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Qu'est ce qui distingue la création technique de la création artistique ?

Publié le 05/01/2005

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technique
    I)                   L'artiste est avant tout un technicien   -          Tout artiste est d'abord un technicien. D'une part, un peintre, par exemple utilise des techniques enseignées aux beaux-arts pour réaliser sa toile, comme la perspective. Toute activité artistique nécessite un savoir-faire, une méthode qui mobilise à la fois des connaissances théoriques et pratiques. Ceci implique que l'artiste connaisse les règles et techniques de production, ainsi qu'une certaine expérience, habileté dans leur mise en oeuvre. La plus ou moins grande maîtrise dans le savoir-faire est donc toujours particulière à un producteur donné. Le savoir faire permet ainsi d'identifier un artiste ou un courant artistique. Il est en effet possible de dater une oeuvre, l'attribuer à un artiste ou à une époque spécifique de l'histoire de l'art grâce à la reconnaissance du type de technique employée. -          D'autre part le grand artiste invente sa technique comme il inventerait une langue originale. Cézanne par exemple a créé sa propre technique en effectuant un travail sur la couleur. Le savoir faire fournit ici un critère pour apprécier la valeur d'un artiste en le distinguant.

HTML clipboardLe problème est donc de savoir quelle est la légitimité d'une telle séparation : sur quel(s) critère(s), en effet, pourrons-nous nous appuyer pour distinguer l'Art entendu comme production du beau (nous l'écrirons, en ce sens, avec une capitale) de l'art qui ne relèverait que de la technique ?

technique

« seulement « la façon de réussir la production » ne peut être « démontrer scientifiquement », mais de plus « elle ne peut être décrite ». « Les beaux-arts sont les arts du génie...

» KANT. Le terme « art » a pendant toute l'Antiquité et le Moyen Age, simplementdésigné la forme de la production artisanale.Ainsi, Platon oppose la « theôria », connaissance purement contemplative, ausavoir-faire lié à la production matérielle (« technè »).

Cette dernièreconcerne la production et se définit comme création:« Ce qui, pour quoi que ce soit, est cause de son passage de la non-existence à l'existence, est, dans tous les cas, une création; en sorte quetoutes les opérations qui sont du domaine des arts sont des créations, et quesont créateurs tous les ouvriers de ces opérations.» (« LE Banquet »).C'est pourquoi, pour Platon, les artisans sont tous poètes.

En effet, «poésie»signifie étymologiquement «faire», ce qui consiste essentiellement à faire êtrece qui n'était pas, c'est-à-dire à créer.Si la technique (ou l'art) est création, elle porte sur le contingent, c'est-à-dire sur ce qui peut aussi bien être que n'être pas.

C'est en cela que latechnique (ou l'art) s'oppose à la science.

Cette dernière porte, en effet, surdes essences idéales, c'est-à-dire éternelles et immuables.

On comprend, dèslors, que Platon, reconnaissant la fonction sociale de la technique, ne luiaccorde aucune valeur humaine.

Insensible à la beauté de l'Acropole, il nesemble voir de la beauté que dans la nature (les beaux corps des jeunesgarçons), dans la morale (les belles actions), dans les sciences (mathématiques et philosophie).C'est à partir du XVIIIE siècle que l'art se distingue aussi bien de l'artisanat que de la technique et acquiert ainsi unstatut spécifique.

D'où l'apparition de l'esthétique comme théorie des beaux-arts.

Et, dans la Critique de la facultéde juger (1791), Kant, même s'il ne prétend pas faire une théorie des objets beaux (car, selon lui, le beau n'est pasune qualité des objets : il n'y a pas de règle du beau ni donc de science du beau), affirme qu'il n'existe pas de bellessciences, mais seulement des beaux-arts.

Il accorde même, d'une ..

certaine manière, une supériorité à l'art sur lessciences et la technique, puisqu'il considère qu'il n'y a de génie que dans les Beaux-Arts : «Les Beaux-Arts sont lesarts du génie.

