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L'homme doit-il se contenter de se rendre digne du bonheur ?

Publié le 15/06/2009

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Introduction. — A peu d'exceptions près, les philosophes n'admettent pas la valeur morale du plaisir ; ce mot, en effet, désigne presque exclusivement les satisfactions d'ordre sensible, dont ne saurait se contenter un être doué de raison. Leur jugement est tout autre quand il s'agit du bonheur, du moins si l'on entend par là un contentement de l'homme en tant que tel, c'est-à-dire en tant qu'être capable de connaître et de vouloir le bien. Telle ne semble pas cependant être la pensée de Kant, qui écrit dans la « Critique de la raison pratique »: « La morale n'est pas à proprement parler la doctrine qui nous enseigne comment nous devons nous rendre heureux, mais comment nous devons nous rendre dignes du bonheur. » Tâchons de bien comprendre la pensée de Kant ; nous nous demanderons ensuite si nous devons l'admettre sans restriction.

« penser de cette conception morale ? A.

On ne saurait trop approuver Kant dans son opposition aux morales de l'intérêt personnel.

Si noble que soit cetintérêt, tant qu'on reste enfermé en soi-même, on ne s'élève pas au niveau de la moralité ; on agit en homme avisé,non en homme de devoir ou en homme de bien.

Il n'y a de conduite moralement bonne que celle qui nous porte versquelque chose qui nous dépasse.Une morale bien comprise ne nous fige pas dans la considération d'un bonheur à atteindre ; elle nous propose unidéal à réaliser. B.

Mais — et sur ce point nous nous séparons de Kant —cet idéal est fait de biens et de valeurs à réaliser et non dedevoirs à accomplir ou de lois à observer.

La morale kantienne, en effet, nous paraît inacceptable en tant qu'elle faitdu devoir et de la loi morale un absolu.

L'absolu est le bien ou la valeur.

Ce n'est pas son obligation qui fait la bontémorale d'un acte ; au contraire, c'est sa bonté morale qui le rend obligatoire.Aussi, sans rejeter la notion d'obligation, nous ne la mettons pas au premier plan et lui substituerons celle de bien oude valeur.

Nous ne dirons donc pas : la morale nous enseigne comment nous « devons » nous rendre soit heureux,soit dignes du bonheur, mais : elle nous montre l'idéal grâce auquel nous parviendrons au bonheur ou au degré dedignité qui nous méritera ce bonheur. C.

Par le fait même, il n'y a plus d'opposition entre la vertu et le bonheur.

Si on ne peut obéir à la loi par pur amourde la loi sans réprimer ses tendances naturelles et, par suite, sans renoncer à quelque chose de son bonheur, c'esttout naturellement, au contraire, que nous nous portons vers le bien et les valeurs ; quand on se place à ce pointde vue, vertu et bonheur coïncident.Qu'on ne dise pas que nous retombons dans une morale de l'intérêt.

Dans la recherche du bien, ce n'est pas vers soique l'homme est orienté, mais vers plus haut que soi ; ce n'est pas le bonheur qu'il cherche, mais le bien sous sesdiverses formes : ordre, justice, vérité, etc.

Le bonheur, d'ailleurs, n'arrive jamais que par surcroît, et celui qui seconcentrerait à sa recherche le manquerait certainement.

C'est la création des valeurs, la promotion du bien, quinous valent les meilleures joies de la vie. Conclusion. — Le tort principal de Kant a peut-être été d'admettre les présupposés psychologiques de ses adversaires les épicuriens.

Pour lui comme pour eux, l'homme ne cherche que son plaisir ; ses tendances naturellessont toutes égoïstes.

Avec de tels présupposés, prétendre l'amener à agir moralement est une gageure ; aussi doit-il reconnaître que, depuis que le monde existe, il n'a peut-être pas été accompli un seul acte vraiment moral.Or, l'observation vulgaire nous le montre, nous cherchons bien moins le plaisir personnel que la réalisation d'uneœuvre ; nous aimons l'ordre pour lui-même et non pas seulement pour les avantages que nous comptons en retirer.Nous sommes axés sur le bien, et non sur le bonheur.

Dès lors, l'alternative que nous avions à discuter repose ensomme sur une « ignoratio elenchi ».. »

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