATON
Publié le 15/03/2011
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Ce qu'il s'agit d'apprécier, Platon dirait presque de mesurer, c'est l'accroissement ou la diminution de l'âme, quand la justice ou l'injustice y pénètre le moraliste est le médecin de l'âme ; il faut, avant d'entreprendre la guérison, qu'il définisse d'abord en quoi consistent l'état de santé et l'état de maladie, et qu'il explique avec détails les bons effets de la justice sur l'âme et les ravages qu'y produit l'injustice. Mais personne n'est habitué à considérer son âme ; on ne pratique pas la maxime : « Connais-toi toi-même. « Pour nous, l'âme se réduit à si peu de chose, qu'il nous serait impossible d'en distinguer nettement les parties et d'y reconnaître tout de suite les atteintes du mal. Or la cité est un agrandissement de l'âme individuelle ; nous pouvons en discerner facilement les différentes classes : sa prospérité ou ses maux sont tout de suite visibles. Il convient donc que la Politique précède la Morale.

«
connaître l'homme, ce n'est pas le désir qu'il faut considérer, ni même le cœur, c'est la raison ; le désir est commeune hydre aux mille têtes, le cœur comme un lion, seule en nous la raison est comme un homme très réduit, maisaux proportions admirables, logé dans notre tête.
De même, pour connaître la vraie nature de l'État, il ne s'agit pasd'employer la méthode empirique de nos politiciens qui le considèrent comme un animal aux mœurs bizarres etinintelligibles dont il n'y a qu'à observer prudemment les réactions sans essayer de les comprendre.
Il faut considérerla cité dans son Idée, c'est-à-dire dans sa perfection.
Or la cité est un groupement d'hommes; elle sera d'autantplus parfaite que les hommes qui la composent seront plus étroitement unis.
Mais entre les méchants il n'y a pasd'union solide, parce qu'ils ne considèrent que leur intérêt propre sans se soucier de l'intérêt général.
La cité ne seradonc forte que dans la mesure où les hommes qui la composent seront vertueux.
Mais il n'y a de vertu solide quedans et par la philosophie ; toute autre vertu, étant instinctive, ne peut être transmise par l'enseignement, et estsujette à des erreurs.
Il n'y aura donc d'État véritable que le jour où les philosophes seront rois, ou bien les roisdeviendront philosophes.
Il n'y a pas de procédé, d'artifice constitutionnel qui tienne lieu de ce lien divin entre leshommes.
Le pouvoir peut être entre les mains d'un seul, d'une minorité ou de la majorité, le gouvernement peut êtremonarchique, aristocratique ou démocratique, chacun de ces gouvernements peut même agir avec ou sans lois etdans ce dernier cas devenir une tyrannie, une oligarchie ou une démagogie, peu importe ; tous ces caractères nesont qu'extérieurs ; le seul point à considérer pour juger un État est celui de savoir si la philosophie y règne ou non.Ce qui est vrai, c'est que les aptitudes philosophiques, la mémoire, le goût de la vérité, l'horreur du mensonge nonseulement volontaire, mais même involontaire, la tempérance, le courage, la faculté de voir les Choses d'ensemble,se rencontrent rarement parmi les hommes : il y a donc très peu de chances pour qu'un gouvernement démocratiquesoit conforme à la sagesse ; il y en a davantage pour qu'une aristocratie parvienne à connaître les véritables règlesde la politique; mais toutes les espérances de Platon se reportent sur le roi, ou même le bon tyran, qui seconvertirait à la philosophie et ferait le bonheur de ses peuples au besoin malgré eux.
Un médecin, sûr de lui-même,ne craint pas d'imposer au patient les plus grandes douleurs pour le sauver.
Les moyens importent peu ; la fin seuleest à considérer.
S'il le faut, on mettra des hommes à mort, on en bannira d'autres ; s'il Je faut, on fera desrévolutions et des coups d'État, on renversera les lois : la désobéissance aux lois, qui doit être condamnée chezcelui qui ne cherche par là qu'un surcroît d'honneurs et de richesses, doit être approuvée de la part du sage qui agitpour l'intérêt général.
