Devoir de Philosophie

Peut-on dire que "tout travaille à faire un homme en même temps qu'une chose" ?

Publié le 17/01/2022

Extrait du document

temps

C'est une banalité d'observer que la conception du travail a souvent varié au cours de l'histoire et d'une civilisation à l'autre. Cependant, à travers ces variations, on retrouve toujours dans la notion de travail une ambiguïté ou une ambivalence fondamentale: le travail est en effet perçu tout à la fois comme quelque chose de positif ou de négatif. Dans le judaïsme. par exemple. le travail témoigne de la grandeur de l'homme, de son effort constant à combattre et à maîtriser une terre. une nature souvent ingrate : par le travail, l'homme se fait créateur comme le Dieu dont il est l'image; mais simultanément le travail est une malédiction divine. un châtiment de la désobéissance humaine. De même, dans les sociétés occidentales contemporaines, le développement d'une civilisation des loisirs marque un désir de se libérer du fardeau du travail, et pourtant celui-ci reste prôné comme une valeur essentielle. On comprend certes aisément la valeur négative du travail: le travail réclame un effort, il est une peine que la nécessité d'assurer sa subsistance impose à l'homme. Mais d'où vient qu'il reste une valeur positive alors même que les apports de la technologie permettent d'envisager que dans un proche avenir l'homme ne sera plus contraint de travailler ? Ne serait-ce pas parce qu'en réalité tout travail travaille à faire un homme en même temps qu'une chose ?

temps

« L'édifice de la civilisation repose sur le principe du renoncement aux pulsions instinctives, et postule la nonsatisfaction de puissants instincts » Malaise dans la civilisation. • Citation d'Engels qui fait écho à l'énoncé du sujet : « Le travail est la source de toute richesse...

mais il estinfiniment plus encore.

Il est la condition fondamentale, première de toute vie humaine, et il est à un point tel que,dans un certain sens, il nous faut dire le travail a créé l'homme lui-même.

» Mais le travail n'est-il pas aussi ce qui«défait » un homme ? De façon générale par la fatigue et la peine qu il impose et plus spécialement par certainesconditions du travail Pensez au travail de l'esclave ou à ce que Marx a appelé le travail aliéné. Méditez ce texte de Marx extrait des Manuscrits de 1844: « Or, en quoiconsiste l'aliénation du travail ? D'abord, dans le fait que le travail estextérieur à l'ouvrier, c'est-à-dire qu'il n'appartient pas à son essence, quedonc, dans son travail, celui-ci ne s'affirme pas, mais se nie, ne se sent pas àl'aise, mais malheureux, ne déploie pas une libre activité physique etintellectuelle, mais mortifie son corps et ruine son esprit.

En conséquence,l'ouvrier n'a le sentiment d'être auprès de lui-même qu'en dehors du travail et,dans le travail, il se sent en dehors de soi.

Il est comme chez lui quand il netravaille pas et, quand il travaille, il ne se sent pas chez lui.

Son travail n'estdonc pas volontaire, mais contraint; c'est du travail forcé.

Il n'est donc pas lasatisfaction d'un besoin, mais seulement un moyen de satisfaire des besoinsen dehors du travail.

Le caractère étranger du travail apparaît nettementdans le fait que, dès qu'il n'existe pas de contrainte physique ou autre, letravail est fui comme la peste.

Le travail extérieur, le travail dans lequell'homme s'aliène, est un travail de sacrifice de soi, de mortification.

Enfin, lecaractère extérieur à l'ouvrier du travail apparaît dans le fait qu'il n'est passon bien propre, mais celui d'un autre, qu'il ne lui appartient pas, que dans letravail l'ouvrier ne s'appartient pas lui-même, mais appartient à un autre.

[...]On en vient donc à ce résultat que l'homme (l'ouvrier) ne se sent pluslibrement actif que dans ses fonctions animales, manger, boire et procréer,tout au plus encore dans l'habitation, la parure, etc., et que, dans sesfonctions d'homme, il ne se sent plus qu'animal.

Le bestial devient l'humain et l'humain devient le bestial.Manger, boire et procréer, etc., sont certes aussi des fonctions authentiquement humaines.

Mais, séparéesabstraitement du reste du champ des activités humaines et devenues ainsi la fin dernière et unique, elles sontbestiales.

» • En plus des références indiquées voir : particulièrement Leroi Gourhan.

Le geste et la parole (Albin Michel).• Kojine : Introduction à la lecture de Hegel (Gallimard). C'est une banalité d'observer que la conception du travail a souvent varié au cours de l'histoire et d'unecivilisation à l'autre.

Cependant, à travers ces variations, on retrouve toujours dans la notion de travail uneambiguïté ou une ambivalence fondamentale: le travail est en effet perçu tout à la fois comme quelque chose depositif ou de négatif.

Dans le judaïsme.

par exemple.

le travail témoigne de la grandeur de l'homme, de son effortconstant à combattre et à maîtriser une terre.

une nature souvent ingrate : par le travail, l'homme se fait créateurcomme le Dieu dont il est l'image; mais simultanément le travail est une malédiction divine.

un châtiment de ladésobéissance humaine.

De même, dans les sociétés occidentales contemporaines, le développement d'unecivilisation des loisirs marque un désir de se libérer du fardeau du travail, et pourtant celui-ci reste prôné comme unevaleur essentielle.

On comprend certes aisément la valeur négative du travail: le travail réclame un effort, il est unepeine que la nécessité d'assurer sa subsistance impose à l'homme.

Mais d'où vient qu'il reste une valeur positivealors même que les apports de la technologie permettent d'envisager que dans un proche avenir l'homme ne seraplus contraint de travailler ? Ne serait-ce pas parce qu'en réalité tout travail travaille à faire un homme en mêmetemps qu'une chose ? La fonction première du travail est de répondre aux besoins matériels vitaux que ressentent les hommes: besoinde nourriture, de vêtements, d'abris, etc.

Le travail travaille donc à faire des «choses» susceptibles de satisfaireces besoins.

Mais la production de ces biens conduit à instaurer entre les hommes d'une part une coopération etune collaboration et d'autre part des échanges.

En effet, et Rousseau l'a bien observé, face à leurs multiplesbesoins et à leurs désirs croissants, les individus durent s'organiser en société où chacun s'attacha à une tâcheparticulière, où chacun trouva sa fonction propre.

Cette division du travail entraîne l'échange des biens produits,d'abord sous forme de troc, puis par la médiation de la monnaie.

Le travail apparaît donc comme ce qui lie leshommes, créant entre eux une interdépendance.

Mais en permettant l'établissement de ces relations originales, quine sont autre chose que des relations sociales, le travail travaille à faire des hommes dans la mesure où l'hommen'est réellement homme qu'à l'intérieur d'une société.

L'homme se socialise dans le travail, et un homme non socialiséne peut être que non humanisé.

On peut en outre considérer que le travail est, en dehors même de sa fonctionsocialisante.

un acte spécifiquement humain et donc qu'à travers lui chaque homme réalise son « humanité ».Comme l'écrivait Marx, l'homme joue en effet le rôle d'une « puissance naturelle » à l'égard de la nature.

Entendonspar là qu'il se dresse contre cette nature, qu'il s'oppose à elle en refusant d'accepter simplement le donné naturel eten s'efforçant de modifier son milieu, que ce soit en défrichant les forêts, en cultivant la terre, en faisant fondre lesmétaux, etc.

Ce processus de transformation de la réalité naturelle et de création d'une réalité nouvelle, « artificielle. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles