Peut-on dire avec Ribot que la conscience affective est seulement la constatation de notre état organique ?

INTRODUCTION. - SOUS l'influence du dualisme cartésien d'après lequel le corps et l'âme constituaient deux réalités se suffisant à elles-mêmes, la psychologie a été longtemps conçue comme la science de la vie inférieure et celle-ci comme un monde indépendant du monde physique et de l'organisme. Contre cette conception, la psychologie moderne a vivement réagi et, reprenant des remarques faites par DESCARTES lui-même dans son traité Des passions de l'âme, a mis en relief le rôle du corps dans la vie psychique, mais tout particulièrement dans la vie affective. Un des représentants les plus en vue de cette réaction est Théodule RIBOT, pour lui la conscience affective n'est que la constatation de notre état organique. Pouvons-nous admettre cette opinion ? I - L'organisme joue un rôle essentiel dans la vie psychologique de l'esprit incarné qu'est l'homme. a) On peut déceler ce rôle même dans l'activité intellectuelle et dans la pensée la plus abstraite : l'attention implique une certaine attitude du corps; la pensée ne s'achève que par son expression verbale, et son élaboration comporte une recherche des mots qui ne va pas sans l'ébauche de mouvements phonatoires. b) Mais il est particulièrement visible dans la vie affective : 1° Ainsi qu'on l'a répété, il n'y a pas d'émotion véritable sans troubles organiques; 2° Sans doute, dans les états affectifs de faible intensité, les sentiments, l'élément corporel est si peu apparent qu'on a pu les caractériser par leur incorporalité essentielle; mais un affinement de l'observation vulgaire et plus tard les expériences et les mesures des laboratoires de psychologie ont permis de constater leur présence dans les états affectifs les plus faibles. Il est donc indiscutable que l'affectivité est étroitement dépendante de l'état organique. Mais s'ensuit-il qu'elle se réduise à la constatation de cet état ?