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RELATIVITÉ DES PLAISIRS ET DES PEINES

Publié le 16/03/2011

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   L'aspect représentatif qui nous permet de reconnaître l'objet est à peu près stable (nous verrons qu'il n'est pas lui-même tout-à-fait exempt de relativité). Que je sois affamé ou rassasié, je reconnaîtrai la pomme à sa couleur, sa forme, sa saveur... Au contraire, l'aspect affectif est éminemment instable parce qu'il exprime la valeur variable de l'objet pour le sujet et qu'il dépend donc de l'état du sujet.

« donner un peu d'illimité à ce qui nous est donné comme limité. Il y a des limites; où sont-elles? Il faut essayer de les dépasser pour les connaître pratiquement et nonthéoriquement.

Nous ne connaîtrons les limites qu'en étant arrêtés par elles, donc en cherchant à les dépasser. Il faut voir que la morale de l'instant ou du plaisir n'est pas naturelle : le donjuanisme manifeste le plus souvent leressentiment d'un être qui, n'ayant jamais été vraiment aimé, veut ridiculiser l'amour : il est adopté par vengeance,par système et non pas spontanément. Quels sont les rapports du bonheur et de la joie? La joie est avant tout liée à l'ouverture sur l'avenir : elle est lesentiment du futur qui s'ouvre devant nous et qui nous appelle.

Un exemple simple : l'homme qui gagne le gros lotéprouve une joie due au sentiment de possibilités nouvelles — parfois illusoires — qui s'ouvrent devant lui; il penseque l'avenir s'ouvrira plus largement que le présent.

Autre exemple : il y a de la joie à sauver quelqu'un qui se noie,parce qu'on lui rend son avenir.

La joie diffère donc du contentement qui implique l'idée de fermeture.

On a parlé dela joie des saints et des héros dans le martyre; c'est bien en raison de l'avenir, du sentiment que la mort consentiedébouche sur l'éternité et constitue un témoignage, pour l'avenir humain, de la force de la cause servie par lemartyr.

La joie est donc le recul de l'horizon, l'ouverture de perspectives illimitées; elle est liée à l'espérance, maiselle est immédiate : elle se produit au moment où ce qui était fermé s'ouvre, où les barrières sont dépassées. C) Adaptation Plaisirs et peines subissent des phénomènes d'adaptation liés à l'habitude : l'action continue ou répétée d'unstimulant à valeur affective prononcée tend en général à affaiblir cette valeur et même à la supprimercomplètement. 1° Le plaisir s'émousse, s'use quand il perd sa nouveauté.

De là le besoin de renouvellement si caractéristique danstoute recherche du plaisir.

Exemple culinaire : un renouvellement du menu est essentiel au plaisir de la table.Exemple de la mode vestimentaire.

L'art, lui aussi, est voué au renouvellement, car il est avant tout un plaisir.

C'estparce que la composante de plaisir est essentielle dans l'art (« la grande règle de toutes les règles est de plaire »disaient même les Classiques) que l'art doit être renouvelé.

Il appartient donc à l'essence de l'art qu'il y ait desmodes artistiques. 11 se produit dans le domaine de l'art une satiété psychique analogue à la satiété engendrée par un aliment spécial;à ce moment un autre aliment peut être encore désiré et pris avec plaisir.

D'ailleurs, le plaisir usé par la répétitionpeut récupérer son énergie si l'objet se représente après un intervalle suffisant pour permettre au besoin spécial dese reconstituer.

Si on ne se blase pas sur l'intérêt d'une chose, c'est donc soit parce que le rythme de son usagerépond au rythme du besoin spécifique, soit parce que cette chose est assez variée, assez complexe pour révélerprogressivement de nouveaux aspects.

Les grandes œuvres d'art, les affections répondant à des besoins multiples,les idéals supérieurs échappent à la monotonie.

Enfin dans tous les plaisirs qui comportent un élément intellectuel —c'est-à-dire tous les plaisirs véritablement humains — le renouvellement devient essentiel, car le même objet nepeut évidemment provoquer deux fois de la même manière le plaisir de résoudre le problème, d'inventer, de créer :l'activité intellectuelle tend toujours à se dépasser elle-même.

Tout objet qui est en partie intellectuel peut éviterde nous blaser si nous savons varier l'aspect sous lequel nous le considérons, au lieu de varier les objets eux-mêmes.

C'est vrai des œuvres d'art et plus encore des êtres : car les êtres changent, ils nous offriront des plaisirset des émotions différents tout en gardant une certaine unité qui leur est propre. 2° Une adaptation se produit aussi pour les situations d'abord désagréables : on s'y habitue, on s'y endurcit; on sefait à tout, dit-on, on finit par supporter avec indifférence et même par ne plus sentir ce qu'au premier contact onjugeait intolérable. Mais le phénomène inverse existe aussi : dans certains cas l'adaptation ne se fait pas quand le contact avec ledésagréable a entraîné une dépense d'énergie trop forte et irrécupérable; il y a des souffrances auxquelles on nes'adapte pas, des coups dont on ne se remet pas.

La peine qu'on ne surmonte pas grandit : ce qui était désagréabledevient odieux; il y a sommation des effets (peines et douleurs).

La répétition des chocs affectifs qui produitnormalement une immunité émotionnelle, produit ici une diminution de résistance (Cf.

dans le domaine médical lesphénomènes d'anaphylaxie.) L'affaiblissement ou le renforcement du caractère pénible de la situation paraît en rapport avec le fait qu'on réussitou qu'on échoue à éliminer les perturbations fonctionnelles que cette situation provoque — comme l'organismeneutralise l'effet du poison dans la mithridatisation.

Le signe de la valeur affective dépend en effet de cetteadaptation finale.. »

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