PHILOSOPHIE DE L'ESPRIT, PHILOSOPHIE DE LA CULTURE
Publié le 01/04/2012
Extrait du document

• Cette dialectique est fondée sur la contradiction: l'Idée (I'Ëtre) n'a de sens que par son devenir, c'est -à-dire par sa négation; au sein de la réalité toute affirmation (thèse) est contemporaine de sa contradictoire (antithèse) et cette opposition se résout dans une synthèse. En développant la succession des triades thèse, antithèse, synthèse, Hegel détermine, à partir de l'Idée en -soi, les catégories (existence, mesure, etc.) de l'esprit...

«
131.2 - LE STRUCTURALISME
qui nous fera mieux comprendre l'homme et ses institu tions .
Cet inconscient qu'on peut atteindre par la linguis tique n'est pas à confondre avec l'inconscient freudien,
comme le remarque le philosophe Paul Ricœur (Esprit, novembre 1963) ; c'e st un inconscient« combinatoire», « un système catégoriel sans référence à un sujet
pensant » (Ricœur, ibid.}.
• L'objet de la linguistique, ce ne sont pas les
termes dont une langue est faite, mais les relations entre ces termes; l'ensemble de ces relations forme un système .
Il y a là une analogie avec l'attitude des
mathématiques modernes : qu'on opère sur des
angles , des nombres entiers, des grandeurs imaginaires,
des surfaces , des sacs de blé, etc
., les propriétés de l'addition, cette opération, cette relation entre deux
termes représentée par le signe « + » sont les mêmes ;
quels que soient les termes désignés par a, b et c on aura toujours :
a+ b = b +a (commutativité) a + (b + c) = (a + b) + c (associativité).
Pour décrire l'ensemble de signes
qui s'appelle l'ensemble des nombres entiers, le mathématicien
décrit les propriétés des opérations (des relations) à
l'intérieur de cet ensemble et non les termes de cet
ensemble .
Telle est
la portée de la phrase deN .
Troubetzskoi : «La phonologie actuelle ne se borne pas à déclarer que les
phonèmes sont toujours membres d'un système, elle montre des systèmes phonologiques concrets et met en évidence leur structure» ( N.
Troubetzskoi, La Phono logie actuelle , dans Psychologie du langage, Paris , 1933) .
Or ces deux principes peuvent s'appliquer , tels quels,
à d'a utres systèmes qu'un système de signes.
Si l'on considère les règles du mariage dans les sociétés
humaines , on observe qu'elles assurent la circulation
des femmes dans un groupe.
Il n'est pas besoin de se référer aux coutumes et aux règles des « primitifs » pour le constater intuitivement ; dans nos sociétés « civilisées », une femme, e(l se mariant , abandonne le système de relations biologiques qui la rattachent à sa mère, son père, ses frères et sœurs , etc ., bref à sa famille.
pour entrer dans le système de relations par
alliance (avec son mari, ses beaux-parents , etc.) qui la retient à sa belle-famille .
Autrement dit, par le mariage la femme circule dans le groupe social, d'une famille à
une autre , d'un clan à un autre, tout comme les mots circulent, par la langue, d'un individu à un autre .
Il est donc possible d'envisager la science de l' homme
comme l'étude des systèmes humains, quels que soient
les termes du système : mots, femmes, biens écono miques, etc.
La découverte des structures (incons cientes) qui donnent au système sa cohésion et sa force, des lois générales de ces structures, nous mettra
progressivement sur la voie de la réponse à la question : «Qu'est-ce que l'esprit humain? » Cette réponse devant
avoir l'allure générale suivante : «L'e sprit humain est l'unité de toutes les structures inconscientes décou vertes par l'analyse structurale.
»
Cl.
Lévi-Strauss a renouvelé l'esprit des sciences humaines; son apport à l'anthro pologie est peut-être aussi important que le fut celui de Freud à la psychologie.
