Passion et action ?
Publié le 04/12/2005
Extrait du document
Le thème de cet énoncé porte sur la relation qu’entretiennent réciproquement passion et action (la relation est thématisée pas le conjoncteur). Comprendre la relativité de l’action à la passion, et vice versa, suppose un ancrage commun en un troisième terme extérieur à la relation. L’ancrage commun est ainsi nécessaire parce qu’en lui s’organise la possibilité de l’articulation des termes (passion et action). Cet ancrage commun réside en l’homme, car l’expression de la relation entre action et passion est discursive, c’est-à-dire est exprimée dans et par le langage (de l’énoncé). Or le langage comme marque de la rationalité est une caractéristique de l’homme (compris dans sa définition aristotélicienne : zoon logon ekon). La rationalité (du langage) est donc ce critère externe à la relation permettant son organisation.
Le problème de l’énoncé consiste en l’apparence contradictoire des deux termes de la relation. En effet, passion et action semblent s’exclure réciproquement, et jamais ne pouvoir coexister. Or l’énoncé assure leur relation par la conjonction. Dès lors, il s’agit de penser le sens et la signification de la conjonction dans et par le langage – le langage apparaissant comme l’unique possibilité d’assurer l’union des contraires supposés. Le troisième terme (extérieur à la relation) étant rationnel (le langage), action et passion doivent être pensées, dans la possibilité de leur conjonction, depuis l’homme.
En conséquence le développement peut se poursuivre selon deux enjeux majeurs : l’homme étant scindé entre agir et pâtir, il faut interroger le statut respectif de l’acte et de la sensation dans le domaine moral et esthétique (au sens kantien de théorie de la sensation), afin de penser la possibilité d’une passion de l’acte et d’une activité de la sensation. Cela doit rester orienté relativement au problème de la rationalité, autrement dit de la connaissance dont la philosophie kantienne peut être le fil conducteur.
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Le concept de devoir moral
La formule du devoir s'exprime de manière très simple : "Agis uniquement d'après la maxime qui fait que tu peuxvouloir en même temps qu'elle devienne une loi universelle." Toutes les maximes pratiques qui ont en vue l'utilité oul'intérêt personnel ne peuvent en effet tenir lieu de lois universelles, car si elles sont valables pour moi, elles nepeuvent, sans se contredire, être applicables à tous.
Dans les Fondements de la métaphysique des moeurs, Kantprend pour exemple le mensonge : si je m'autorise un mensonge en vue de mon bien-être futur, il est impossible defaire de lui une loi morale universelle, sous peine de rendre impossible la promesse, ou tout simplement d'enlevertoute crédibilité à mes paroles.
Si nombre de nos actions visent l'intérêt égoïste, les actions morales sont uneexigence de raison.
Par là, l'homme démontre sa personnalité, c'est-à-dire sa supériorité à l'égard de la nature, s'ilse rend capable d'agir indépendamment de ses propres intérêts.
Une maxime n'a de valeur morale, si et seulement sielle est "pure".
Le devoir se pose à l'encontre de l'agrément, ne répond à aucun intérêt matériel ou personneld'aucune sorte (ni pour son bien, ni pour le bien d'autrui : Kant reconnaît qu'il ne faut jamais mentir, pas même à unassassin qui poursuit notre ami qui a trouvé refuge dans une maison voisine) ; il exige l'inconditionnelle soumission àla raison, mais ne nous menace en rien de sanctions si nous désobéissons.
Le devoir est l'obéissance à une loi quenous trouvons en nous-mêmes, et qui résiste à tous nos penchants.
Elle exprime la supériorité et l'indépendance del'homme à l'égard de la nature, à savoir la liberté qui lui permet d'agir sans être déterminé de manière sensible etempirique.
Le devoir marque l'appartenance de l'homme au domaine de l'esprit.
Cette spiritualité morale peut sedéfinir comme personnalité, soit comme "pouvoir d'un être soumis aux lois pures pratiques données par sa pureraison".
Si nous appartenons au monde sensible par notre caractère empirique, nous appartenons par notre proprepersonnalité au monde intelligible.
Relevant de deux mondes, l'homme ne peut qu'admirer son être intelligible, etvénérer avec le plus grand respect les lois rationnelles qu'il découvre en lui.
En conséquence, la morale conçue dans sa dimension de rationalité formelle (il s'agit bien d'une critique de la raison pratique), caractérisée par un certain intellectualisme (viser le bien suppose, dans la mise en œuvre de la liberté, lapossibilité de connaître l'impératif du devoir), est toujours déjà déterminée par une passivité.
En outre et pour prendre comme exemple une conception radicalement différente de l'action mais témoignant également del'intrication entre agir et pâtir dans l'action humaine, la liberté se définit dans l'éthique de Spinoza par laconnaissance des déterminations sensibles conditionnant l'agir, c'est-à-dire peut se comprendre par la consciencede la passion toujours déjà à l'œuvre dans l'action.
Conclusion - En conséquence, la possibilité de conjoindre, dans le langage, les termes apparemment contraires de passion et d'action manifeste une humanisation de leur relation, autrement dit : l'union de passion et action estconditionnée et n'a de sens qu'en et à partir de l'homme compris comme être rationnel clivé selon ces deuxdimensions (passion – action).
La signification du conjoncteur (“ et ”) signifie le propre de la nature de l'hommecomme être rationnel en lequel s'unit et s'articule la dualité, qui alors n'est plus pensable comme contradictoiremais est bien indissociable.
Le fait que la possibilité d'une telle conjonction se manifeste dans le langage ( logos ) souligne le caractère foncièrement rationnel de la possibilité même de la conjonction..
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