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Le droit fait-il la communauté ?

Publié le 27/02/2008

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droit

Le droit fait-il la communauté ?

 

Si l'on entend par communauté le fait, pour un groupe social, de vivre ensemble, il apparaît d'abord que l'idée que ce soit le droit qui fasse la communauté relève du paradoxe, car à proprement parler le droit et l'œuvre de la communauté, a fortiori si l'on spécifie celle-ci comme communauté politique, organisée en institutions. Le paradoxe ne semble pas davantage se résoudre si l'on distingue dans le droit l'idée de conformité à une règle (avoir droit à), et celle d'autorisation (avoir le droit de) : dans l'un et l'autre cas il semble en première approche que la communauté fixe la règle et déclare ce qui est permis ou interdit. En même temps, l'idée de conformité peut conduire à une uniformité des actions, et donc en un sens produire de la communauté au sens où les individus ont des comportements qui obéissent à des règles communes. De même, le droit comme permission fait que les individus partagent en commun ce qu'ils ont le droit d'avoir ou de faire, le droit apparaît alors comme un bien commun, et peut aussi en ce sens être facteur de communauté.

                Mais il semble que par ces aspects on ne dise rien de plus que le simple fait pour certains droits d'être caractéristiques d'une communauté, or la question incite à rechercher, ce qui, dans le droit, peut être considéré comme facteur de communauté. La question doit donc tenir compte avant tout du domaine des droits envisagés : le droit positif public (qui régit les rapports des particuliers à l'État) semble être davantage facteur de communauté que le droit positif privé (qui régit le rapport des individus entre eux), le droit constitutionnel davantage que le droit pénal. Mais cette première intuition nous masque peut-être du même coup la possibilité pour le droit en général, et donc en vertu de qualités essentielles quel que soit tel ou tel droit particulier envisagé, d'être un élément constitutif de la communauté.

                Il semble que la difficulté à penser le droit comme essentiellement constitutif de la communauté tienne en partie au moins à la manière dont libéralisme et communautarisme ont conçu les rapports du droit à la communauté. Le libéralisme, du moins tel qu'on le conçoit généralement, pense le droit pour défendre l'individu contre la communauté, en récusant l'idée de valeurs communes, il ne considère la communauté que par référence à un ordre politique. Le communautarisme tel qu'il se formule généralement au sein des controverses post-rawlsiennes pose comme facteurs de communauté l'histoire et la société, en tant qu'elle produisent des valeurs communes au sein d'un groupe déterminé. Penser le droit comme facteur de communauté suppose donc d'abord de dépasser cette opposition schématique et partir des prémisses suivantes : le droit peut être considéré comme un moyen et non simplement comme une fin, la communauté est quelque chose de produit et non simplement donné. Il faut donc se demander dans quelle mesure ces prémisses sont fondées et avec quelle signification on peut en tirer la conclusion que le droit fait la communauté.

 

  • Le droit comme forme de la communauté
  •  La constitution comme droit qui définit l'identité de la communauté politique
  • Le droit comme acte de naissance de la communauté
  •  Le droit comme fondement d'une communauté particulière, la communauté démocratique

 

droit

« constitution même de la cité, ou dans les lois qui régissent les rapports des citoyens entre eux ? Le droit comme acte de naissance de la communauté II.

Cette tension invite à poser la distinction entre un droit naturel et un droit positif, le premier désignantalors le droit non écrit déductible de la nature des hommes indépendamment de toute convention et de toutelégislation.

La question de savoir si le droit fait la communauté est donc difficile d'abord parce qu'elle masque uneasymétrie fondamentale : seul le droit positif a un rapport avec la communauté, alors que le droit naturel n'en aaucun.

Il faut donc considérer que si le droit fait la communauté politique, ce ne peut être que du droit positif qu'ils'agit, et en plus, à la stricte condition que l'existence exclut la permanence du droit naturel.

Le droit comme telcorrespond d'abord non à un ensemble de règle mais comme un acte fondateur, celui qui donne naissance à lacommunauté politique.

C'est en ce sens que Rousseau conçoit le pacte social : « Ces clauses bien entendues seréduisent toutes à une seule, savoir l'aliénation totale de chaque associé avec tous ses droits à toute lacommunauté » ( Contrat social , I, 6).

Le droit apparaît donc au moment où les droits sont abandonnés, c'est l'abandon de ces droits multiples qui font qu'on peut parler du droit comme tel, et c'est ce passage au singulier quitraduit la puissance unificatrice du droit.

