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Qu'est-ce que signifie ici que l'existence précède l'essence ? (Sartre)

Publié le 11/05/2005

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« Qu'est-ce que signifie ici que l'existence précède l'essence ? Cela signifie que l'homme existe d'abord, se rencontre, surgit dans le monde et qu'il se définit après. » L'homme, tel que le conçoit l'existentialisme, s'il n'est pas définissable, c'est qu'il n'est .d'abord rien. Il ne sera qu'ensuite et il sera tel qu'il se sera fait. Ainsi il n'y a pas de nature humaine, puisqu'il n'y a pas de Dieu pour la concevoir. » ... L'homme n'est rien d'autre que ce qu'il se fait. Tel est le premier principe de l'existentialisme... L'homme est d'abord ce qui se jette vers un avenir, et ce qui est conscient de se projeter dans l'avenir. » ... Si vraiment l'existence précède l'essence, l'homme est responsable de ce qu'il est. Ainsi la première démarche de l'existentialisme est de mettre tout homme en possession de ce qu'il est et de faire reposer sur lui la responsabilité totale de son existence. Et quand nous disons que l'homme est responsable de lui-même, nous ne voulons pas dire que l'homme est responsable de sa stricte individualité, mais qu'il f st responsable de tous les hommes. » Choisir d'être ceci ou cela, c'est affirmer en même temps la valeur de ce que nous choisissons, car nous ne pouvons jamais choisir le mal ; ce que nous choisissons c'est toujours le bien et rien ne peut être bon pour nous sans l'être pour tous. » (J.-P. Sartre, L'existentialisme est un humanisme)
Ce texte est extrait d'une conférence faite par J.-P. Sartre en 1945 au « Club maintenant « et récemment rééditée aux Éditions Nagel. Cette conférence reprenait sous une forme condensée et plus accessible les grands thèmes de l'Être et le Néant. Nous trouvons dans cet extrait la définition même de l'existentialisme sartrien.

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« prétendait que des gens opprimés se sont révoltés « parce » qu'ils étaient dans une « situation intolérable ».

Sartrefait remarquer qu'une situation n'est pas intolérable en soi, elle le devient parce qu'un projet de révolte lui a conféréce sens.

On aurait pu avec un autre projet considérer la situation comme une épreuve sanctifiante, commel'occasion bénie de se purifier et d'offrir ses souffrances à Dieu.

En projetant mes intentions, mes visées d'avenir surla situation actuelle, c'est moi qui, librement, transforme celle-ci en motif d'action.

Ce sont mes libres projets quidonnent une signification aux situations.

Le monde qui ne prend un sens que par référence à mes projets n'estjamais que le miroir de ma liberté.

Ce « dépassement » d'une situation présente par un pro-jet à venir c'est ce queSartre nomme transcendance.

Vers 1945 Sartre disait : « Nous n'avons jamais été plus libres que sous l'occupationallemande! » Cette affirmation paradoxale ne se comprend qu'à la lumière de la philosophie du pro-jet : Sartre veutdire évidemment qu'il appartenait à notre choix de faire de cette situation douloureuse l'occasion d'un héroïquecombat.Réfléchissons encore sur cette notion fondamentale de pro-jet.

Le temps humain inverse la direction du tempsnaturel.

Dans la nature c'est le passé qui détermine le présent et l'avenir.

Dans l'existence humaine c'est aucontraire le futur qui détermine et transforme le présent puisque des pro-jets guident sans cesse mes actions.Tandis que la chose est, l'homme ex-siste, c'est-à-dire échappe toujours à l'instant présent en se pro-jetant surl'avenir.

Etre libre c'est en ce sens « poser un état de choses idéal comme pur néant présent...

et poser la situationactuelle comme néant par rapport à cet état de choses ».

La réalité humaine est néant en ceci précisément qu'ellen'est pas mais sans cesse est à faire.

L'homme n'est rien que ce qu'il se fait.

On ne mérite pas d'être un stylo defeutre bleu ou un chat persan gris.

Mais on mérite d'être ou plutôt de devenir un homme (on retrouve ici leprogramme qu'il y a un siècle Jules Lequier traçait à la philosophie de la liberté : « Faire et en faisant se faire »).

Le« néant » chez Sartre n'est pas un constat nihiliste.

C'est en somme la catégorie de l'idéal et de la liberté.« ...

La première démarche de l'existentialisme est de...

faire reposer sur l'homme la responsabilité totale de sonexistence.

»Pour Sartre ma responsabilité est absolue.

Je suis par exemple responsable de mon caractère.

Vous êtes, disait déjàAlain, ce que vous avez juré d'être : « Le caractère d'un homme n'est que son serment.

» On objectera qu'il nedépend pas de moi d'être timide ou malade.

