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Peut-on ne pas croire en la Justice ?

Publié le 27/02/2008

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justice
La Justice avec une majuscule désigne un idéal universel de rétribution qui consisterait à donner à chacun ce qui lui revient selon son mérite ou sa faute. Or un idéal est l'exigence d'un devoir être qui s'oppose à l'être. Si l'être peut faire l'objet d'un savoir, c'est à dire d'une connaissance certaine ; le devoir être qu'est la Justice ne peut constituer qu'un objet de croyance. Croire désigne une attitude d'adhésion intellectuelle personnelle qui affirme l'existence ou la validité d'une entité qui fait problème. Ainsi ; de même que l'existence de Dieu est conditionnée par une adhésion individuelle, la Justice serait un objet dont l'existence serait conditionnée par l'adhésion d'un individu. En, ce sens, on pourrait aussi bien croire ou ne pas croire en l'existence d'un idéal qui aurait pour nom Justice. Cependant si l'on ne croit pas en l'idéal de justice, le champ de l'action humaine risque de perdre toute légitimité. En effet sans cet idéal, l'action politique ou morale serait suspectée de n'obéir qu'à l'arbitraire d'un intérêt individuel ; ce qui provoquerait un état d'hostilité générale rendant impossible une vie en commun. Ainsi on ne pourrait pas ne pas croire en la Justice : il faudrait nécessairement croire en elle pour vivre une vie avec d'autres hommes. Cependant si l'on doit croire en cet idéal, rien ne nous garantit qu'il soit susceptible de s'incarner au sein du réel. Nous sommes alors confrontés à ce problème : la croyance en l'idéal de Justice est-elle une condition nécessaire et suffisante pour la réalisation de toute action morale et politique ?
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« présente à nous de manière négative dans le sentiment du scandale.

Ainsi lorsque nous nous récrions avecvéhémence « ce n'est pas juste », nous affirmons, parfois malgré nous que nous croyons en un idéal de justice, quela situation présente vient précisément de contredire.

Par conséquent, nous devons croire en la réalité de cet idéaluniversel qui émane de notre raison dans la mesure où il conditionne notre vie avec d'autres hommes et permetl'orientation de nos actions.

Cependant il ne suffit pas de croire en la réalité d'une idée pour qu'elle se réalise : croire en la Justice signifie quecet idéal existe et qu'on lui accorde son adhésion, mais rien ne garantit qu'il puisse être réalisé.

III La croyance : une condition nécessaire, mais non suffisante pour la réalisation _ La justice existe comme idéal, mais l'idéal est un concept qui est opposé au réel.

Ce qui est déterminé comme uneexigence de la raison ne risque t-il pas, en étant un pur être raison, de ne pas se soucier des conditions réelles etde se réduire à une chimère ? Cette objection que l'on pourrait qualifier de réaliste ou de pragmatique est réfutéepar Kant dans la première section de la « Dialectique transcendantale » au sein de la Critique de la raison pure : l'idée de Justice a un usage régulateur pour toute action, c'est à dire qu'elle l'oriente et lui donne une direction audelà des obstacles rencontrés dans le réel.

En effet la morale n'est possible que si elle se fonde sur un modèle dejustice que l'expérience ne peut fournir (ce qui est la définition même de ce q'est l'idéal) qui sert de mesure et dejalon.

Ainsi l'idéal de la justice est une idée nécessaire pour réguler l'action politique : elle est « le fondement à toutprogrès vers la perfection morale ».

Il ne sert donc rien d'affirmer que cet idéal est irréalisable pour ne pas travaillerà l'inscrire le plus possible dans le réel.

Croire en la justice signifie que la Justice est l'idéal vers lequel l'actionpolitique et morale doit tendre et il n'est pas légitime de refuser de travailler à amener à l'idéal de la justice dans lemonde sous prétexte qu'il est en lui-même irréalisable._ Inversement il ne suffit pas de croire en un idéal pour qu'il se réalise.

Ainsi dans la Phénoménologie de l'esprit , Hegel dénonce la lâcheté et la paresse de la belle âme qui ne cesse d'affirmer son adhésion à l'idéal de Justice, mais sans pour autant le mettre en pratique.

La belle âme fait comme s'il suffisait d'adhérer à des idéauxlorsque qu'un idéal n'a de réalité que lorsqu'il est effectif.

En d'autres termes, il ne s'agit pas de déterminer ce quiest juste et de l'affirmer, mais il faut le faire.

Par exemple dans les Possédés de Dostoïevski, Stephan Trophimovitch ne cesse de se répandre en discours sur les idéaux de justice ou de liberté, mais toutes les fouis où il a eul'occasion de mettre en pratique ces principes abstraits, il s'est refusé à le faire par peur ou par paresse.

On voitbien que croire en la Justice comme idéal est une condition nécessaire pour la réalisation de l'action politique etmorale, mais non suffisante.

Pour que l'idéal se réalise, il faut encore travailler à son institution au sein du réel.

Ence sens on pourrait dire que la croyance de la belle âme se réduit à une croyance abstraite et stérile qui n'adhèrepas vraiment à ce qu'elle croit.

En revanche une véritable foi en la Justice ne peut se borner à des déclarations deprincipe, mais en passe nécessairement par le régime impur et difficile de la réalisation.

Conclusion : On peut ne pas croire en la justice, mais on le doit.

La croyance en l'idéal de la Justice est une conditionnécessaire, mais non suffisante pour la réalisation d'une action politique ou morale.

En ce sens on pourrait dire quecroire en la Justice ne se réduit pas à l'affirmation de son existence idéale, mais c'est travailler à instituereffectivement dans le monde ce qui n'existe encore que sous la forme d'une exigence rationnelle.. »

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