Devoir de Philosophie

Texte de Hegel sur le devoir de bienfaisance

Publié le 09/11/2012

Extrait du document

hegel

 

 

 

 

«  Il est des devoirs qui ne découlent pas du droit d'autrui, par exemple le devoir de bienfaisance. Le malheureux n'a, pour ce qui est de lui, de droits sur ma bourse que dans la mesure où il suppose que c'est moi qui me ferais un devoir d'assister les malheureux; quant à moi, mon devoir ne se fonde pas sur son droit : son droit à la vie, à la santé, etc., ne concerne pas des individus mais l'humanité en général (le droit de l'enfant à la vie concerne les parents) et ce droit impose à l'État, ou tout simplement à ses proches, et non à l'individu, le devoir de l'entretenir. (Quand on prétend demander à quelqu'un d'aider à lui seul un pauvre, il répond souvent par une échappatoire : il ne sait pourquoi ce serait lui, un autre le pourrait tout aussi bien que lui. Il y consent plus volontiers sous forme de contribution partagée avec d'autres, d'une part, naturellement, parce que ainsi il n'a pas à supporter la totalité de la dépense, mais, d'autre part, parce qu'il sent bien que ce devoir n'incombe pas à lui seulement, mais également aux autres.) C'est en ma qualité de membre de l'État que le pauvre doit exiger de moi l'aumône comme un droit, mais ici il formule son exigence de manière immédiate alors qu'il devrait le faire par l'intermédiaire de l'État. «

 HEGEL, Principes de la philosophie du droit, trad. A. Kaan, Paris, Gallimard, 1940, § 242.

Qu’est-ce que l’aumône ? Qu’entendre vraiment par « devoir de bienfaisance « ? Ces questions portent sur le rapport entre la morale, le droit, le devoir et l’État. Hegel montre que la bienfaisance ne saurait résulter d’un supposé droit du pauvre sur les biens d’autrui. Le droit des indigents ne s’exerce qu’au niveau de la communauté concrète par opposition à la notion abstraite d’État. L’État en sa réalité concrète doit prendre en charge l’assistance des démunis. En quoi le devoir de bienfaisance émane-t-il de l’État ? Ne doit-il pas relever de la tâche de chacun d’entre nous ? Mais quelle est la valeur et quelles sont les limites de cette assistance organisées par l’État ? 

hegel

« parle d’un « droit à la vie ».

Ainsi, le pauvre a droit à la santé et à tout ce qui est nécessaire pour vivre.

Ce qui fait partie des droits de l’homme, de chaque homme.

Ce droit s’e xerce eu égard à la communauté.

Si le pauvre a droit à la vie, ce la veut dire que la vie du pauvre est un de voir pour les autres.

Le droit du pauvre s’ exerc e donc vis -à -vis de l’homm e e n général, de la communauté humaine.

On peut ainsi tracer autour de chaque individu une série de cercles conc entriques, représentant autant de communautés, de la plus p etite à la plus grande, dans lesquelles l’individu e st inséré : famille, colle ctivité locale, communauté politique, huma nité universelle.

Le devoir d’assi stance se s’applique à l’individu que comme me mbre d’un corps politique.

Le pauvre est alors pris en charge par la famille, le clan, le village.

Il l’est en enfin e t surtout par l’État : celui - ci prélève des impôts sur les citoyens et en redistrib ue une par tie aux indigents.

(R.M.I.) C’ est l’admin istration qui r edistribue l’arg ent issu de l’impôt à c eux qui répondent aux critèr es requis pour recevoir l e R.M.I Hegel propose de remplacer la charité privée par une assistance organisée par l’État, la mendicité étant remplacée par des démarches auprès de l’administration compétente.

Donc, pour Hegel, refus er de fair e l’aumône n’est pas pr euve d’égoïsme ou d’avarice : il y aurait dans cette attitud e le pressentiment du caractèr e collectif du d evoir à l’égard des pauvres.

Comment l’État peut -il libérer chacun d’entre nous de l’asservissement à son bienfaiteur ? Il est e nt endu que l’aumône asservit ce lui qui la reçoit.

M êm e si le pauvre n’a aucun droit sur moi, et si je n’ai pas de de voir part iculier à son égard, tout geste de bi enfaisance individuelle est-il pour autant condamné ? Heg el n e dit rien d e te l.

Tout efois, à la lumière du texte, on peut compr endre les limites de la générosité priv ée.

Si le pauvre n’a aucun droit sur moi, c’est donc libr em ent que je lui viens en aide.

Autant dir e que pour sa vie et sa mort, il dépend du bon vouloir de ceux qui l’assi ste nt.

Nous voyons que la charité asservit les indi vidus les uns aux autres.

C’ est encore plus flagrant quand un riche fait vivre s es « pauvres » : quand la vie d’un homme dépend du bon sentiment d’un autre, qu’y a -t- il sinon de l’esclavage ? Si le don est gratuit, ne répondant à aucun devoir, je dépends de la bonne volonté d’autrui.

Je ne veux donc pas reconquérir l’indépendance que je perds qu’en faisant à mon tour un don à celui qui m’a donné.

Ainsi, dans le don, je ne suis pas seulement tributaire de la volonté d’autrui, mais je suis placé en position d’infériorité : je suis redevable, obligé.

Or, précisément, le pauvre n’a pas les m oyens de s’acquitter de sa dette.

Il ne peut s’en acquitter qu’en vouant une reconnaissance éternelle à son bienfaiteur, par quoi il accentue encore sa dépendance.

Nous découvrons donc à quel point l’exercice de la bienfaisance est délicat.

Elle risque tou jours d’être humiliante ; elle doit se cacher : on fait passer le geste gratuit pour un dû ou pour un service anodin – « que ta main gauche ignore ce que fait ta main droite », dit l’Évangile selon saint Matthieu (VI, 3 -4) au sujet de l’aumône.

Cette dépendance d’individu à individu disparaît quand l’État s’occupe d’assister les pauvres.

Non seulement le bienfaiteur est libéré des sollicitations du pauvre, mais ce dernier est délivré de l’emprise de son bienfaiteur.

D’abord, parce qu’il n’est plus asser vi à une ou plusieurs personnes particulières.

Ensuite parce que ce qui est à l’échelle privée était un geste de générosité, devient, au niveau de l’État, un acte de justice.

Pour Hegel, l’assistance des pauvres par l’État n’est pas un acte apparenté à la charité d’un individu.

Il s’agit d’un devoir qui répond au droit des pauvres à l’existence.

D’une manière générale, nous comprenons que l’instauration d’un État substitue à l’arbitraire des relations particulières des rapports réglés sur le droit et la justice.

Ainsi, à la vengeance de celui qui veut régler ses comptes personnellement, la médiation des institutions (force de l’ordre, tribunaux, prison,…) substitue des rapports de justice.

De même, cette autre forme d’arbitraire qu’est la largesse est remplacée par des rapports fixés par le droit.

Comment l’État doit- il lutter contre les mécanismes qui engendrent la pauvreté ? Loin de mini miser le rôle de l’État, on doit plutôt l’accroître.

La fonction de la communauté politique n’est pas. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles