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Le progrés met-il l'homme en danger ?

Publié le 27/03/2009

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Ce sujet est bipolaire : il présente la juxtaposition ou l'opposition de deux termes antinomiques. Le mot « progrès « évoque une idée d'amélioration, d'évolution vers un mieux-être, de mouvement en avant, vers une meilleure vie. Le mot s'emploie parfois avec une majuscule pour désigner l'évolution de l'humanité ou de la civilisation vers un terme idéal. Ce mot est contrebalancé par l'idée de « danger «, c'est-à-dire de menace, voire de mort. Le danger du progrès fait écho à une autre expression, celle-là usuelle, « en danger de mort «. Le libellé du sujet est donc paradoxal. Un terme qui, dans le langage courant, a une connotation habituellement positive, prend soudain une valeur totalement négative. L'aspect provocateur de la question posée renvoie à la problématique même du sujet : paradoxalement, c'est-à-dire contre toute attente, le progrès, qui aurait dû entraîner une amélioration des conditions de vie sur notre planète, pourrait avoir des effets pervers, voire mortels. Le progrès pourrait ne pas être qu'un bien : il pourrait également être un mal, et même un mal funeste pour l'humanité. Après cette réflexion théorique, il convient d'effectuer un bref rappel historique.

Dès le xviiie siècle, qui est resté dans l'histoire sous le nom de « Siècle des Lumières «, est apparue et s'est développée la notion de progrès en tant que fondement d'une nouvelle idéologie. Les découvertes scientifiques, l'essor des sciences et le développement rapide de leurs applications technologiques vont confirmer cette idée selon laquelle l'humanité doit inexorablement évoluer vers un avenir aux conditions de vie sans cesse améliorées. Le mythe d'un progrès continu va croître encore davantage au XIXe siècle, malgré les crises sociales.

« plus grave, c'est qu'elle met aussi en péril les valeurs morales de notre civilisation.Le progrès technique a aliéné l'homme dans son travail, déstabilisé les familles et dégradé les conditions de vie.Le progrès a provoqué l'aliénation de l'homme dans son travail.

Certes, nul ne conteste que l'amélioration destechniques ait libéré la majorité des travailleurs des tâches physiques les plus pénibles.

Mais cette mêmeamélioration des techniques a enfermé l'homme dans un travail répétitif, dépersonnalisé, sans responsabilité.Le film de Charles Chaplin « Les Temps Modernes » (Modem Times, 1935) rend bien compte de cettedéshumanisation d'un travail monotone, répétitif, parcellisé.

C'est « Le Travail en miettes » (titre d'un ouvrage dusociologue français Georges Friedmann en 1956).Le travail à la chaîne, imposé par les principes de taylorisation, n'a pas permis l'épanouissement de l'individu dans saprofession.

Loin des centres de décision, privé de la satisfaction de voir les résultats concrets de son labeur,l'individu se sent isolé.L'imposition des « trois 8 » dans l'entreprise, afin de rentabiliser au maximum les machines nées du progrèstechnique, a fragilisé le travailleur.Les contraintes horaires sont souvent à l'origine des perturbations psychologiques et des intenses fatiguesconstatées chez les ouvriers.Alors que l'outil devait libérer l'homme, c'est l'homme qui s'est trouvé asservi à la machine.

Même si la classeouvrière a échappé à la misère du XIXe siècle, de graves problèmes ont subsisté au XXe.

Il faut citer ici, de GeorgesFriedmann, « Problèmes humains du machinisme industriel » et « Où va le travail humain ? ».L'homme a dû se mettre au service de la machine vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

Même si la situation aheureusement changé dans les sociétés occidentales industrialisées, beaucoup de secteurs restent caractérisés par la pénibilité des horaires, des contraintes sociales (services de permanences) ou technologiques (servicesinformatiques) se substituant aux anciennes contraintes industrielles.Ces horaires hors des normes ont également déstabilisé les familles, la cellule familiale ne pouvant alors querarement se retrouver au complet.

