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La révolte vaut-elle mieux que la résignation ?

Publié le 11/10/2005

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Le sujet demande de "préférer", de faire donc un choix entre deux attitudes qui posent toutes deux problème. Au nom de quoi devons-nous affirmer notre préférence ? On peut trouver l'idée de révolte séduisante, mais cette séduction est-elle un critère suffisant ? La révolte implique en effet l'idée de violence : peut-on "préférer" une action violente ? Si l'idée de révolte peut être glorifiée par principe, par ailleurs, on peut regretter de fait la violence qu'elle entraîne. Faut-il alors se tourner vers la résignation, vers l'acceptation, la reconnaissance du caractère indépassable des contraintes qui s'imposent à nous ? Certes, une telle attitude ne sera pas violente (elle se contentera peut-être de subir la violence) ; mais peut-on pour autant la "préférer" ? La résignation n'est-elle pas le masque de l'irresponsabilité ? De l'incapacité à affirmer sa liberté en se réfugiant par lâcheté derrière des forces qu'on prétend insurmontables ? Quelle préférence marque-t-elle le plus l'exercice de la liberté ? La résignation n'est-elle pas un choix sensé et libre ? Si l'on veut préférer la révolte, il faut pouvoir la justifier devant la raison : est-ce possible ? Peut-on légitimer la révolte ?

« palais des sciences sur le roc de la certitude. Mais une question nouvelle apparaît : pendant que je détruis mon ancienne demeure, pour en reconstruire unenouvelle, où vais-je loger ? « Car ce n'est pas assez, avant de recommencer à rebâtir le logis où l'on demeure, que de l'abattre [...] il fautaussi s'être pourvu de quelque autre où o puisse être logé commodément pendant le temps qu'on ytravaillera. » Pendant que le doute m'oblige à n'admettre aucun principe, comment vais-je vivre, et vivre au milieu des autres, sur quels principes vais-je régler mes actes, moi qui rejette tous les principes ? Sur quels critèresvais-je choisir d'agir, pendant que je doute de tout ? La démarche intellectuelle de Descartes l'oblige à être irrésolu en ses jugements, de tout passer au crible du doute, mais « les actions de la vie ne souffrent aucun délai .

» « Ainsi, afin que je ne demeurasse point irrésolu en mes actions pendant que la raison m'obligerait de l'être enmes jugements, et que je ne laissasse pas de vivre dès lors aussi heureusement que je pourrais, je formaisune morale par provision. » La morale par provision consiste à se donner des règles d'action, temporaires et révisables, pour vivre et agirde façon décidée et résolue, alors même que le doute me contraint à ne rien admettre pour vrai.

On est là àun moment très particulier de la démarche cartésienne ; un moment où le divorce est possible entre raison &action.

Ce qui prime dans l'ordre de la connaissance c'est la vérité.

Et elle impose le doute, la patience, lacirconspection.

Ce qui prime dans l'action, c'est la résolution, c'est de savoir prendre partie s'y tenir face àl'urgence de la vie.

La morale par provision ne correspond qu'à un moment précis de la vie : celui oùj'entreprends une réforme intellectuelle totale alors même qu'il me faut continuer à agir. Elle est nécessaire au moment où mes actes ne peuvent pas encore parfaitement correspondre à la vérité, etceci parce que je cherche une vérité que je n'ai pas encore atteinte.

Les règles de la morale par provision ou« morale provisoire » sont donc par essence révisables, et Descartes récrira une morale une fois sa métaphysique et sa physique fondées.

Pour l'instant, il s'agit de se donner les maximes les plus prudentes etles plus aptes à m'assurer le contentement, alors même que je ne dispose d'aucun principe ferme pour guidermon action.

Si l'on reprend la métaphore de Descartes , elles correspondent à cette maison dans laquelle j'habite temporairement, pendant que je reconstruis mon palais. La première maxime de Descartes recommande un conformisme extérieur : puisque rien ne me dit quelles moeurs ou quelle religion adopter en toute connaissance de cause, autant m'en tenir à celles de mon pays.

Ceconformisme n'est que la façade et n'implique aucune adhésion intérieure.

La seconde maxime consiste en unusage ferme et constant de la volonté ; une fois une décision prise, il ne faut pas en démordre.

Si je me perdsen forêt, il me faudra bien choisir, fut-ce au hasard, une direction, et si je veux ne pas m'égarercomplètement, m'y tenir. La troisième maxime est : « de tâcher toujours plutôt à me vaincre que la fortune et à changer mes désirs plutôt que l'ordre du monde ».

Descartes affirme que cette règle est aussi facile à comprendre que difficile à appliquer.

En fait, il s'agit là d'une maxime d'inspiration stoïcienne, quasi directement recopiée d' Epictète , et qui nous invite à faire le départage entre : · d'une part ce qui dépend de nous, ce sur quoi nous avons un pouvoir ; · d'autre part ce qui ne dépend pas de nous, et dont nous devons nous exercer à ce qu'il ne nous touche en aucune façon. Le but que poursuivent les stoïciens, et Descartes ici, est de nous rendre les plus indépendants possibles des coups du sort, d'assurer au sujet la plus grande autonomie possible.

Or pour cela il faut NOUS vaincre, plutôtque de nous en prendre à la fortune (au mode, au hasard) et changer nos désirs plutôt que de sombrer dansl'illusion de remodeler le mode suivant nos projets.

Comme le déclare Epictète : « Ce n'est pas en satisfaisant nos désirs que l'on se fait libre, mais en détruisant les désirs. » On voit ici naître l'opposition entre le sujet et la fortune, ses désirs et le monde.

En fait, il faut d'abord savoirfaire la différence entre ce qui dépend de nous et ce qui n'en dépend pas, compter nos propres forces, et lesmesurer à celles du monde qui nous fait face. Ce qui m'appartient en propre et sur quoi j'ai un pouvoir, c'est moi-même, mes désirs, mes pensées, l'initiativede mes actes. Par contre, les choses extérieures, ce qui prend pour moi la forme du hasard, l'action des autres, lesconséquences de mes actes, tout cela échappe à mon contrôle, dépasse mon pouvoir. Or, aussi évident que cela paraisse, les hommes n'ont pas conscience de cette opposition.

Comme le fait. »

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