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« L'homme n'est pas un empire dans un empire. » (Spinoza.)

Publié le 12/07/2004

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spinoza

 « L'homme n'est pas un empire dans un empire « (III, préface) La proposition qui vise le statut de l'homme a pour toile de fond une critique de la nature conçue comme un empire que Dieu régirait en maître. Les deux illusions sont conjointes : il s'agit de rectifier et la pensée de Dieu et celle de la personne humaine. Dieu n'est pas une personne, et l'homme ne se gouverne pas non plus selon les décrets d'une volonté libre de toute détermination. Si l'homme n'est pas un « empire «, c'est qu'il est une chose singulière finie, capable de produire des effets mais déterminé à son tour par ce qui l'environne ; il n'est donc pas intelligible par lui-même, détaché du tout naturel dans lequel il se trouve immergé. Enfin, c'est la théorie du libre arbitre que Spinoza récuse, aussi bien chez les moralistes que dans sa tournure cartésienne : elle suppose la croyance en une maîtrise possible et souhaitable des passions et au-delà, une discipline du sensible par la volonté. L'Éthique III cherchera au contraire à montrer la nécessité des affects en dévoilant leurs mécanismes.

 

 

 

spinoza

« Ces moralistes ont donc une conception erronée de la liberté.

Parlant des passions, ils « semblent traiter non dechoses naturelles qui suivent les lois communes de la nature, mais de choses qui sont hors de la nature [...] Ilscroient en effet que l'homme [...] a sur ses actions un pouvoir absolu.

» La religion et la tradition philosophique fontde l'homme une exception dans la nature en affirmant que sa volonté est libre, qu'il peut décider en toute autonomiede ses actes.

Cette exception ne se justifie pas : c'est une illusion.

Et cette illusion nous amène à détester l'hommeau lieu de le comprendre, voire de l'aider.On comprend alors le programme de Spinoza : « Ne pas rire, ne pas pleurer, ne pas louer, ne pas blâmer, maiscomprendre.

»Pour Spinoza, l'homme ne naît pas libre, mais il peut le devenir.

C'est la compréhension qui libère.

Pour donner unexemple anachronique et caricatural, les moralistes seraient des hommes se lamentant parce que les hommes nesavent pas voler, et qui attribueraient cette incapacité à une nature vicieuse : l'attitude d'un spinoziste consisteraità chercher la loi de la pesanteur et à inventer l'avion.Si Spinoza s'oppose à la morale, il ne faut pas oublier que son ouvrage essentiel s'intitule L'Éthique.

Il ne s'agit pasde tout justifier, ni de se désintéresser de toutes règles d'action, de toute vie en commun, de tout jugement.Mais la morale à laquelle s'oppose Spinoza découle, on l'a vu, d'une méconnaissance de l'homme et de ses actionsd'une part, et d'autre part des jugements de valeur allant parfois jusqu'au mépris de l'homme, du pécheur, dupassionné.

La morale ne m'explique ni ce dont je souffre, ni les causes de ma «maladie ».

Par contre, elle mecondamne, et m'impose des normes.

Voilà où est le Bien, voilà où est le Mal.

Impuissante à expliquer, la moraleréussit merveilleusement bien à culpabiliser l'être humain : elle impose des normestranscendantes : Bien et Mal, ne dit pas comment les suivre, et condamne l'homme qui y déroge.L'éthique spinoziste consiste à substituer la compréhension des phénomènes aux jugements et aux condamnations.Il ne s'agit plus d'imposer des normes, mais de permettre à l'homme « d'accroître sa puissance d'agir et de penser »en lui expliquant ce qui lui est utile ou nuisible.

Pour reprendre un mot de Nietzsche, il s'agit « d'être au-delà du bienet du mal et non pas au-delà du bon et du mauvais ».

Pour Spinoza, considérer « l'homme dans la nature comme un empire dans un empire » est une absurdité.

Au lieude croire que l'homme est immédiatement libre, il faut comprendre comment le libérer.

Croire que l'homme aimmédiatement un pouvoir absolu sur ses actions, qu'il est une exception dans la nature (où tout est soumis à deslois) parce qu'il aurait une volonté libre, c'est se condamner à le méconnaître et à le mépriser.

Comprendre quel'homme est une partie de la nature comme une autre, c'est-à-dire que toutes ses actions, même celles qu'il croitvolontaires, s'expliquent par des causes, c'est se donner les moyens de le conduire vers la liberté, vers la plusgrande puissance possible de penser et d'action, vers l'épanouissement.Le programme de Spinoza est étonnamment moderne.

Par son refus de la morale, il s'apparente à Nietzsche.

Par sonsouci de donner à l'homme une maîtrise de lui-même qu'il n'a pas de prime abord, il s'apparente à Freud.

Spinozanous a appris à dissocier la morale de la recherche du bien individuel et collectif.

Il est légitime que sa devise : « Nepas rire, ne pas pleurer, ne pas louer, ne pas blâmer, mais comprendre » soit devenue si célèbre : elle sonne commela première étape de notre libération.. »

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