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Le déterminisme scientifique est-il incompatible avec le libre arbitre?

Publié le 11/09/2004

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• L'affirmation de la liberté humaine pose en effet le problème du rapport de l'homme avec la nature. De fait, la nature (le monde), pour peu que nous la pensions, que nous essayions de la comprendre, nous apparaît comme le règne du déterminisme : tout phénomène a une ou plusieurs causes et « s'explique « par sa ou ses causes. Comprendre quelque chose, c'est donc nécessairement le déterminer.

• Or, l'homme fait partie de la nature, du monde : comment donc peut-il concilier sa liberté avec le déterminisme naturel ? Les principales et classiques réponses possibles sont les suivantes :  a) Poser que le déterminisme naturel n'est pas absolu, et qu'il existe une certaine contingence naturelle (cf. par exemple, le clinamen des atomes chez  Épicure et Lucrèce) qui s'accroîtrait à mesure que l'on passe de l'ordre physique à l'ordre biologique et à l'ordre humain.

 b) Poser un dualisme fondamental entre la matière et l'esprit. La nature, le monde de la matière, est le lieu d'un déterminisme rigoureux, tandis que l'esprit, la pensée, est celui de la liberté. Cf. le dualisme cartésien : en tant que corps, l'homme appartient à la nature et est soumis à ses lois, mais en tant qu'âme, que pensée, il leur échappe.  c) Poser que le déterminisme de la nature est total et que l'homme n'y échappe pas ; que la liberté humaine est donc illusoire.  d) Poser que le déterminisme de la nature est rigoureux et que l'homme ne peut s'y soustraire ; que cependant sa volonté n'est déterminée que par elle-même, et que donc la liberté humaine consiste à accepter et à vouloir la nécessité (cf. le stoïcisme).  e) Poser que le déterminisme de la nature est rigoureux et que la volonté humaine est elle-même déterminée, mais que la volonté ne se distinguant pas de la connaissance, la liberté consiste dans la connaissance vraie de nos déterminations par laquelle nous devenons la cause de notre volonté (cf. Spinoza).

• Les deux premières réponses (a, b) posent la liberté comme spontanéité et comme libre arbitre, les deux dernières (d, e) l'appréhendent comme délivrance et libération (cf. P. Ricoeur : « C'est la leçon de Spinoza : on se découvre d'abord esclave, on comprend son esclavage, on se retrouve libre de la nécessité comprise).

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« SPINOZAL'existence du libre arbitre, c'est-à-dire de la totale liberté de notre volonté, après avoir été hautement affirmée parDescartes, a été mise en cause par Spinoza de la manière la plus radicale.

Pour Spinoza, en effet, «l'homme est unepartie de la Nature» (l'Éthique, 1677).

Les êtres humains se trouvent donc, comme toutes les autres parties de laNature, soumis au déterminisme : leurs comportements comme leurs désirs et leurs décisions découlent de causesprécises.

Si les hommes se croient libres, c'est parce qu'ils ignorent les causes qui les font agir.

Le libre arbitre estdonc, selon Spinoza, une illusion qui provient de notre ignorance : ne sachant pas, la plupart du temps, quelles sontles causes qui motivent nos décisions, nous nous imaginons que nous décidons «par nous-mêmes ».

LeibnizCette critique du libre arbitre s'est ensuite prolongée chez Leibniz, en fonction de deux principes fondamentaux.

Le«principe de raison suffisante» veut que tout ce qui arrive en ce monde ne soit pas le produit du hasard, maispossède une raison d'être.

Notre volonté, si l'on applique ce principe, n'est donc pas cause d'elle-même.

Ce quenous pensons avoir décidé librement découle d'un élément particulier, même si celui-ci nous échappe.

L'autreprincipe est que «la nature ne fait pas de saut», ce qui signifie que tout événement découle de manière nécessairede ce qui le précède.

En ce sens, l'idée d'un commencement radical des actes libres et l'affirmation que la volontéen est la seule cause participent plus • de l'illusion que de la connaissance.

Cette analyse peut se comprendre demanière simple à partir d'un exemple concret.

Lorsque, dans un ensemble de pièces de monnaie identiques, nous enprenons une pour régler un achat, nous pourrions penser que c'est, là aussi, la volonté qui détermine nos actes etque, sans elle, rien ne se ferait.

Or il nous faut constater que cette situation est totalement déterminée.

La raisonqui nous fait choisir telle ou telle pièce de monnaie ne relève pas d'un choix.

D'abord parce que la rapidité de rattene laisse pas le temps de la réflexion.

Ensuite parce que la répartition des pièces dans la main se présente selon unordre qui peut nous influencer : nous prendrons la pièce qui est plus près de nos doigts, par exemple, en fonctiondonc d'une configuration spatiale qui a sa propre raison d'être et qui est indépendante de notre volonté.

Action morale et responsabilitéQuelle que soit la diversité des analyses, toutes les critiques du libre arbitre présentent la même démarche, quiconsiste toujours à replacer notre volonté et ses décisions dans des ensembles plus vastes — lois de la nature,séries causales, automatismes physiques ou psychiques.

Dès qu'elle n'est plus considérée comme un monde à part,souverain et autonome, notre volonté voit son indépendance et son pouvoir illimité remis en cause.

Le problèmecapital qui reste à résoudre, si l'on admet cette critique du libre arbitre, se situe dans le domaine de l'action moraleet de la responsabilité éthique.En effet, si le libre arbitre n'existe pas et si toute décision se trouve entièrement soumise à un enchaînement decauses qui agissent sur notre volonté, comment tenir qui que ce soit pour responsable? Comment porter unjugement moral sur les actes de qui que ce soit? Le problème est posé par Kant, qui affirme que, même si les actesd'un homme étaient entièrement explicables, il faudrait malgré tout le considérer comme autonome sur le plan de lavolonté.. »

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