En résumé , la linguistique structurale, fondée par F.
de Saussure et Antoine Maillet, développée par les
travaux des phonologistes et de la glossématique cités
plus haut, a fourni le modèle rigoureux dont s'inspire la science de l'homme, l'anthropologie, qui se situe au carrefour schématique suivant (Lévi-Strauss)
PSYCHOLOGIE
1 LINGUISTIQUE
G~OGRAPHIE - ANTHROPOLOGIE<
1 ARCH~OLOGIE
SOCIOLOGIE
c) Synchronie et diachronie.
Il importe de préciser, en outre, les deux perspectives
selon lesquelles F.
de Saussure envisageait la linguis tique et qui sont aussi les deux perspectives de l'anthro pologie; il les avait nommées : synchronie et dia chronie.
• L'ordre synchronique (ou « ordre des simul tanéités ») est celui du système proprement dit.
Selon cette dimension, on étudiera les rapports entre les faits
coexistants , sans tenir compte de la place de ces faits
dans le temps.
Par exemple , on constatera que les
consonnes p et m , l'une sourde et l'autre nasale (ce qui est une opposition relative au son), sont aussi en opposition relativement au sens (opposition séman tique) quand on les relie au groupe «ère» (opposition masculin / féminin) : p-ère m-ère
Les relations d'opposition sont simultanées, réver sibles, indépendantes du temps : elles sont synchro niques.
• L'ordre diachronique fait intervenir la succes sion dans le temps; le passage du latin pater au français père, c'est-à-dire le rapport pater /père consi déré du point de vue du temps est une relation diachro nique .
Or, et c'est là l'une des originalités de la linguistique
structurale , un rapport diachronique est un rapport
fortuit.
un
«é vénement » comme le dit F.
de Saussure ;
ce qui est structuré , c'est le système de la langue qui confère à ses éléments l'ordre synchronique; le fait diachronique vient -de temps à autre et sans règle apparente- altérer le système.
B - L'anthropologie structurale.
On appelle structuraliste toute doctrine qui recherche
- à l'aide de méthodes analogues à celles de la lin guistique - à déterminer les lois fondamentales (les
structures) de l'esprit humain par l'intermédiaire de
l'analyse de
ses produits (circulation de biens, organi sation sociale, distribution géographique , création artis tique, etc.).
Nous précisero ns la place historique du
structuralisme au n o 3; le représentant le plus
important du structuralisme dans les sciences humaines
est, en France ,
Cl.
Lévi-Strauss ; il est inséparable du
courant structuraliste germano-américain (Kroeber,
von Neumann et Morgenstern , les théoriciens de la communication, etc.).
Dans ce qui suit, et sans anticiper
sur les exposés relatifs aux sciences sociales, nous
indiquerons les grandes tendances du structuralisme
relativement
au problème de la nature humaine.
a) L'homme et son histoire.
Nous sommes , depuis le XIX • siècle , accoutumés à expliquer le présent par le passé : l'esprit se réalise dans le temps, l'homme semble avoir une histoire bien plus qu'une nature .
L'hégélianisme insiste sur le déroule ment dialectique de l'espr it; la philosophie d'A.
Comte voit dans la loi des trois états - qui est une loi dia chronique au sens défini ci-dessus -la loi fondamentale
de l'esprit humain ; l'existentialisme interprète la condi tion humaine comme une situation.
Dans le domaine
scientifique , l'évolutionnisme biologique a fait au temps -à la diachronie- la part la plus belle qui soit : notre
organisme est le résultat, le produit d'une succession
d'organismes dans le temps.
Tout naturellement cette
attitude diachronique s'est répandue dans les sciences
de l'homme :
la psychologie génétiste, la sociologie
de la première moitié du xx • siècle voient dans l'homme adulte et civilisé le résultat d'une évolution qui com mence par l'enfant et le « primitif ».
C'est à cette tendance qu'on doit les interprétations
traditionnelles des documents recueillis par les premiers
ethnographes .
Or, si l'on est assuré de la valeur objective
28
de l'évolutionnisme biologique par le simple fait qu'un
être vivant naît d'un autre être vivant, que les gènes (les éléments organiques porteurs des caractères héré d_itai _res) passent des « parents» à l' «enfant» - qu'il s a11rsse des Amrbes ou de l'Homo sapiens -,rien n'est
morns c _ert _ain en anthropologie .