Cette dislocation du lien familial s'est trouvée accrue et aggravée, partout dansle monde maintenant, par la structure même de la ville.La concentration industrielle et les phénomènes d'urbanisation ont eu pour conséquence un cloisonnement de laville, et souvent sa paupérisation (les bidonvilles).Les lieux d'habitation sont, dans une très forte proportion, éloignés des centres de production et des lieux detravail.

Les temps de transport s'en trouvent allongés (souvent plus de deux heures, parfois trois ou quatre heurespar jour).

Le temps de loisir quotidien est donc diminué, les possibilités de vie familiale et de relations de voisinagesont réduites.Seules des nations privilégiées, comme la France, peuvent maintenant envisager la semaine de 35 heures.

Dansbeaucoup de pays du Tiers Monde, les horaires de travail restent très élevés, pour des salaires dérisoires, avec enoutre ce scandale que constitue le travail des enfants.Ainsi le progrès technologique n'a pas toujours, et pas suffisamment, permis une amélioration des conditions de viede l'homme.Le progrès technique fait, au contraire, trop souvent peser un risque sur l'équilibre psychologique de l'homme, et ilmet en danger la cellule familiale.

De ce point de vue, il a même créé de nouveaux dangers (cf.

l'emprise excessivede la télévision).La civilisation industrielle a engendré un certain « mal de vivre » qui souvent s'aggrave.Le tableau en est souvent très sombre : plus encore que l'absentéisme au travail, il faut citer la délinquance et laconsommation, en hausse constante dans le monde, de l'alcool, du tabac, des neuroleptiques et des drogues.

Cettefuite hors du temps que constitue l'usage de toutes ces drogues, licites ou illicites, résulte de la dégradation de nosmodes de vie. Ainsi le progrès technique a non seulement fragilisé l'homme par la déstabilisation qu'il a entraînée dans le travail etdans les relations familiales, mais encore il risque de menacer la cohésion de la société tout entière.En effet, le progrès des sciences expose à une disparition des points de repère de l'homme.Divers faits scientifiques sont assez inquiétants de ce point de vue.L'homme était, jusqu'à présent, une valeur inaliénable.

Or, les nouvelles possibilités de transplantation risquent de letransformer en valeur marchande.

Déjà, la presse s'est fait l'écho de trafics d'organes au niveau international,notamment en Asie.

Des paysans, poussés par la misère, ont accepté de vendre un de leurs reins.

La Chine estsoupçonnée d'organiser, plus ou moins officiellement, le trafic d'organes de condamnés à mort.Les liens de sang, les liens de parenté, constituaient jusqu'alors un des principaux fondements de notre société.

Orl'insémination artificielle et la multiplication des « mères porteuses » remettent en cause cette structure.

Il peutdésormais exister plusieurs mères : la mère porteuse, génitrice, et la mère adoptive, qui obtient reconnaissancejuridique.

Il faudrait aussi satisfaire les revendications de certaines associations homosexuelles.

Mais on assiste alorsà une dilution de certaines notions fondamentales, la paternité, la maternité, ce qui, à terme, peut mettre en péril lacohésion sociale.Les manipulations génétiques ne sont pas sans danger pour l'avenir de l'humanité.

Destinées à l'origine à prévenir lesmaladies héréditaires, ces manipulations peuvent être détournées de leurs objectifs premiers et être mises auservice d'idéologies racistes.

Ou encore simplement elles pourraient être utilisées pour convenances personnelles,voire pour satisfaire des caprices de parents : outre le choix d'un sexe précis pour l'enfant à naître, pourquoi ne pasaller jusqu'à choisir la couleur de ses yeux ou de ses cheveux ? L'enfant cessera alors d'être une valeur en soi : il nesera apprécié que si ses caractéristiques physiques correspondent à l'attente de ses futurs parents.Le progrès social est, lui aussi, directement ou par effet pervers, à l'origine de la perte de certaines valeursessentielles à une société.Les économistes et les politiques discutent beaucoup des effets pervers de l'aide aux chômeurs.

Si celle-ci devienttrop substantielle par rapport au salaire minimum, elle favorise la fuite devant le travail et multiplie les assistés.. »

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