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«L'histoire humaine peut bien dans ses passions, dans ses préjugés, dans tout ce qui relève de ses impulsions immédiates être un éternel recommencement, mais il y a des pensées qui ne recommencent pas, ce sont les pensées qui ont été rectifiées, élargies, complétées». (Bachelard). Appréciez.

Publié le 04/04/2009

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histoire

 

«La colère d'Achille, illustre entre toutes et depuis trois mille ans célébrée, enferme toutes les colères. Toutes les passions comparaissent en cette scène sublime où la tente du héros étant entr'ouverte on le voit qui se dompte lui-même par le chant et la cithare, gagnant une heure après l'autre sur la colère infatigable«. Ainsi parle Alain, constatant que l'homme est en proie, toujours, aux mêmes passions, et que le cœur humain n'a point changé depuis Homère. Mais cette constatation ne va pas, chez la plupart, sans quelque mouvement d'humeur. Nous nous voudrions différents de ceux qui nous ont précédés, et quand nous disons différents, nous entendons supérieurs. La constance de la nature humaine dans la faiblesse nous choque et il est fâcheux que l'adjectif « humain « désigne toujours cette impuissance de l'homme à être maître de soi. Nous nous sommes rendus maîtres de la nature et nous régnons sur les animaux ; la science et la technique, chaque jour, modifient le monde sous nos yeux, et nous serions pourtant semblables à ces sauvages qui se battaient pour Hélène sous les murs de Troie? Du moins sommes-nous délivrés de leurs erreurs et si nous subissons les mêmes passions, nous formons d'autres pensées: «l'histoire humaine peut bien dans ses passions, dans ses préjugés, dans tout ce qui relève de ses impulsions immédiates être un éternel recommencement, mais il y a des pensées qui ne recommencent pas, ce sont les pensées qui ont été rectifiées, élargies, complétées«. Nous essaierons d'abord de préciser le sens de cette thèse.

 

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« jamais tout à fait à la nature des choses: «Le rapport de l'idée au fait, disait Alain, est en ceci que l'idée ne suffitjamais».

Du moins nous approchons-nous sans cesse de la vérité, saisissant la nature à travers un réseau d'idéesqui est à la fois de plus en plus souple et de plus en plus serré. - C - Nature et esprit : les âges de l'intelligence. Ainsi le progrès humain ne se situe pas au niveau des passions et des actes mais au niveau des connaissances.

Lanotion même de «découverte» implique l'idée d'un progrès scientifique.

Les savants, écartant l'un après l'autre lesvoiles que tisse l'imagination, nous découvrent peu à peu l'univers tel qu'il est.

Il est bien remarquable, d'ailleurs, quel'idée même de Progrès ait conquis les esprits à l'époque des succès les plus apparents de la science.

C'est en tantque savants que Pascal trouvait les anciens plus «jeunes» que nous.

Le Tableau historique des progrès de l'esprithumain, de Condorcet, est du XVIIIe siècle, qui est le siècle de Newton.

Et c'est après les bouleversements que, parl'intermédiaire de la technique, la science introduisait dans le monde, que les «temps futurs» devinrent «visionsublime» et que l'humanité eut le sentiment d'être embarquée sur le «vaisseau splendide du progrès».

«Rapide etfier, il va, le beau navire ...» Si pourtant nous constatons que le cœur de l'homme n'a point changé, il nous fautcomprendre le progrès de l'esprit humain.

Et cela nous oblige à distinguer en l'homme la nature et l'esprit.

C'est dansla mesure où l'homme est un être de nature que l'on peut parler d'une nature humaine.

Les instincts, les passions,les préjugés relèvent de cette nature et c'est pourquoi ils sont éternels.

Mais l'esprit est ce qui refuse la nature etla domine.

«Par l'espace, disait Pascal, l'univers me comprend et m'engloutit comme un point ; par la pensée, je lecomprends ».

Dans la première moitié du XXe siècle, les travaux de la psychologie de l'enfance, de la sociologie etde la philosophie des sciences ont permis de préciser la notion d'un progrès de la raison.

La mentalité de l'enfantn'est pas celle de l'adulte, ni la mentalité du primitif celle du civilisé.

Les principes rationnels, que Kant croyaituniversels et nécessaires, on ne les retrouve ni chez l'enfant ni chez le primitif.

Mieux, on ne les retrouve même plusdans l'esprit scientifique de notre époque.