On nous · disait , il y a
un demr-srècle , que les cérémonies totémiques étaient
une forme embryonnaire des cérémonies religieuses;
~ue le fait, dans certaines cérémonies, de manger rrtu~llement le totem (animal ou végétal) survivait dans le rrte de la communion (rite théophagique) : mais où se trouve l'élément objectif, le lien constaté entre les
deux coutumes? « Une hache n'e ngendre jamais une
autre hache» (Lévi-Strauss).
L 'histoire des faits humains nous met en présence
d'une succession bien différente de l'histoire biolo gique : la diachronie des événements n'a pas de
substance, n'a rien qui la sous-tende matériellement ,
alors que le passage d'un être vivant à un autre être
vivant est matérialisé.
b) Événements et structures.
Supposons qu'on ait décrit un fait humain dans une
société donnée en un temps donné ; appelons - le A.
Si l'on découvre, en d'autres sociétés , des phénomènes
du même ordre que nous appellerons A', A •, ...
, il est
possible d'e nvisager deux explications :
• Explication diachronique: les faits A', A n, ...
, sont les vestiges du phénomène A primitif
A ••••
/l-----A' A".
• • .
A (nJ
Les flèches qui relient A à A', A •, ...
sont des séries
d'événements (influences variées); pou r que l'expli cation soit valable, il faut évidemment qu'on découvre tous les événements qui conduisent de A à A'.
de
A à A • , etc .
Or, précisément, la «sociologie » tradition nelle se contentait.
la plupart du temps, d'affirmer le passage A-+ A ', sans pouvoir découvrir (et, dans
certains cas, l'impossibilité est définitive) les événe ments intermédiaires.
Dès lors qu'ex plique -t-on? Une remarque analogue peut être faite en linguistique; en quoi comprend-on mieux les lois intérieures à une
langue quand on fait de l'étymologie? Certes, il est
vrai que :
HOMO (latin)
----~---- HOMME HOMBRE UOMO (français) (H')
c 'est-à-dire que
H-+ H'
(espagnol) (H")
H-+ H" et
(italien) (H"')
H-+ H"'
etc.
mais qu
'a-t-on expliqué par là? Quelles lois a-t-on découvertes?
• Explication synchronique .
Reprenons notre
série A, A ', A n, ...
; on peut aussi dire que chaque
phénomène est l'expression, la manifestat ion d'une
même réalité (l'esprit humain) présente sous la forme
d 'une structure S à tous les stades de l'humanité, et
l 'on aurait :
s
1 ·1 A A' A (nJ
Au fond , cette manière de raisonner ressemble à la méthode que les logiciens traditionnels appelaient « raisonnement par abstraction »; c'est celle de Spi noza lorsqu 'il conclut du parallélisme entre les faits
de l'esprit (les idées) et les faits de la matière (les
choses) à l'existence d'une réalité unique, la substance, dont l'esprit et la matière ne seraient que des attributs
particuliers.
Autrement
dit, l'homme peut s'expliquer par une succession d'événements ou par un ensemble de
structures .
Dans le premier cas on aboutit à une vision
historique (il vaudrait mieux dire « historic iste ») de l'esprit humain, dans l'autre à une conception éter nitaire.
Et n'est-ce pas là, en un sens, le dernier mot de l'anthropologie moderne? Papou, Mélanésien , Bantou ,
Bororo, Parisien, New-yorkais, Athénien de l'époque de Périclès ou Samouraï du Moyen Age, blanc, jaune, noir ou rouge , l'homme est, dans son essence , iden tique à lui-même dans le temps et dans l'espace..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Cours de philosophie sur LA CULTURE (thématique du programme TS, TL, TES)
- PHILOSOPHIE DU NON (LA), Essai d une philosophie du nouvel esprit scientifique, Gaston Bachelard
- ÉLÉMENTS DE LA PHILOSOPHIE DE L’ESPRIT HUMAIN (résumé) de Dugald Stewart
- ESPRIT DE LA PHILOSOPHIE MODERNE (L’) Josiah Royce (résumé)
- PHILOSOPHIE DE L’ESPRIT (La) de Hegel (résumé)