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L'existentialisme est un humanisme, © Éditions Gallimard, p. 29-30.

Publié le 23/03/2015

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humanisme

L'existentialisme athée, que je représente, est plus cohérent. Il déclare que si Dieu n'existe pas, il y a au moins un être chez qui l'existence précède l'essence, un être qui existe avant de pouvoir être défini par aucun concept et que cet être, c'est l'homme ou, comme dit Heidegger, la réalité-humaine. Qu'est-ce que signifie ici que l'existence précède l'essence ? Cela signifie que l'homme existe d'abord, se rencontre, surgit dans le monde, et qu'il se définit après. L'homme, tel que le conçoit l'existentialiste, s'il n'est pas définissable, c'est qu'il n'est d'abord rien. Il ne sera qu'ensuite, et il sera tel qu'il se sera fait. Ainsi, il n'y a pas de nature humaine, puisqu'il n'y a pas de Dieu pour la concevoir. L'homme est non seulement tel qu'il se conçoit, mais tel qu'il se veut, et comme il se conçoit après l'existence, comme il se veut après cet élan vers l'existence, l'homme n'est rien d'autre que ce qu'il se fait. Tel est le premier principe de l'existentialisme. C'est aussi ce qu'on appelle la subjectivité, et que l'on nous reproche sous ce nom même. Mais que voulons-nous dire par là, sinon que l'homme a une plus grande dignité que la pierre ou que la table ? Car nous voulons dire que l'homme existe d'abord, c'est-à-dire que l'homme est d'abord ce qui se jette vers un avenir, et ce qui est conscient de se projeter dans l'avenir. L'homme est d'abord un projet qui se vit subjectivement, au lieu d'être une mousse, une pourriture ou un chou-fleur ; rien n'existe préalablement à ce projet ; rien n'est au ciel intelligible, et l'homme sera d'abord ce qu'il aura projeté d'être.

L'existentialisme est un humanisme, © Éditions Gallimard, p. 29-30.

 

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« Textes commentés 41 Dans ce texte, Sartre souligne à quel point l'existentialisme athée l'emporte en cohérence sur la tendance chrétienne de ce qu'il faut bien appeler une « doctrine » (p.

26).

Car si les deux courants partent du même postulat, selon lequel « l'existence précède l'essence », seul l'existentialisme athée qui affirme que «Dieu n'existe pas» est à même 1 de trouver un être pour lequel l'existence précédera effectivement ! l'essence, c'est-à-dire l'homme.

L'essence, rappelons-le, est l'ensemble des «qualités qui permettent de[ ...

] produire et de définir [un être] »(p.

27): il suffit en effet de connaître les qualités qui caractérisent un être pour le fabriquer ou pour le faire passer à l'existence.

Dans ce cas, on possède une représentation technique du monde, où l'idée précède la réalisation, c'est-à-dire l'incarnation singulière de l'idée : l'essence précède alors l'existence.

Or, c'est bien ce qu'implique l'idée même de création divine, 1 que maintiennent les existentialistes chrétiens : Dieu possède dans son 1 intellect le concept d'homme ; puis sa volonté le promeut à l'existence, en choisissant le réel parmi les possibles (cf.

Leibniz).

À l'inverse, pour l'existentialisme athée, l'homme ou la « réalité­ humame »(traduction française du terme Dasein chez Heidegger), existe d'abord, c'est-à-dire qu'il « est là », qu'il surgit de manière purement contingente dans le monde, et il est défini ensuite seulement par un concept.

Bref, on ne le déduit pas d'une Idée préexistante, mais il n'est , d'abord « rien » et c'est uniquement par ce qu'il fait, par son action, qu'il 1 se définit : la notion de « nature humaine », de concept universel (exemple : l'homme comme animal raisonnable) que l'on retrouverait chez tous les hommes particuliers, est ainsi ruinée par l'existentialisme athée, car il n'existe pour lui aucun Dieu qui pourrait former l'idée d'homme pour en tirer par une opération logique ou technique l'existence concrète d'un individu.

Si l'homme n'est pas créé, c'est lui qui se crée par son activité subjective.

C'est là ce que l'on pourrait appeler le «subjectivisme » de l'existentialisme, celui même que les critiques marxistes reprochent à Sartre.

Pourtant, celui-ci n'est qu'une conséquence du fait que chez l'homme, l'existence précède l'essence : en effet, si l'homme existe d'abord pour se définir ensuite, cela signifie qu'il vit sa situation et ses projets au lieu de les subir, comme la mousse ou le chou­ fleur, qui se développent conformément à des lois qu'ils n'ont pas choisies (les lois de la nature); il est conscient de ce qu'il fait, par opposition à ce qui est en soi.

L'existence est donc subjective, elle est celle d'un sujet.. »

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