Ceux qui ont réfléchi sur l'évolution des sciences admettent, avecBrunschvicg, que la raison est «plastique» et qu'il y a des «âges de l'intelligence».

Des primitifs à Pythagore et àPlaton, de Platon à Descartes, de Descartes à Kant, de Kant à Brunschvicg, la raison évolue et cette évolution estun progrès.

«Le monde, écrit Brunschvicg, aurait été sauvé plus d'une fois si la qualité des âmes pouvait dispenserde la qualité des idées».

Et peut-être la qualité des âmes reste-telle la même; du moins y a-t-il progrès en ce quiconcerne la qualité des idées. II.

DISCUSSION - A - Comment comprendre l'évolution des idées. Il y a quelque chose de séduisant dans cette idée des âges de l'intelligence.

Non seulement il est flatteur pour notreamour-propre de penser que l'humanité atteint enfin à travers nous son âge mûr, mais surtout l'hypothèse a cemérite incontestable de rendre compte de l'évolution des sciences et de l'esprit scientifique.

S'il existe en effet un«nouvel esprit scientifique» comme l'affirme M.

Bachelard, n'est-il pas naturel de l'attribuer à une forme nouvelled'intelligence? L'hypothèse, toutefois, reste une hypothèse et il est d'autant plus nécessaire de la soumettre à unexamen critique qu'elle est plus séduisante.C'est un fait que la science nous fait de mieux en mieux connaître l'univers.

On ne saurait nier ses progrès.

Mais laconstatation de ce fait ne présente qu'un médiocre intérêt aux yeux du philosophe, s'il n'en dégage la signification.Le progrès de la science ne peut-il signifier autre chose qu'un progrès de l'intelligence, voilà notre problème.

End'autres termes, il s'agit de savoir si l'on ne pourrait pas interpréter l'évolution des connaissances humaines sanssupposer une évolution de l'esprit humain.

C'est qu'il est permis de ne pas confondre l'esprit avec l'ensemble de sesconnaissances.

L'esprit n'est pas une somme, mais une source.

Et la quantité d'eau que la source débite ne changerien à sa nature de source.

De même ne peut-on supposer que l'accumulation et l'évolution des connaissances quel'esprit engendre ne changent rien à sa nature d'esprit? On peut concevoir qu'un même esprit ait engendré laphysique aristotélicienne, la physique cartésienne et la physique contemporaine.

Il ne faut pas oublier en effet que,selon la profonde remarque de Comte, la société humaine se caractérise par la solidarité dans le temps, c'est-à-direpar la transmission de génération en génération des acquisitions humaines.

L'Humanité «se compose beaucoup plusde morts que de vivants » et cela signifie que ni Aristote ni Descartes ne sont totalement étrangers à l'élaborationde la physique contemporaine.

Les concepts scientifiques sont des acquisitions humaines, des outils à saisir lemonde, que chaque penseur reçoit et cherche à perfectionner.

Quoi d'étonnant si nos outils sont meilleurs que ceuxde Descartes? Les concepts scientifiques que Descartes avait élaborés, nous les avons rectifiés, complétés, élargis,comme il l'eût fait lui-même, sans doute, s'il eût été immortel.

Cela signifie-t-il que nous soyons plus intelligents queDescartes? S'il est vrai de dire, avec Pascal, que «toute la suite des hommes, pendant le cours de tant de siècles,doit être considérée comme un même homme qui subsiste toujours et qui apprend continuellement», nous pouvonscomprendre le progrès de nos connaissances sans supposer un progrès de l'esprit. - B - L'intelligence est sans âge. Il y a d'ailleurs bien de l'ambiguïté dans cette idée d'un progrès de l'esprit.

Que les choses changent, que les corpsfleurissent et mûrissent, nous pouvons le comprendre.

Mais l'esprit?' Naissance, maturation, changement sont destermes qui n'ont de sens que dans le temps, c'est-à-dire pour un esprit.

Le temps est dans l'esprit ou pour l'esprit,mais l'esprit n'est point dans le temps.

S'il perçoit le changement des choses et des idées en tant qu'elles sonttraitées comme des choses, n'est-ce pas parce que lui-même ne change pas ? Certes, il est facile de distingueravec Brunschvicg une «norme» et un «substrat», ou avec M.

Lalande une «raison constituante» et une «raisonconstituée»: le changement et le progrès ne concerneraient que cet ensemble de principes que, dans son élan vers. »

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