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Quand nous jugeons un accusé à quel point de vue nous plaçons nous ?

Publié le 27/02/2008

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Un jugement collectif ? Remarquons d'emblée que la justice, telle que nous la connaissons aujourd'hui dans nos sociétés contemporaines, fut, dans l'histoire, l'objet d'une longue évolution, à la fois conceptuelle et structurelle. Débutons par l'exemple du procès de Socrate (Cf. Platon, Apologie de Socrate). Celui-ci fut accusé de corrompre la jeunesse athénienne et ensuite de l'inciter à renier les dieux. La sentence rendue ? la mort de Socrate ? est en fait un jugement collectif, jugement d'Athènes au nom de ses lois. Ce sont d'ailleurs des citoyens qui prononcent la sentence (Mélétos et Anytos). Nous avons ici l'illustration du jugement populaire sous les traits d'une accusation et d'un procès faits par les représentants de la citoyenneté athénienne, formant un tribunal populaire. Pour preuve ces propos attribués à Thésée par Euripide : « Ton discours, étranger, débute par l'erreur, et tu cherches à tort un roi dans cette ville, qui n'est pas au pouvoir d?un seul : Athènes est libre. Le peuple y règne ; tour à tour, les citoyens, magistrats annuels, administrent la cité.

« qui n'a jamais péché jette la première pierre ». Cet exemple montre que la foule est un « monstre sans tête » toujours prêt à juger à la hâte, dans l'ignorance et laviolence celui ou celle qui ne peut, dès lors, défendre son droit à un procès équitable basé sur la connaissance desfaits, la mesure et la patience.

Ce « nous » qui juge est en fait toujours trop prompt à juger et donc souventinfluencé par le « préjugé » et l'accusation infondée car ignorante des faits dans leur totalité.

Souvenons-nous deces femmes françaises que la F.F.I accusait hâtivement de collaboration – parce qu'untel avait dénoncé celle-ci oucelle-là – et qu'elle tondait sur la place publique pour l'humilier et la marquer.

Qui, en ces temps, pensa simplementqu'un amour sincère pu animer cette relation entre une femme et un homme de pays différents ? Qui pensa que telledénonciation pouvait provenir d'une affabulation, d'une jalousie, d'une vengeance ? Le « nous », opinion commune qui accuse et juge tel individu, est souvent à la merci du préjugé et donc n'est pasune instance véritablement capable d'un jugement « juste ».

Socrate renie ainsi les lois qui le jugent au nom de lajustice plus haute, qu'il représente fidèlement.

Les lois peuvent être injustes, notamment quand elles sont agitéespar une foule plus encline à la réaction passionnée, à la violence et à la vengeance qu'à l'exercice mesuré de lajustice (dont le symbole est la balance, outil de neutralisation des déséquilibres par la tendance à la la justeproportion !). Sur quelles valeurs peuvent donc légitimement se fonder une accusation et un jugement, collectifs, d'un individu ?Nous en remarquons trois : la religion et ses proscriptions (les dix commandements par exemple) la morale commune (qui se rapporte peu ou prou aux prescriptions et proscriptions religieuses) les « invariants culturels » (Cf.

Lévi-Strauss, Les Structures élémentaires de la parenté , dans lequel il distingue la « prohibition de l'inceste » comme élément universel, fondateur de la civilisation humaine) N'oublions cependant pas la Révolution française, acte de révolte que Kant décrit comme « devoir moral » du peuplecontre l'injustice de l'autorité royale.

C'est du point de vue moral, que Kant et Hegel ont légitimé, que le peuple àjugé, condamné et supprimé les lois injustes et asservissantes du pouvoir monarchique.

Le Mahatma Gandhi refusaitcependant, au nom d'une éthique de l' « Ahimsa » (non-violence), que la violence réponde à la violence et aurait, àce titre, condamné cet acte collectif révolutionnaire. Conclusion Un jugement collectif sur un individu accusé de crime ne peut se substituer à celui du juge, c'est la règle denotre droit contemporain.

Ce « nous » peut, certes, légitimement condamné en un sens moral tel agissementqui semble opposé à l'intérêt du bien commun.

Mais il ne peut condamner tel individu en un sens juridique etexécutif au risque de devenir lui-même injuste.

Le sens commun est le plus souvent rendu obsolète et injustepar la philosophie elle-même, se méfiant toujours de ce « monstre sans tête » qu'est le « nous ». La philosophie est justement cette activité qui cherche à discerner ce qui se cache derrière le « on », sesinauthenticités, ses opinions creuses et ses préjugés.

Le « nous », en effet, en renvoyant à tout le monde, nerenvoie à personne ! Un jugement doit être, pour être juste, assumé par une personne morale et/ou juridiqueprécise.

Cependant, force est de constater que la violence et l'injustice sont immédiatement condamnées parune nature humaine qui ne peut feindre de les ignorer sous peine de perdre sa propre humanité.

Celle-cis'exprime en outre le plus intelligemment lorsqu'elle parvient à ne pas jeter la première pierre et tâche de fairepreuve de discernement, de patience et de compassion.

C'est à ce titre et à ce point de vue qu'un début dejustice est alors envisageable.. »

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