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Peut-on rire de tout ?

Publié le 23/12/2005

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Il consiste essentiellement à déceler des incompatibilités (non-sens, absurdités) dans ce qui paraît normal (sérieux, raisonnable) en vertu de l'habitude. Ainsi l'ironie prend au sérieux le ridicule, il y a raisonnablement des choses ridicules ; alors que l'humour rend ridicule le sérieux, et donc la raison elle-même (cause de l'absurdité). Si l'on prend l'exemple de l'ironie, on s'aperçoit très clairement de sa grandeur mais aussi très vite de ses limites. L'ironie socratique a un intérêt pédagogique, l'ironie de Molière inaugure la critique des moeurs et du Pouvoir, et enfin celle de Voltaire est l'esprit critique par excellence. Cependant son caractère agressif (voire cruel) peut tourner à l'injure. Ce sont là les limites raisonnables du rire. C'est dans ce sens que notre législateur "encadre" le rire, non seulement pour les atteintes à la dignité humaine, mais surtout pour l'injure publique proférée à l'encontre de particuliers ou de groupes, et concernant leur ethnie, race, nation, ou religion. Cela soulève un autre problème : le respect des religions. Il convient de distinguer le respect traditionnel ou religieux des religions et le respect moderne et humaniste des religions. Dans cet esprit, on peut comprendre que certains comiques invoquent la liberté d'expression pour caricaturer l'intégrisme religieux.
La liberté d'expression semble être un des fondements de notre monde moderne. Dans l'Ancien Régime, la censure au sens strict était de principe : étaient expurgés ainsi, non seulement les propos considérés comme injurieux ou diffamatoires, mais mêmes les plaisanteries contenues dans des pamphlets ou satires. Désormais comme le rire semble bien l'expression la plus heureuse de la liberté d'expression, n'est-on pas à une époque où l'on pourrait précisément rire de tout ? Toutefois un autre fondement de la modernité vient mettre en doute cette conjecture : la raison. En effet, la raison fonde un monde sérieux dont il ne semble pas raisonnable de rire. Ainsi "peut-on rire de tout" peut s'entendre en termes de permission et de capacité : soit, il ne serait pas permis de rire de tout, parce que l'homme n'est pas capable de rire raisonnablement de tout ; soit il serait permis de rire de tout, parce que l'homme serait capable de rire proprement de tout.

« Selon les religions (abrahamiques tout au moins) on ne peut rire, faire de l'humour à propos des choses sacrées : deDieu, de la mort et a fortiori du crime.

Rire du sacré est sacrilège.

Ce n'est pas par hasard si une certaine traditionchrétienne (médiévale) a pu diaboliser toute forme de rire (voir Le nom de la rose , d'Umberto Eco).

Mais la liberté d'expression étant un acquis de la modernité, cet anathème ne peut que s'effondrer.

L'on pourrait donc rire mêmedu sacré, sur le mode de l'humour, et non de la moquerie.

Alors que penser du film de Larry Flint qui érotisait l'imagedu Christ en croix? Cependant l'expression culturelle du rire est, en effet, assurée par l'art : dans la comédie, la satire...

C'est donc l'artqui cultive le rire, qui contient la culture du rire, le savoir-rire.

L'humour et le non-sens semblent même privilégiésdans l'art contemporain.

En littérature, Beckett ( En attendant Godot ) et Ionesco ( La Cantatrice chauve ), maîtres de l'absurde.

En peinture, Magritte ( le fils de l'homme ) pour le surréalisme.

Et enfin en musique, Satie ( Air à faire fuir ). Pour bien des esthéticiens contemporains, l'essence de l'art résiderait à la fois dans l'expression de la liberté etl'intelligence du non-sens : lesquelles se croisent dans l'humour. Au XIXème siècle, Jean-Paul Richter, écrivain romantique allemand, fonde une métaphysique de l'humour, reposantbien sûr, sur un humour métaphysique.

L'humour est envisagé comme la structure fondamentale du monde, il estainsi méta-physique.

Le monde serait dominé par l'absurdité de contradictions (la vie serait niée par la mort) dontl'humour serait la conciliation. Suivant un tel sens de l'humour on pourrait rire de tout, parce que le tout est foncièrement humoristique : la véritéde l'existence serait humour.

C'est au fond dans cette ligne que les grands philosophes du rire, comme Bergson, sesituent. CONCLUSION : On peut rire de tout si c'est exprimé spirituellement avec l'Art.

Il n'y a de rire absolu que dans l'art.

La parolehumoristique ou spirituelle est la figure artistique ou esthétique de la spiritualité. L'homme moderne semble désormais en droit de se définir comme le rieur, même face à la mort.

En effet Valéry dit :"la mort enlève tout sérieux à la vie".

Ce serait donc la mort qui, en rendant la vie absurde, la rendrait comique,humoristique, spirituelle.

On ne rit authentiquement qu'à partir de la mort, depuis la mort...

de la mort ? La vie estl'éclat de rire de la mort.. »

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