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L'art est-il évasion de la réalité ?

Publié le 04/02/2004

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L'artiste répondra par l'affirmative : l'art a pour but de nous faire oublier la médiocrité parfois insupportable du quotidien. Le philosophe nous répondra aussi certainement par la négative : loin de nous plonger dans un monde d'illusions, l'art nous fait accéder à une réalité plus « vraie », plus « essentielle», plus ... « réelle ». S'il est douteux que Zola ou Eluard aient voulu divertir leurs lecteurs de la cruauté du réel, on peut encore plus facilement porter le doute sur cette réalité à laquelle l'art nous donnerait accès. Soit une chose est, soit elle n'est pas. Si elle est, elle appartient à la réalité ; si elle n'est pas, elle n'appartient pas à la réalité. Comment une réalité pourrait-elle être plus vraie qu'une autre ? Vers quoi l'art permettrait-il de s'évader, si ce n'est vers quelque chose de réel et qui existe bel et bien ? Il convient donc d'éclaircir, sinon le sens, du moins l'usage du concept de réalité. L'art nous donne l'occasion de le faire. En effet, si l'artiste peut forger toute les chimères qu'il peut et que jamais je ne rencontrerai dans la vie quotidienne, il n'en demeure pas moins que ces chimères existent : je n'ai jamais croisé de licorne, et pourtant j'ai une idée très précise de ce qu'est une licorne. De quelle réalité l'art est-il évasion ? Et s'il est véritablement évasion, permet-il d'accéder à autre chose qu'à la réalité ?

L'art dont il est question ici peut aussi bien être l'art du technicien que celui de l'artiste. La technique nous libère en effet de certaines contraintes naturelles ou sociales. Mais, à la réflexion, la notion d'«évasion« n'évoque pas l'idée d'une adaptation, d'une libération fondée sur la prise en compte des lois du réel: elle renvoie plutôt à une fuite devant des nécessités contraignantes. On ne saurait donc envisager l'action libératrice de la technique comme une «évasion«, terme qui semble bien plutôt s'appliquer au repli dans l'imaginaire. Ainsi compris, le sujet pointait essentiellement en direction des disciplines artistiques.

« d'échapper à la réalité, il permettrait au contraire de mieux l'appréhender. La sublimation : le cas de Léonard de Vinci La sublimation est une des notions qui ont le plus retenu l'attention endehors même de la psychanalyseparce qu'elle semble susceptibled'éclairer les activités dites «supérieures », intellectuelles ouartistiques.

Pour cette raison même,sa définition est incertaine, chezFreud lui-même, parce qu'elle fait appel à des valeurs extérieures à lathéorie métapsychologique.

Le motmême évoque bien entendu la grandecatégorie morale et esthétique dusublime, mais aussi la transformationchimique d'un corps quand il passe del'état solide à l'état gazeux.

Peut-êtrepouvons-nous en tirer l'idéed'élévation depuis les bas-fonds(sexuels ?) de l'âme jusqu'à ses expressions les plus élevées.

La psychanalyse ferait alors le mouvementinverse de celui que lui assignait Freud quand il choisissait comme épigraphe à L'interprétation des rêves, le vers de Virgile dans l'Énéide : « Flectere sinequeo superos, Acheronta movebo » (« Si je ne peux fléchir les dieux d'enhaut, j'ébranlerai ceux de l'enfer »).

Freud va jusqu'à utiliser l'expression paradoxale de « libido désexualisée », éloignée des buts et objets sexuels.Notons cependant que ce n'est pas « l'instinct sexuel » unifié qui est ainsisublimé.

La sublimation est essentiellement le destin des pulsions partielles, c'est-à-dire celles dont l'issue aurait pu être la perversion ou la névrose.Freud n'a guère précisé le domaine de la sublimation en dehors des activités scientifiques ou artistiques.

Dans le Malaise dans la civilisation il semble lui rattacher les activités professionnelles quand elles sont librement choisies.D'autre part, il considère comme une forme de sublimation les formations réactionnelles c'est-à-dire ces barrières élevées contre les pulsions,consolidées pendant la période de latence par l'éducation, mais qui tirentleurs forces de la libido elle-même.

Ainsi se forment les traits de caractère :« Ainsi l'entêtement, l'économie, le goût de l'ordre découlent-ils del'utilisation de l'érotisme anal.

L'orgueil est déterminé par une fortedisposition à l'érotisme urinaire » (Trois essais, p.

190).

Le processus de lasublimation ne nous propose pas seulement une esquisse de caractérologie, mais plus généralement encore de la vie éthique : « C'est ainsi que laprédisposition perverse générale d e l'enfance peut être considérée commela source d'un certain 'nombre de nos vertus dans la mesure où, parformation réactionnelle, elle donne le branle à leur élaboration »(ibid., p.190).Cependant le texte principal sur la sublimation reste Un souvenir d'enfance de Léonard de Vinci (1910).

Le souvenir est le suivant : « Je semble avoirété destiné à m'occuper tout spécialement du vautour, écrit Léonard, car undes premiers souvenir d'enfance est qu'étant au berceau, un vautour vint àmoi, m'ouvrit la bouche avec sa queue et plusieurs fois me frappa avec saqueue entre les lèvres ».

Bien entendu ce récit peut n'avoir aucuneobjectivité et être une reconstruction.

Or Freud ne dispose que d'un matériel fort réduit pour interpréter cet unique souvenir d'enfance : quelqueséléments biographiques peu sûrs, des textes et des dessins des fameuxCarnets et enfin surtout l'oeuvre artistique.

En fait Freud s'appuie sur la symbolique dégagée par l'expérience psychanalytique et sur la symboliquedes légendes et des mythes (en particulier de l'Égypte ancienne concernantle vautour).

D'emblée il compare le souvenir au moins en partie reconstruit,avec la préhistoire fabuleuse que s'attribuent les peuples.

Il retrouve dans lesouvenir d'enfance de Léonard, la théorie sexuelle infantile de la mèrephallique que l'expérience psychanalytique met en rapport avec une relationérotique intense à la mère et avec un type d'homosexualité vraisemblablechez le peintre, même si elle n'est restée que platonique.

Freud cite alors le fameux sourire énigmatique des figures féminines ou masculines dans lestableaux de Léonard, et même il reprend à son compte la « découverte » de. »

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