»Dans la civilisation artisanale, l'artiste, qu'il bâtisse et orne les lieux du culte ou qu'il décore les palais, était auservice de la religion ou des princes.

Le développement de l'industrie permet à l'art de s'émanciper.

Désormaisindépendant, l'artiste découvre qu'il ne tient pas son pouvoir de créer de Dieu, mais que celui-ci lui appartient enpropre.

C'est ce pouvoir de créer qui, d'une certaine manière, rend l'artiste égal à Dieu, qu'on appelle le génie.Application de la science, la technique repose sur une méthode scientifique précise dont toutes les démarches sonttransmissibles, renouvelables.

Même les techniques les plus complexes peuvent être décomposées, analysées dansleurs moindres détails, et réduites à des gestes simples.

Il suffit généralement de savoir ce qu'il faut faire pourréussir.

Quant à l'artisanat, il ne requiert aucune faculté d'invention ou génie particulier.

Seul l'art, qui repose sur lafantaisie créatrice de l'artiste, demande autre chose que « l'aptitude à savoir faire ce qui peut être appris d'aprèsune règle quelconque ».

Les Beaux-Arts doivent donc nécessairement « être considérés comme des arts du génie ».Que faut-il entendre par génie sinon « un talent qui consiste à produire ce dont on ne saurait donner aucune règledéterminée » ? Certes, l'art, comme toute production, exige des règles, mais celles-ci ne préexistent pas à l'œuvre.Aussi le génie peut-il être défini plus précisément comme le talent naturel de « donner des règles à l'art ».

Il n'obéitdonc qu'aux règles qu'il se donne à lui-même.

Et puisque « le talent comme faculté productrice innée de l'artiste,appartient lui-même à la nature, on pourrait également s'exprimer ainsi: le génie est la disposition innée de l'esprit(ingenium) grâce à laquelle la nature donne des règles à l'art ».Sans doute doit-on trouver dans les produits de l'art « toute la ponctualité voulue dans l'accord avec les règles,d'après lesquelles seul le produit peut être ce qu'il doit être »; mais cela ne doit cependant pas être pénible« Il ne faut pas que le produit laisse transparaître la forme de l'école, c'est-à-dire qu'il porte trace apparente quel'artiste a eu la règle sous les yeux et que celle-ci a imposé des chaînes aux facultés de son esprit.

» Le génie doit donner l'impression de produire avec la même facilité et spontanéité que la nature.

Cependant l'art,contrairement à la nature, a toujours « l'intention de produire quelque chose ».

Mais si la finalité est intentionnelledans les produits des Beaux-Arts, elle ne doit pas le paraître, c'est-à-dire que « l'art doit avoir l'apparence dé lanature, bien que l'on ait conscience qu'il s'agit d'art ».Le naturel dans l'art est donc le génie produisant comme la nature, sans règle préétablie.

Il s'ensuit que la premièrequalité du génie doit être l'originalité.

Comme l'absurde ou l'insensé peut aussi passer pour de l'originalité, il faut queles produits du génie « soient en même temps des modèles, c'est-à-dire qu'ils soient exemplaires ».

Le génie estdonc aussi originaire.

Autrement dit, il doit être à l'origine d'une école à laquelle il transmet les diverses règles et lesprocédés de son art.Ainsi, le génie se distingue aussi bien de la simple imitation scolaire (l'élève qui reprend le procédé d'un maître pourlui-même, indépendamment de ce qu'il exprimait dans l'œuvre et sans lui donner une nouvelle signification) que dumaniérisme, cette «forme de singerie qui consiste à n'être personnel (singularité) que pour tâcher de s'éloigner leplus possible des imitateurs, sans posséder le talent d'être en même temps un modèle ».Tout artiste, au fond, commence par le pastiche, et s'éveille à son propre génie au contact des œuvres de sesprédécesseurs.

De l'imitation scolaire se distingue « la filiation qui se rattache à un prédécesseur sans l'imiter ».. »

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