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Quand dit-on d'une chose qu'elle est belle ?

Publié le 27/02/2008

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Le musicologue qui s'intéresse à la composition de la Vième symphonie de Beethoven peut très bien la rapprocher d'autres symphonies, la situer historiquement dans l'évolution du genre, il n'en demeure pas moins que, dans un tel traitement scientifique de la musique, il n'est pas question de beauté. Nous sentons la beauté sans pouvoir l'expliquer, encore moins la définir par concept, parce qu'un concept a toujours une signification générale, alors que la beauté est toujours celle d'un chose particulière et sensible. Chose encore plus particulière lorsqu'il s'agit d'une oeuvre d'art, car la première caractéristique de toute oeuvre géniale c'est l'originalité. D'ailleurs, dans une expérience esthétique authentique, plus je suis enthousiaste, plus je suis porté à dire: "c'est beau" et en guise de justification j'ajouterais: "regarde comme c'est beau !". Je n'éprouve pas le besoin d'argumenter. Quand dit-on d'une chose qu'elle est belle ?

« un homme à un moment de sa vie et que ce ne soit plus le cas à un autre moment.

Par exemple, on est dansl'adolescence soumis à des préférences impulsives, qui traduisent l'envie de sensualité plutôt que le recours à lasensibilité.

Ce raisonnement est un peu simpliste puisqu'il oublie que pour dire qu'une chose est belle, le jugementest tout de même nécessaire pour rendre une appréciation esthétique et donc une certaine expérience.

Reste àsavoir quelle doit être cette expérience.

Elle doit bien sur ne pas se transformer en un autre relativisme que nousallons maintenant voir.

En plus de ces deux premiers relativismes, dont nous allons bien nous garder, il en existe un troisième, lerelativisme historique dont il faut aussi nous méfier.

Il consiste à dire que la beauté est le fait d'une époque, relativeà des circonstances particulières.

Cela revient à la chose suivante : à chaque époque, il y aurait un concept debeauté valable uniquement pour cette époque et qui dès que cette dernière s'achève se retrouve désuet.

Celaparait, à l'image du relativisme culturel plutôt idiot : je ne peux pas trouver belle une œuvre d'art qui n'est pas demon époque dans ce cas.

Cela amène aussi à faire une classification quasiment scientifique de la beauté en fonctiondes époques.

On peut trouver un point commun entre toutes ces formes de relativisme : elles font tomber l'idée del'absolu dans le relatif.

La beauté devient alors un concept bien éphémère.

On a aussi peut de dire que la beautén'est pas simplement subjective, et donc des partis pris de l'ego, mais qu'elle l'idée puisse exister au-delà de cetteobjectivité.

C'est ce que nous allons maintenant voir avec la vision Kantienne de la beauté.

On peut trouver un contre exemple simple à tous ces relativismes : il s'agit de la nature.

Celle-ci esttoujours la même, insensible aux différentes époques, à l'instar de l'art.

Elle possède une esthétique intemporelle, quine dépend pas d'une quelconque culture, d'une histoire ou d'une mode.

La beauté ne se réduit pas à une formed'artifice humain donc.

Cela nous inviterait à penser qu'il existe bien une beauté objective.

Pour aborder ceproblème, il est tout d'abord nécessaire de comprendre ce qu'est l'harmonie : ce qui rendrait une chose belle peutêtre défini, à savoir l'harmonie qu'elle comporte.

Première chose, la beauté de la chose tient plus à la forme qu'à lamatière.

Pour une œuvre d'art, l'important n'est pas tant la matière que l'harmonie de composition.

Il faut donc biendéfinir cette harmonie.

Cette harmonie est présente au sein de l'art par exemple mais aussi de la nature, et poursimplifier, elle reviendrait à réunir des parties qui forment un tout de telle manière que l'unité du tout domine sur lamultiplicité des parties.

Descartes écrit en ce sens : « La beauté est un accord et un tempérament si juste de toutes les parties ensemble, qu'il n'y en doit avoir aucune qui l'emporte sur les autres ».

L'harmonie donne une unité vivante, et c'est cette unité vivante qui nous touche dans le sentiment de beauté.

Pour continuer à définirl'harmonie, il nous faut dire que l'harmonie n'est pas une chose perçue par la personne individuellement, mais estimmanente à la chose.

