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Paradoxes de la succession temporelle d'ARISTOTE

Publié le 09/01/2020

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aristote

Aristote présente ici le problème de la succession temporelle sous une forme aporétique : l'instant qui sépare le passé du futur ne peut être toujours le même, il ne peut être non plus toujours différent. Par cette aporie, le philosophe insiste sur la difficulté de penser la divisibilité du temps. À première vue, le temps est divisible en parties, pourtant, aucune de ses parties n'est stable : à peine présent, l'instant est déjà passé. Comment appréhender ce perpétuel passage ?

[...] L’instant qui paraît délimiter le passé et le futur, est-ce qu’il subsiste un et identique, ou est-il toujours nouveau ? Ce n’est pas facile à voir. En effet, s’il est toujours différent, comme aucune partie d’une succession temporelle ne coexiste avec aucune autre et comme ce qui actuellement n’est pas, mais a été auparavant, doit forcément avoir été détruit à un moment, de même aussi les instants ne coexisteront pas les uns avec les autres, et celui qui précède sera forcément toujours détruit. Maintenant, détruit en lui-même ? Impossible, parce qu’alors il est; mais être détruit en un autre instant, l’instant qui précède ne le peut.

En effet, admettons-le, la continuité des instants entre eux, comme celle des points, est impossible; si donc il n’est pas détruit dans l'instant consécutif, mais dans un autre, il coexisterait avec les instants intermédiaires [...], or c’est impossible. Maintenant il ne peut pas demeurer toujours le même ; car pour aucune chose divisible limitée, il n’y a qu’une limite unique, qu’elle soit continue suivant une seule direction ou suivant plusieurs ; or l’instant est une limite et il est possible de prendre un temps fini. En outre [...] si les choses antérieures et les postérieures sont dans [le même] instant, les événements vieux de dix mille ans coexisteront avec ceux d’aujourd’hui, et rien ne serait plus antérieur ni postérieur à rien.

Aristote, Physique, livre IV, 10, 218 a 6-30, trad. E. Barbotin, coll. « Budé », Belles Lettres, 1990, pp. 147-148.

aristote

« aucune partie d'un e successio n temporelle ne coexiste avec aucune autre[ ...

], et comme ce qui actue llemen t n'est pas, mais a été auparavant, doi t forcément avoir été détruit à un moment, de même aussi les insta nts ne coexis teront pas les uns avec les autres, et celui qui précè de sera for céme nt toujo urs détruit.

Mai ntenant, détruit en lui-mê me? Imp ossib le, parce qu'a lors il est; ma is être détru it en un autre insta nt, l'instant qui précède ne le peut.

En effet, admettons -le, la cont inuité des instant s entre eux, comme celle des points , est imposs ible; si donc il n'est pas détruit dans l'insta nt consécutif, mais dans un autre, il coe xiste ­ rait avec les ins tants intermédiai res[ ...

], or c'est impossible.

Maintenant il ne peut pas demeu rer toujours le même; car pour aucu ne chose divis ible limi tée, il n'y a qu'une limite unique, qu'elle soit continue suivant une seule direc tion ou suiv ant plu­ sieurs; or l'instant est une limite et il est possibl e de prendre un temps fin i.

En outre [ ...

] si les choses antéri eures et les posté­ rieures sont dans [le même] instan t, les événe ments vieux de dix mill e ans coe xistero nt ave c ceux d'aujo urd' hui, et rien ne ser ait plus antérieur ni pos térieur à rien.

ARISTOTE, Physique , livr e IV, 10, 218 a 6-30, trad .

E.

Barbotin, coll.« Budé» , Belles Lettres, 1990, pp.

147-148.

P.OUR MIEUX COMPRENDRE LE TEXTE ---- ---- - - La réfl exion est ici soutenue par une comparaison entre temps et espace .

Les instants ne peuvent coexister entre eux comme peuvent le faire ·les points dans l'espace .

Les points, à la différence des instants, ne se détruisent pas réciproquement .

Ce n'es t que dans le tem ps que «ce qui actuellement n'est pas, mais a été auparavant, doit forcément avoi r été dé truit à un momen t».

Mais commen t env isager cette destruction inhérente à la succession ? Un ce rtain nombre de paradoxes surgissent.

Plusieurs instants ne peuvent : 1.

Ni se suivre en se détruisant immédiatement l'un l'autre car sinon.

il n'y aurai t pas de temps (il n'y aur ait, à proprement parle r, rien) .

2.

Ni se suivre en se détruisant de manière non immé­ diatement consécutive car dans ce cas, des maintenants interv allaires seraient simultanés .

et il n'y aura it pas davan­ tage de temps .. »

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