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Penser, est-ce calculer ?

Publié le 17/01/2022

Extrait du document

� La formulation peut dérouter, en raison de la polysémie du verbe « penser «.

� Calculer, c'est faire des opérations au moyen de nombres.

� Un élément de réponse peut être suggéré par une question simple : une machine à calcul pense-t-elle ?

� On a intérêt, pour donner à la question sa portée maximale, à prendre le verbe « penser « dans son sens le plus philosophique possible

Introduction

  • I. - Difficultés de « penser «
  • II. - Avantages du calcul
  • III. - La pensée irréductible au calcul

Conclusion

« En effet, un algorithme, c'est une procédure mécanique et répétitive permettant de réaliser une opération.Pourquoi la pensée serait-elle identique au calcul, si le calcul est ainsi défini? Cette thèse remonte, sous forme deslogan, à Hobbes et à Leibniz, mais elle fut rendue plus pertinente par les progrès de la logique mathématique auXXe siècle.

Raisonner, c'est déduire des propositions vraies d'autres propositions selon des règles spécifiques.

Or, lalogique montre que les règles gouvernant les raisonnements peuvent être décrites de manière purement formelle,sans faire référence au contenu des énoncés sur lesquels portent les raisonnements.

Par conséquent, lesdéductions sont analogues aux propriétés des calculs que nous avons exposées : en ce sens, comme le font lessciences cognitives, héritières des thèses du logicien Turing sur la nature du raisonnement et de la pensée, leraisonnement doit être compris comme une espèce de calcul. Mais, n'est-ce pas une position réductrice, qui assimile pensée et raisonnement? La thèse de Türing, à la suite de Hobbes et Leibniz, repose essentiellement sur l'assimilation non questionnée de lapensée et du raisonnement, ainsi que sur l'analyse du raisonnement en termes de déduction formelle.

Or, la penséeest plus vaste que le raisonnement.En effet, la pensée implique bien des activités intellectuelles qui ne sont pas réductibles au raisonnement.

Aristote, dans les Seconds Analytiques, distingue deux types de pensée tendant à laconnaissance du vrai, la pensée déductive et l'intuition.

La pensée déductiveconsiste à déduire une conclusion de prémisses connues antérieurement,conformément aux règles de la logique syllogistique présentées par cephilosophe.

Mais l'intuition consiste en une connaissance de la nature desessences formelles des êtres sur lesquels portent les sciences : cetteconnaissance fournit le point de départ, les prémisses dont dépend toute laconnaissance déductive.

Autrement dit, même si l'on admet la validité de lathèse de Turing le raisonnement dépend d'une connaissance qui estirréductible à toute caractérisation formelle, donc à tout algorithme.

Laconnaissance des fondements de la science, dont dépend toute déductionscientifique, échappe au calcul.En outre, la pensée ne tend pas tout entière, ni même peut-êtreessentiellement, à la vérité : il est possible que la pensée consiste avant toutdans l'appréhension de la question du sens de l'existence.

Penser, c'est alorsappréhender consciemment sa propre existence et s'interroger sur le sens decette existence.

Toutes les autres activités couramment qualifiées de penséesupposent cette capacité.

Autrement dit, penser, ce n'est pas accomplir uncertain type d'opérations, éventuellement caractérisables en termes demécanismes formels et récursifs.

Penser, c'est comprendre, c'est-à-diredonner un sens. Dès lors, la pensée est par nature irréductible au calcul : calculer, ce n'est pas penser, puisque le calcul estréductible à des algorithmes mécaniques formels et n'implique aucune compréhension.

Pourtant, cette thèse neremet pas en cause la description initiale du calcul : or, celle-ci doit être critiquée. Calculer, ce n'est pas appliquer mécaniquement un algorithme.

Et si tel est le cas, alors nous ne pouvons plusopposer la pensée au calcul, comme nous venons de le faire, ni assimiler la pensée à une activité mécanique : lecalcul est alors une espèce particulière de pensée.Peut-on dire vraiment, comme nous l'avons suggéré en commençant, que les ordinateurs calculent? Et si nouspouvons aller jusqu'à l'affirmer, voulons-nous dire qu'il calcule au sens où nous disons que nous autres humainscalculons? Quand nous additionnons deux et trois, nous sommes certains que le résultat est cinq.

Cette certitudeest constitutive de l'addition, et plus généralement de toutes les opérations que nous désignons du nom de calcul.Or, l'ordinateur n'est jamais certain du résultat du processus mécanique défini par l'algorithme programmé.

C'est làune différence majeure entre ce qu'est le calcul mécanique et ce qu'est le calcul humain.Cette certitude ne résulte pas de l'application d'un algorithme, puisque nous pouvons toujours douter de l'avoircorrectement appliqué.

Nous sommes certains de notre addition, parce que nous avons appris à additionner de cettemanière et parce que notre addition s'accorde avec les pratiques d'autrui : la certitude repose sur l'apprentissage decertaines pratiques et sur l'acceptation par autrui de nos propres pratiques.

Autrement dit, calculer, c'est mettre enoeuvre une certaine compétence qui résulte de notre éducation au sein d'une communauté évaluant la validité del'ensemble de nos pratiques, y compris de notre capacité à calculer.

Le calcul n'est donc pas un processusmécanique et formel, mais une certaine pratique sociale.En ce sens, le calcul est une forme de pensée, si l'on appelle par pensée, comme l'analyse du lien entre sens etpensée l'a suggéré, un comportement particulier d'un certain type de vivant, c'est-à-dire les hommes.

Cecomportement, c'est-à-dire une certaine relation d'un vivant avec son environnement, se caractérise par laprésence d'une dimension de sens en lui.

Calculer, ce n'est pas une opération mécanique pour l'être humain quicalcule : ce n'est pas une opération absurde, dépourvue de sens.

Mais c'est au contraire une opération naturelle,c'est-à-dire une opération pourvue de sens.

Et cela parce que c'est un comportement social que nous avons apprislors de notre éducation au sein de la communauté de vie qui est la nôtre. Penser, ce n'est pas calculer, même s'il peut de prime abord sembler éclairant de caractériser le calcul comme un. »

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