Platon ne prend aucun souci de ce qui nous tient tant à cœur, de la liberté individuelle ; ilignore la tolérance, qui défend d'employer la force au service des Idées ; il nie que le réformateur soit obligé depersuader chaque citoyen de l'utilité de chaque réforme ; ce travail lui paraît au-dessus des forces humaines, etpuis il ne convient pas que le philosophe paraisse briguer le pouvoir et implorer la confiance du peuple : c'est lemalade qui doit aller frapper à la porte du médecin ; ce n'est pas le médecin qui doit solliciter les malades.
Il suffitque le réformateur puisse se rendre des comptes à lui-même, et puisse expliquer aux autres sages la raison de sesactes ; à la multitude, qui comme les enfants n'est pas capable de vérité, on donnera de fausses raisons, onracontera des fables, des mythes, et, si elle ne se laisse pas convaincre, on pourra sans scrupules employer lacontrainte et les punitions.
Ce qui excuse, selon Platon, toutes les audaces, c'est que dans un tel État, où lesphilosophes seraient maîtres, si l'unanimité n'existe pas en fait, elle pourra du moins toujours se produire, etn'importe quel citoyen, pourvu qu'il fasse l'effort nécessaire et qu'il ait l'intelligence suffisante, pourra se rendrecompte de la raison des lois ; toute loi, en effet, y sera précédée d'explications et d'exhortations.
La loi, telle qu'elle est.
— Voyons, au contraire, comment sont constitués la plupart des États.
Tous les empires, lesuns après les autres, se divisent et s'écroulent ; ils sont, pour la plupart, si peu fondés en raison que, loin de nousétonner de leur chute, il faut nous étonner bien plutôt qu'ils puissent durer aussi longtemps : c'est que le besoin desociété est bien puissant chez l'homme.
La vie solitaire, en effet, lui est impossible; pour satisfaire ses besoins,manger, se vêtir, se loger, il faut qu'il s'associe avec d'autres hommes.
La société est d'abord un lien imposé par lanature, un lien de nécessité.
Le même homme ne peut être à la fois agriculteur, maçon, meunier, etc.
; chacune deces opérations est mieux faite quand elle l'est par des hommes qui s'y sont habitués.
La grande loi de la division dutravail, qui régit la nature vivante tout entière, a été pour la première fois posée par Platon.
Mais cette solidaritéque la division du travail établit entre les hommes est un lien fragile que les passions peuvent briser : il faut, pour lefortifier, le transformer en un lien d'harmonie et de raison : c'est ce que ne font pas les peuples.
La vertu politique, telle qu'elle est ordinaire ment comprise, se résume dans l'obéissance à la tradition ou à la loi,c'est-à-dire à l'opinion qui a triomphé.
Mais comment a été faite cette loi, écrite ou non? Sans méthode, au hasarddes circonstances.
Le législateur, quand il réglementait l'héritage ou la propriété, n'a jamais pensé qu'aux dangersprésents, sans réfléchir au but final que poursuivent les sociétés.
Il ressemble à un homme inexpérimenté dans l'artde la lutte qui porte les mains à l'endroit où il vient d'être frappé, incapable de prévoir et de parer les coups qui vontsuivre.
C'est ainsi que se sont constituées par routine, au jour le jour, au fur et à mesure de l'expérience humaine,les lois qui aujourd'hui régissent la société.
Aussi les principes selon lesquels le pouvoir est distribué entre leshommes sont-ils très divers : l'âge, la force, la richesse, la noblesse, le succès à la guerre, toutes ces raisons decommander sont reconnues à la fois dans le même État, alors qu'il ne devrait y en avoir qu'une seule, celle-là mêmequi nulle part n'est reconnue, l'autorité du savoir.
Outre les politiques proprement dits, les poètes et les prêtres ont encore contribué à la formation des traditions.
Selaissant conduire eux-mêmes au gré de l'inspiration, ils ont répandu dans le peuple les doctrines les plus fausses ;que les dieux, par exemple, sont causes du mal autant que du bien ; ils les représentent comme des enchanteurs quise plaisent à prendre mille formes différentes, à nous faire illusion en affectant nos sens, comme s'ils étaientréellement présents (fin du IIe livre de la République).
Ils entretiennent la peur naturelle à l'homme en racontant surles Enfers mille histoires terrifiantes.
Des hommes façonnés par ces légendes seront naturellement, comme leursdieux, querelleurs, séditieux, cruels, menteurs, et, l'autre monde leur paraissant un lieu plein d'horreur, ils craindrontla mort et ne pourront être courageux (début du IIIe livre).
Les prêtres, profitant de ces superstitions, laissent.
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