Cette puissance apparaît dans le fait que c'est le pacte social, en tant que moment d'apparition du droitcomme tel, qui permet de répondre à la question de savoir quel est « l'acte par lequel un peuple est une peuple » (I,5).

C'est la présence du pacte social qui fait la différence entre la simple agrégation d'un maître et de ses esclaveset l'association en un corps politique.

Si le droit a une telle puissance d'unification au point de constituer un peuple,c'est qu'il constitue la caractéristique d'un état de l'humanité, l'état civil qui se caractérise précisément parl'existence de communautés.

Ce qui le distingue de l'état de nature, c'est une différence dans la source de l'action.Les droits naturels jouent quand les actes ne sont que ceux de volontés individuelles, à l'inverse, le droit apparaîtquand les actes sont ceux d'une volonté générale.

La confirmation d'une telle puissance s'éprouve de deux manières : 1) Un individu peut désobéir, sortir du cadre fixé par le droit.

Par cet acte, il sort du même coup du corps social, il s'y oppose, et en devient un ennemi : « il cesse d'en être un membre en violant ses lois, et même illui fait la guerre » (II, 5). 2) Le Gouvernement peut aller contre la Souveraineté, en usurpant le pouvoir, alors le pacte social est rompu (III, 10-11). Ce qu'on voit dans les deux cas c'est que la remise en cause du pacte social met en jeu l'existence même du corpspolitique dans son intégrité.

Cela ne se comprend que si le droit défini par le pacte a essentiellement une puissanceunificatrice dont dépend la communauté.

Transition : on voit avec Rousseau comment le droit recèle en lui-même une puissance unificatrice, mais du même coup on peut se demander si le prix à payer pour obtenir une telle puissance constitutive n'est pas trop lourde àpayer pour les individus.

Cela incite à repenser la relation entre individu et communauté qui se joue dans le droit, etnotamment la relation d'obligation.

Le droit comme fondement d'une communauté particulière, la communauté démocratique III.

Pour cela, il faut approfondir l'idée que le droit définit le mode de composition des individus entre euxdans la communauté.

Il faut, qu'un un certain sens, une telle caractéristique du droit s'applique aussi bien au droitcivil qu'au droit naturel.

On peut trouver cette articulation dans le Traité théologico-politique de Spinoza.

Le chapitre 16 en particulier montre que l'homme en entrant dans l'état civil, ne sort pas en même temps de la loi de lanature qui continue à déterminer la conduite des hommes en tant que ceux-ci restent des êtres naturels.

Il fautd'abord comprendre que cette articulation repose sur l'idée qu'il n'y a de réalité qu'individuelle, mais, qu'en mêmetemps, une communauté est d'autant plus parfaite que l'autorité y est absolue.

Spinoza est donc décisif pour penser le droit comme facteur de communauté, déjà parce qu'il associe une ontologiede l'individu à une valorisation de la communauté.

Cette association passe par une redéfinition de ce qu'est un droit.Le droit n'est pas autre chose que la liberté ou puissance d'être cause de sesactes, et ce qui définit un individu, c'est précisément l'unité productriced'effets déterminés, donc l'unité d'une puissance.

Le droit d'un individu estdonc la puissance qui est la sienne de se déterminer par soi-même à agir.

Or,cette puissance s'accroit par la conformité à la raison et c'est par cetteconformité que se produit un accord entre les puissances individuelles, accordconsubstantiel à la communauté.

Du même coup, le droit de nature qui consiste pour un être àrechercher tout ce qui lui permet de persévérer dans son être n'est pas abolipar l'institution d'un droit civil : « Nul en effet ne pourra jamais, quel abandonqu'il ait fait à un autre de sa puissance et conséquemment de son droit,cesser d'être homme ; et il n'y aura jamais de souverain qui puisse toutexécuter comme il voudra » (chapitre 17).

Ainsi le droit joue un rôle moteurdans la composition de la communauté parce qu'il tend de lui-même àreconnaître l'utilité de la médiation du souverain.

C'est pourquoi le droit civilpeut se définir, comme le droit naturel, par « la liberté qu'a l'individu de seconserver dans son état » avec la restriction nouvelle « telle qu'elle estdéterminée par les édits du pouvoir souverain et maintenue par sa seule autorité » (chapitre 16).

Ainsi le droit civil. »

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