Mais prendre conscience de ces « déterminations » c'est les poser àdistance de moi.

Le Je qui dit « je suis timide » n'est plus tout à fait le moi qui est timide.

Et à supposer que je soismalade encore faut-il savoir ce que je ferai de ma maladie.

Tandis que le propre d'une chose est d'être ce qu'elleest, tout simplement, l'homme est ce qu'il n'est pas et n'est pas ce qu'il est.

Il est toujours, par ses projets au-delàde tout donné.Sujet en situation, toujours déjà « embarqué » comme disait Pascal, je ne puis jamais éluder le choix, je suis doncresponsable tout autant de mes abstentions que de mes actions.

Et ma liberté ne choisit pas seulement mes actes(comme dans la conception classique du libre arbitre); elle choisit encore les principes et les valeurs qui fondent lechoix.

C'est nous-mêmes qui inventons notre propre morale.Un ancien élève de Sartre était venu le consulter pendant l'occupation.

Devait-il rester en France pour travailler etfaire vivre sa mère sans ressources ou devait-il rejoindre en Angleterre les forces françaises libres du général deGaulle ? Vous seul, lui répondit Sartre, pouvez choisir vos valeurs.

Et quand bien même Sartre aurait fixé une lignede conduite, ce jeune homme n'avait-il pas manifesté un choix préalable en décidant de son directeur de conscience? C'est lui qui avait choisi de consulter un professeur de philosophie.

Il aurait pu choisir de consulter un prêtre et telprêtre plutôt que tel autre (par exemple un prêtre partisan du combat ou bien un prêtre partisan de la capitulation).Au fond nous choisissons seuls.

Aucune morale ne peut décider pour nous d'avance.

Notre responsabilité est totale....

Choisir d'être ceci ou cela, c'est affirmer même en temps la valeur de ce que nous choisissons, car nous nepouvons jamais choisir le mal ; ce que nous choisissons c'est toujours le bien.

» Philosophie de la responsabilitéabsolue l'existentialisme sartrien n'est pas une philosophie de la culpabilité.

Les philosophies traditionnelles du librearbitre accordent à l'homme la possibilité de pécher, car dans ces philosophies, précisément, l'homme n'estresponsable que de ses actes ; il est I' « inventeur » de ses actes mais ses actes seront jugés par référence à desvaleurs que l'homme n'a pas, elles, inventées, et qui représentent un ordre transcendant.

Chez Sartre, au contrairela liberté qui pose mes actes pose en même temps mes valeurs.

En même temps que je choisis « d'être ceci ou cela» j'affirme « la valeur » de ce que je choisis.

Inventeur tout à la fois de l'acte et de la valeur au nom de laquelle jepose l'acte, je ne peux moi-même me vouloir « méchant », ennemi de ma propre valeur.

Dans ce cas, dit Sartre dansl'Être et le Néant, il faudrait, contradictoirement que « je veuille le contraire de ce que je veux dans un mêmemoment et sous le même rapport, c'est-à-dire que je me haïsse moi-même en tant précisément que je suis moi-même.

Et pour réaliser pleinement...

cette essence de la méchanceté il faudrait que je m'assume comme méchant,c'est-à-dire que je m'approuve par le même acte qui me fait me blâmer ».

Sartre a écrit une préface de mille pagesaux OEUVRES complètes de Jean Genet, le voleur-poète, l'homme qui a tenté l'impossible gageure d'être un méchantvolontaire! Genet rejette les valeurs des honnêtes gens et se veut truand résolu.

Mais alors, pour être méchant, illui faut bafouer les nouvelles valeurs qu'il vient de choisir.

Il trahit donc la loi du milieu et donne ses amis à la police!Il rejoint donc les valeursavait d'abord rejetées.

Le mal pur se révèle à l'usage d'une pratique impossible : « La trahison c'est le mal qui se faitmal à lui-même ; deux négations ne valent pas une affirmation ; elles se perdent, lovées l'une à l'autre dans la nuitdémente du non.

» Sartre rejoint donc, par des voies imprévues, le maître mot de Socrate : « Nul n'est méchantvolontairement.

»Dans ces conditions, en stricte doctrine, un existentialiste devrait s'interdire de juger autrui.

Et pourtant Sartreparle des « lâches » et des « salauds ».

Mais précisément les « lâches » et les « salauds » commettent une sorted'erreur métaphysique.

Ils sont inauthentiques.

Le lâche est celui qui, se cherchant toujours des excuses, semasque à lui-même cette liberté absolue qui caractérise la condition humaine.

Le « salaud » est ce « gros pleind'être » qui se dissimule à lui-même que l'homme est existence et non essence, qui s'attribue une « essence », quis'arroge quelque supériorité « de droit », qui tel le raciste se prétend supérieur par essence, par nature à d'autreshommes.. »

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