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Que perdrait la pensée en perdant l'écriture ?

Publié le 27/02/2005

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La parole est fuyante alors que l'écriture fait perdurer au travers les âges la pensée et le savoir. Grâce au livre (support habituel et courant de l'écriture), un patrimoine se constitue et les encyclopédies en sont le précieux résultat. L'écrit tire même hors de l'oubli ce qui est destiné à la mort : les langues mortes continuent de vivre au travers des livres. L'écriture apporte donc le savoir, c'est un moyen culturel, un instrument de diffusion de la pensée. Il faut aussi se pencher sur l'acte d'écriture ; celui-ci pousse à la rigueur car la pensée intérieure, avant d'être couchée sur le papier, est fluctuante et désordonnée. Rien ne se construit seul et d'un premier jet. Pour se faire comprendre par l'écriture, il faut alors un effort de synthèse, de réorganisation de sa pensée. Ainsi, l'écriture dans son action même, amène à la ré-élaboration de la pensée : écrire c'est réfléchir. Ainsi, l écriture donne un sens organisé et profond. Ecrire est porteur de sens pour qui sait maîtriser l'art de l'écriture.

L'intérêt et l'utilité de l'écriture se trouvent au travers du livre : l'intellectuel est un gros consommateur de livres ; l'érudit, le savant ou encore l'homme cultivé sont plongés dans les livres. Etant donné qu'ils savent manier la pensée mieux que quiconque, il apparaît donc que l'écriture la serve grandement. De plus, toute écriture véhicule forcément de la pensée : roman, dictionnaire et même publicité, enseigne ou encore affiche. Il apparaît alors primordial de savoir ce que perdrait la pensée en perdant l'écriture. Il convient également de prendre en compte l'intitulé même du sujet : il ne s'agit pas seulement de l'écrit mais de l'écriture, c'est à dire de l'acte d'écrire. Il faudra donc réfléchir sur le rapport entre l'action d'écrire et la pensée.

« l'écriture devait faire en sorte de ne pas tromper le lecteur. 3) Si la pensée de Nietzsche prête à confusion et au contre-sens, n'est-ce pas dû avant tout à son style même ? Ses écrits relèvent de l'aphorisme, figure qui ne dit rien de précis, qui échappe à la systématisation.

Alors pour lesesprits peu attentifs et peu éclairés, l'erreur de compréhension est aisée.

Il y a donc un bon usage de l'écrit qu'ilfaudrait adopter pour être certain que la pensée soit bien comprise de tous. C'est ce que l'on retrouve dans les schémas, les organigrammes ou autres arborescences qui ont l'avantage dedécomposer dans l'espace et de clarifier la pensée.

Ne dit-on pas qu'un bon schéma vaut mieux qu'un longdiscours ? Ce type d'écrit développe une pensée visuelle qui est impossible à l'oral.

Aussi, Mendeleïev a-t-il permisde mieux maîtriser la pensée de la chimie grâce à sa classification sous forme de tableau des éléments chimiques.

Onpeut alors pousser l'idée à son extrême et faire référence au projet d'écriture idéale de Leibniz .

Grâce à des caractères universels, un alphabet des pensées simples, et des règles de connexion logique, on aboutirait à unepensée univoque où la mauvaise interprétation serait exclue. Cependant, réduire la pensée à la rigidité du calcul, n'est-ce pas tuer la pensée ? La pensée n'est-elle pas paressence équivoque en faisant ainsi sa richesse ? L'écriture, certes, est un gain pour la pensée mais pas n'importequelle écriture. On ne fait pas de philosophie, pas plus qu'on ne fait de mathématiques (ou n'importe quelle autre science), avec desimples paroles.

Et même si laphilosophie est née du dialogue, elle ne commence réellement qu'avec le texte écrit. Certes, on pourrait objecter à cette thèse le fait que Socrate, considéré dès l'Antiquité comme le véritable père dela philosophie, n'a pas écrit une ligne.

Mais on pourrait objecter à cette objection le fait que Socrate n'a pour nousd'existence philosophique qu'à travers les dialogues écrits de son disciple Platon.

Pareillement, ce sont les bons motset les anecdotes sur sa vie de clochard tels qu'ils nous ont été rapportés par Diogène Laêrce qui font à nos yeux lecaractère de philosophe de Diogène le cynique.Pourquoi la philosophie a-t-elle besoin de l'écriture? Parce que la pensée est captive de la parole, de ses hasards,de ses détours et de ses incertitudes.

Prisonnière aussi de la dimension affective de l'échange: dans le feu d'uneconversation, la rigueur n'est pas de rigueur.

On veut faire plaisir à l'interlocuteur ou bien, à l'inverse, le démolir.L'écriture donne à la pensée une forme objective (donc communicable au-delà de l'ici et du maintenant) etdéfinitive.

La parole, même maîtrisée, est toujours un peu irresponsable.

De plus, seule l'écriture peut donner à lapensée cette structure systématique sans laquelle il ne saurait y avoir proprement de philosophie.

Car s'il y eut desphilosophies contre le système (le scepticisme, l'empirisme), il n'y en eut pas en dehors du système. SUPPLEMENT: « Socrate : L'écriture, Phèdre, a un grave inconvénient, tout comme la peinture.

Les produits de la peinture sont comme s'ils étaient vivants ; mais pose-leur une question, ils gardent gravement le silence.

IL enest de même des discours écrits.

On pourrait croire qu'ils parlent en personnes intelligentes mais demande-leur det'expliquer ce qu'ils disent, ils ne répondront qu'une chose, toujours la même..

Une fois écrit, le discours roulepartout et passe indifféremment dans les mains des connaisseurs et dans celles des profanes, et il ne sait pasdistinguer à qui il faut, à qui il ne faut pas parler.

S'il se voit méprisé ou injurié injustement, il a toujours besoin dusecours de son père ; car il n'est pas capable de repousser une attaque et de se défendre lui-même.Phèdre : C'est également très juste.Socrate : Mais si nous considérions un autre genre de discours, frère germain de l'autre, et si nous examinionscomment il naît et combien il est meilleur et plus efficace que lui ?Phèdre : Quel discours ? Et comment naît-il ?Socrate : Celui qui s'écrit avec la science dans l'âme de celui qui étudie, qui est capable de se défendre lui-même,qui sait parler et se taire suivant les personnes.Phèdre : Tu veux parler du discours de celui qui sait, du discours vivant et animé, dont le discours écrit n'est àproprement parler que l'image ? » Platon.« Excellent ami! tu essaies de me réfuter par des procédés rhétoriques, semblables à ceux qu'on utilise dans lesassemblées.

Là un orateur croit réfuter son adversaire lorsqu'il peut produire contre lui en faveur de sa thèse destémoins nombreux et considérés, tandis que l'autre n'en a qu'un seul ou aucun.

Mais ce genre de démonstration n'aaucune valeur relativement à la vérité.

Il peut arriver en effet qu'un juste succombe sous des faux témoignagesnombreux et apparemment autorisés.

Et sur la question dont tu parles, à peu d'exceptions près, tu obtiendras. »

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