Devoir de Philosophie

MAURICE MERLEAU-PONTY: La parole

Publié le 31/01/2011

Extrait du document

merleau

Il est vrai que la communication présuppose un système de correspondances tel que celui qui est donné par le dictionnaire, mais elle va au-delà, et c'est la phrase qui donne son sens à chaque mot ; c'est pour avoir été employé dans différents contextes que le mot peu à peu se charge d'un sens qu'il n'est pas possible de fixer absolument. Une parole importante, un bon livre imposent leur sens. C'est donc d'une certaine manière qu'ils le portent en eux. Et quant au sujet qui parle, il faut bien que l'acte d'expression lui permette de dépasser lui aussi ce qu'il pensait auparavant et qu'il trouve dans ses propres paroles plus qu'il ne pensait y mettre, sans quoi on ne verrait pas la pensée, même solitaire, chercher l'expression avec tant de persévérance. La parole est donc cette opération paradoxale où nous tentons de rejoindre, au moyen de mots, dont le sens est donné, et de significations déjà disponibles, une intention qui par principe va au-delà et modifie, fixe elle-même, en dernière analyse, le sens des mots par lesquels elle se traduit. Le langage constitué ne joue un rôle dans l'opération d'expression que comme les couleurs dans la peinture : si nous n'avions pas des yeux ou en général des sens, il n'y aurait pas pour nous de peinture, et cependant le tableau « dit « plus de choses que le simple exercice de nos sens ne peut nous en apprendre. Le tableau par-delà les données des sens, la parole par-delà celles du langage constitué doivent donc avoir par eux-mêmes une vertu signifiante, sans référence à une signification qui existe pour soi, dans l'esprit du spectateur ou de l'auditeur.

Le texte est centré sur les rapports entre la signification produite et le langage constitué. Il envisage d'un point de vue philosophique le problème que fait apparaître la linguistique structurale en opposant la langue, code constitué, et la parole, mise en oeuvre de ce code par un locuteur. Mais il rapporte la signification à une intention qui la produit, et non, comme le structuralisme, à un système. En d'autres termes, il prend pour thème de réflexion la liaison entre le code et le locuteur, en essayant de penser leur articulation.

merleau

« 1 - D'où provient le sens ? Le texte est tout entier construit autour de l'idée que le sens n'est pas déposé dans la langue, mais résulte d'une rencontre entre elle et la volonté d'expression d'un sujet qui se l'approprie.

Quelle origine est-il possible d'assigner àcette intention de signification ? Ne s'agit-il pas en réalité d'une illusion, d'une méconnaissance ? A la mêmequestion, le surréalisme répond qu'il faut faire rendre au langage ses potentialités occultées par le quotidien ; lesens est à redécouvrir dans les plis de la langue.

Pour la psychanalyse, l'enracinement de la signification n'est pas àrechercher dans une volonté consciente, mais dans la structuration de l'inconscient.

« Ca parle » dit Lacan, voulant indiquer par là que nous sommes soumis au discours de l'inconscient (le Ca) et que nous ne maîtrisons pasnotre parole. 2 - Structure et parole Dans la plupart des théories linguistiques contemporaines, issues des recherches de Saussure, la parole, production individuelle, n'est pas l'objet d'étude, parce qu'elle échappe par principe à l'approche scientifique.

Seule la langue,susceptible de généralisation, peut être analysée.

Cette dichotomie fausse les rapports entre le linguiste et lephilosophe, dans la mesure où le projet de ce dernier se situe à l'articulation des deux notions.

Comme le faitremarquer Paul Ricœur, loin d'être satisfait du rejet de la parole hors de la linguistique, le philosophe s'assigne pour tâche de comprendre comment elle est possible, à partir de l'existence du code.

C'est précisément ce que tented'expliquer Merleau-Ponty. 3 - La place du sujet Merleau-Ponty nous conduit au centre d'un problème philosophique qui occupe aujourd'hui encore les recherches sur le langage : la notion de sujet.

La perspective du texte suppose un sujet auquel est rapporté l'acte d'expression.

C'est à son existence que l'on doit ce débordement du donné initial, cetteélaboration d'un matériau qui, par lui-même, ne signifie pas encore complètement.

L'analogie proposée par l'auteur avec le processus de laproduction picturale, nous rapproche en fait, du problème de la création.

Le sujet parlant secomporte à l'égard de la langue comme l'artiste face à ses matériaux ; il crée à partir de matériaux préexistants et de règles.

Il nous semble qu'un tel point de vue est conciliable avec les conceptions de la grammairegénérative de Chomsky, mais non avec la linguistique structurale.

Cette dernière, en effet, ne pose jamais la question du sujet, elle l'exclut de sa réflexion, alors que Chomsky le réintègre, mais il faut postuler, pour cela, une forme de transcendance. Conclusion Le langage et les mots furent définis par les dictionnaires et le sens commun.

Chaque êtrepouvait donc s'y référer.

Mais la psychanalyse et la linguistique soulignent un point de vueassez différent.

D'une part, l'inconscient s'exprime et nous n'arrivons pas toujours à contrôlerla parole.

D'autre part, le sujet fonde une relation, produit un code.

Merleau-Ponty insiste sur l'intention qui unit celui qui parle à un système général de mots.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles