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La rhétorique est-elle un art du mensonge ?

Publié le 11/01/2004

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mensonge

La rhétorique désigne l'art de bien parler, c'est-à-dire l'ensemble des procédés mis en oeuvre pour obtenir un effort de persuasion sur son public. La question qui nous est posée ne nous invite pas à entendre le terme d'art dans un sens propre, c'est-à-dire comme une activité de production d'artefacts. Il s'agit plutôt du sens élargi du terme « art « que nous sommes invités à méditer, à savoir l'art comme technique, comme ensemble de moyens subordonnés à la réalisation de fins précises. Il nous faudra donc nous interroger sur la dimension technique de la rhétorique, c'est-à-dire sur sa dimension de somme de recettes, de moyens établis en fonction de buts déterminés. Le mensonge est la production d'un discours contraire à la vérité. Dire que la rhétorique est un art du mensonge signifie qu'elle est une technique du discours visant exclusivement à tromper, à abuser autrui, et non à établir le vrai. En ce sens, elle s'oppose radicalement à la philosophie, qui se présente au contraire comme « amour de la sagesse «, c'est-à-dire comme une recherche désintéressée de la vérité pour elle-même. Toute l'histoire de la réflexion sur la rhétorique a été marquée par un texte en particulier : le Gorgias de Platon, qui oppose précisément la vie selon la rhétorique et la vie selon la philosophie, la technique du mensonge et la technique de la vérité. Nous nous demanderons donc dans quelle mesure les arguments platoniciens procédant à la condamnation sans appel de la rhétorique comme art du mensonge peuvent être relativisés, afin de procéder à une réhabilitation au moins partielle de la rhétorique comme art du discours plutôt que comme art du mensonge exclusivement.

mensonge

« persuasion d'autrui.

Cependant, il faut bien voir que cette fin, à savoir la persuasion d'autrui, est en réalité unmoyen subordonné à une autre fin qui est le pouvoir.

En effet, les sophistes comme Gorgias et Polos se proposentd'obtenir le pouvoir par leur force de persuasion sur la foule, dans les assemblées démocratiques.

Par conséquent,leur art est bien un art du mensonge, car il vise des fins totalement étrangères à la vérité et sert uniquement àmanipuler une foule plus ou moins éduquée et crédule. c.

La rhétorique est une technique du mensonge foncièrement immorale En définitive, il semble bien que la rhétorique ne soit rien d'autre qu'une technique du mensonge foncièrementimmorale.

En effet, la fin de la rhétorique étant l'obtention du pouvoir (que ce soit le pouvoir politique, ou le pouvoirqui consiste à influer sur le jugement et les actes d'autrui par la force persuasive du discours) elle ne vise pas auBien véritable.

Dans le Gorgias , Socrate montre que la puissance réside dans la poursuite des fins conformes à la raison et à la justice, de sorte qu'agir à l'encontre de la justice est la pire de toutes les impuissances.

Il vaut doncmieux subir l'injustice que la commettre, puisqu'elle est le plus grand des maux.

Par conséquent, la rhétorique estune technique immorale du discours qui nous détourne tout autant de la vérité que du Bien véritable. II.

Pour une réhabilitation de la rhétorique comme outil et ornement du discours a.

La rhétorique, structure du discours Cependant, il faut bien voir que cette critique en règle de la rhétorique comme art immoral du mensonge, comme artde la flatterie, est d'une sévérité outrée.

Elle sert pour une grande part à la défense et à l'illustration de laphilosophie elle-même, que Socrate présente contre le sophiste Calliclès comme un mode de vie conforme au Bien età la Justice.

Mais ce faisant, elle exagère la dimension immorale de la rhétorique, dont nous tendrons à montrer danscette partie qu'elle est moins un art du mensonge qu'un art du discours, sans véritable dimension morale.

Car larhétorique n'est pas que cette discipline ennemie de la philosophie : elle est aussi la structure du discours enseignéedans les collèges jésuites au XVIIe siècle et au XVIIIe siècle notamment.

En effet, elle apprend à organiser lapensée selon un certain ordre qui va de la présentation de la matière abordée, à l'argumentation ordonnée d'unethèse en plusieurs points, jusqu'à la conclusion dont le but est de montrer le résultat de la démarche.

Elle ne sedonne pas comme un art du mensonge, mais uniquement comme une technique argumentative servant à clarifierl'exposition d'une thèse. b.

La rhétorique peut être mise au service de la vérité Ce qui peut sortir du point que nous venons de développer est que la rhétorique peut tout aussi bien être mise auservice de la vérité que du mensonge.

Si elle est une technique, elle peut fort bien servir à la démonstration du vraiet non pas seulement du faux comme le pensait Platon.

Allant plus loin, dans la mesure où la rhétorique est cet artd'ordonnancement rationnel du discours, elle entretient peut-être plus d'affinités avec le vrai que le faux, puisqu'ellerépond à des exigences de clarté de l'exposition des idées.

Par exemple, la dissertation philosophique est unexercice purement rhétorique, puisqu'elle impose une structure a priori à l'exposition de la pensée, mais sa fin est levrai, la mise en œuvre d'une pensée dont l'évolution est intelligible et dont les résultats se veulent nécessaires.Parlant de la rhétorique, nous avons tendance à l'associer à l'idée d'ornements, de « fleurs de rhétoriques »étouffant la pensée claire.

Mais elle n'est pas que cette surcharge, cette flatterie, mais également une structurereproductible.

Quand bien même sa fin véritable serait moins la vérité que la persuasion, il n'en resterait pas moinsque la vérité est encore le meilleur moyen de persuader, le plus simple et le plus direct, ce dont il sort que larhétorique peut être un art de la vérité. c.

La rhétorique, « un instrument qui peut servir en toutes sortes de rencontres ». « La rhétorique peut être un art de la vérité » : le « peut être » est important.

Car il ne s'agit pas de faire de larhétorique l'art de la vérité après en avoir fait l'art du mensonge.

Mais de dire qu'elle est uniquement un art dudiscours, indépendant de toute dimension morale intrinsèque.

Elle est ce qu'en fait le locuteur, et rien d'autre.Descartes écrivait à propos du langage qu'il était un « instrument qui peut servir en toutes sortes de rencontre ».

Ily a quelque chose de similaire dans la rhétorique, qui est un usage du langage dont les finalités sont variables etmalléables selon les circonstances et les individus, une technique discursive qui se propose plus l'efficacitépersuasive comme but que le mensonge à l'exclusion de la vérité, ou la vérité à l'exclusion du mensonge. Conclusion :. »

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