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La technique est-elle une menace pour l'humanité ?

Publié le 27/02/2008

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  Si les romans de Science-fiction ont longtemps véhiculé une certaine angoisse quant à notre futur technologique, il semble pourtant, depuis les premières peurs de l’ère atomique jusqu’à nos angoisses sur le climat, que la fiction prend un visage étrangement réel, d’angoisse floue, on passe à la peur nettement plus distincte d’une menace pour notre futur. Pourtant si l’homme s’est d’abord fait inventif, c’est pour lutter contre l’insécurité, satisfaire de façon plus sûre ses besoins fondamentaux. Les inventions essentielles de l’humanité (comme l’agriculture, le feu) furent des moyens de lutter contre l’hostilité et les aléas de la nature, de cesser d’être à sa merci. Dès lors, comment expliquer ce changement ou du moins, cette ambivalence de la technique ? Si elle fût peut-être libératrice par le passé, la technique est-elle une menace pour l’humanité dans le futur ? Est-ce la technique en elle-même qui constitue cette menace (ce qui revient à se poser la question de sa neutralité : la technique est-elle intrinsèquement bonne ou mauvaise ou bien neutre) ? Cette question pourrait d’ailleurs sembler étrange si l’on considère que la technique est seulement un moyen, un outil pour réaliser une fin que l’homme s’est fixé, d’où un certain paradoxe : comment l’outil nous aurait-il imposé une fin non désirée (la destruction de notre planète), l’homme a-t-il perdu la maitrise de son outil ou bien la technique serait-elle devenue une fin en soi ? Il semble bien qu’il y ait une certaine perte de repères. De plus, du fait que la technique semble être consubstantielle d’une certaine forme de progrès, on a tendance à la penser essentiellement sur le mode du futur. La menace de la technique est toujours à venir et ses conséquences toujours lointaines semble-t-on penser, pourtant n’y a-t-il pas une certaine forme de menace qui va nécessairement de pair avec la technique et ce, dès ses prémices, sans attendre son hypothétique plein développement, comme présente en son essence même ? On peut peut-être s’interroger alors de manière plus fondamentale sur ce qui porte atteinte à l’homme dans la technique, et par là même, voir quelle dimension essentielle de l’homme est éclairée par son rapport à celle-ci. Ainsi on verra d’abord en quoi la technique semble effectivement être une menace pour l’humanité dans le futur et ce que cela engage comme conséquences pratiques, pour voir ensuite que la menace n’est peut-être pas seulement à venir et qu’il y a dans l’essence même de celle-ci quelques dangers pour l’humanité. Enfin, on verra que ce rapport de l’homme à la technique est en réalité plus ambivalent qu’il n’y parait de prime abord et que partant, il permet de faire la lumière sur certaines dimensions de la vie humaine.

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« raisonnable et légitime quant au futur, il faut néanmoins voir que la technique par certains aspects porte atteinte àl'homme dès à présent, de par son essence même.a) danger du pragmatisme total : le développement de la technique amène à tout penser selon son modèle d'utilitéet de réussite : ce qui ne sert à rien perd toute valeur, dire d'une chose qu'elle est inutile devient une condamnation( ainsi l'apprentissage du latin ou du grec parce qu'ils n'ont pas d'utilité évidente à court terme est délaissé), onpense toutes choses sous la perspective de l'efficacité et du rendement (le speed dating en étant le pire exemple :on maîtrise peut-être l'espace mais plus le temps…).

Tout ce que la technique touche devient en quelque sortetechnique : ainsi Heidegger montre que la technique dévalue le langage, lieu où se dévoile l'Etre et la vérité (mais aussi la poésie) vers le simple outil.b) l'aliénation par la technique : travail à la chaine, fin du travailenrichissant : on perd le rapport à ce qu'on produit (oppositionartisan/ouvrier).