On peut utiliser de nombreux adjectifs pour la qualifier tel que symétrique, proportionnel,régulier.

Cette idée, si elle est reprise par Kant est fort ancienne et on la trouve par exemple chez Aristote : « La beauté consiste dans la grandeur et la disposition ordonnée ». Cette harmonie que l'on trouve bien sur en musique où elle est fort usitée, est aussi utilisée dans de nombreux autres domaines, que ce soit l'architecture, la peinture…On peut faire référence à l'exemple du nombre d'or de Léonard de Vinci qui régit les proportions les plusharmonieuses pour l'homme (l'existence du nombre avait été mise en évidence par Pythagore).

En abordant le thèmede l'harmonie, on est amené à penser qu'il y a bien l'existence d'une beauté objective.

Mais attention, ce n'est pascette beauté en elle-même qui est objective (ce serait une grosse erreur de penser ainsi) puisqu'elle est liée à uneexpérience esthétique particulière, mais bien l'harmonie.

Les plus belles œuvres d'ailleurs, sont très riches« mathématiquement » dans l'harmonie.

Or la précision mathématique que l'on retrouve dans certaines œuvres musicales par exemple, n'est passeulement le fait de l'homme, mais aussi celui de la nature chose plus étonnante.

Le corps des animaux suit d'ailleursun axe de symétrie pour l'apparence extérieure.

Ce dernier n'est cependant pas présent dans le corps, ce quisignifierait que la nature attache un soin particulier à la forme extérieur, à ce qui est visible et ne se préoccupe pasde l'intérieur.

La beauté naturelle se différencie donc des concepts humains.

Kant distingue ainsi ce qu'il appelle la« beauté libre » (pulchritudo vaga ) et la « beauté adhérente » (pulchritudo adhaerens ).

« La première ne présuppose aucun concept de ce que l'objet doit être ; la seconde suppose un tel concept et la perfection del'objet d'après lui » nous dit Kant.

En simplifiant, par beauté adhérente, il entend la beauté artistique pour autant qu'elle puisse encore se rattacher à une fin déterminée.

Par exemple une bouilloire en argent n'est pas jugée belleuniquement pour sa forme mais aussi pour son utilité, sa finalité définie.

Autre exemple, une église : sa beauté esttributaire de la fin de l'édifice, en tant que lieu de prière.

Quant à l'autre beauté, il dit que les « beautés libres […] ne se rapportent à aucun objet déterminé quant à sa fin par concept, mais qui plaisent librement et pour ellesmêmes ». Certains animaux peuvent ainsi être considérés comme des beautés libres.

Dès l'instant que nous entrons dans l'univers humain, la perception, insensiblement, devient utilitaire et est associée à une fin.

Kant dit à ce proposque la « beauté de l'homme […], d'un édifice […], suppose un concept d'une fin, qui détermine ce que la chose doit être et par conséquent un concept de la perfection ; il s'agit donc de beauté adhérente ». Le terme perfection s'entend ici dans le sens de Kant, c'est-à-dire comme conformité achevée à une norme.Ainsi, le jugement de goût, qui s'adresse à une beauté adhérente risque d'être impur puisqu'il est soumis au conceptde fin et de perfection qui lui est associé.

Le jugement esthétique ne peut donc rester pur qu'à l'égard de la beautélibre : « Dans l'appréciation d'une libre beauté (suivant la forme) le jugement de goût est pur.

On ne suppose pas le concept de quelque fin pour laquelle servirait les éléments divers de l'objet donné et que celui-ci devraitreprésenter » .

On peut retrouver des formes de beauté libres aussi dans l'art humain, à côté des représentations à caractère figuratif, avec l'exemple de la musique d'improvisation.

C'est seulement dans ce cas selon Kant que l'onpeut avoir de « libre beauté » dans l'art humain.

De la même manière, dans la beauté naturelle, la fin qui pourrait être représentée dans l'objet, est oubliée en faveur de la pure forme esthétique.

Kant à une expression très étrangepour dire cela, il parle de « finalité sans fin » .

Il est possible, en adoptant un point de vue objectif et scientifique de trouver une fin.

Or, la beauté ne peut-être l'objet d'une analyse, car l'analyse objective décompose et que toutedécomposition tue l'unité, et il n'y a pas de beauté sans le sens de l'unité (en fonction du concept d'harmonie que. »

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