Mais plus généralement, aliénation en ceci que la techniquemême la plus primitive (pas besoin de se tourner vers le futur) tend àremplacer le corps et l'esprit par l'outil et la machine, et en ce sens est uneavancée dans l'inhumanité : l'automatisme est inhérent à la technique.c) Pour Heidegger, la technique nous fait oublier le fondamental, elle est miseen œuvre d'un savoir qui ne prend pas en compte les fins ultimes de sonactivité.

Elle est purement instrumentale : domaine des moyens et oubli desfins.

Selon lui, elle pervertit aussi notre rapport au monde : le monde devientainsi tout ce qui est « exploitable, on en vient à considérer toute chosecomme un outil : on perd notre rapport qualitatif au monde pour le considérerdu simple point de vue quantitatif.

III- L'homme face à la technique, l'homme face à lui-même.

Toutefois, même s'il est indéniable que la technique porte atteinte à l'hommejusque dans les dimensions les plus intimes de son être, il ne faut pas tombernon plus dans la « technophobie », il faut aussi voir que la technique fut etest un formidable moyen de libération à l'égard de la nature et de certains denos besoins.

Ainsi même s'il est difficile de soutenir une neutralité de latechnique (elle ne serait intrinsèquement ni bonne ni mauvaise mais ambivalente, elle dépendrait de ce que l'on enfait) comme cela a pu être fait, il n'en reste pas moins que la véritable menace pour l'humanité, réside toujours dansles choix humains.a) l'origine de la technique : réponse au rêve, non aux besoins.Pour Bachelard, la technique est non pas, comme on le dit souvent, la réponse à des besoins mais la réponse auxrêves et fantasmes de l'humanité (les grandes découvertes maritimes ont été faites pour obtenir non pas des vivresou d'autres produits nécessaires mais pour des épices ! c'est-à-dire du non-nécessaire, du luxe ou pour reprendrel'idée de Bachelard : la navigation n'a pas été inventée pour atteindre la rive opposée du fleuve mais le jour où l'on amis le premier cercueil à l'eau : la part d'imaginaire de l'homme prime toujours ).

Dès lors, étrangement le problèmede la technique rejoint le problème de l'homme comme animal désirant.b) En effet, dans la finalité de la technique se joue le problème des contradictions entre ce qui est rationnellementvoulu et ce qui est désiré, deux axes qui coïncident rarement comme le montre Platon dans le Gorgias ; ainsi le tyran qui fait tout ce qu'il désire, qui tue ceux qui le gêne, ne fait pas ce qu'il veut en réalité : on veut ce qui est bon pour soi, or dans nos désirs, on se trompe souvent sur ce qui est véritablement bon, d'où la tension entre cequ'on devrait vouloir et ce qu'on désire (« pour punir les hommes, les dieux exaucent leurs souhaits » dit ainsi leproverbe grec).

Ainsi la sagesse ou peut-être plus modestement la responsabilité comme chez Hans Jonasconsisterait à faire coïncider nos désirs avec un peu plus de raison : pour la technique, il s'agit certainementd'arrêter de la penser comme effrénée et d'affirmer notre responsabilité, notre liberté en fixant raisonnablement deslimites à celle-ci et surtout des finalités claires pour qu'elle cesse d'être la simple expression de la volonté depuissance de l'homme sous l'alibi de répondre à des besoins.

Une nouvelle philosophie de la nature : le principe de responsabilité□ Le philosophe et théologien allemand Hans Jonas (1903-1993), envisageant les conditions nouvelles imposées àl'action humaine par les transformations de l'environnement, a proposé une éthique de la responsabilité envers lesgénérations futures, destinée à guider l'intervention technique de l'homme sur la nature.□ Cette éthique est nouvelle, dit Hans Jonas.

Elle excède le champ traditionnel de l'éthique, qui, d'une part,concerne essentiellement le domaine des rapports que l'homme entretient avec lui-même et avec autrui, et qui,d'autre part, n'intègre pas la question de la durée des effets de l'action dans l'appréciation de la valeur de l'action.L'éthique traditionnelle, parce qu'elle est anthropocentrée, n'est pas capable de fournir les normes d'une action juste. »

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