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Texte de Hume : La critique du cogito cartésien

Publié le 16/01/2014

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hume

 

« Il est des philosophes qui imaginent qu’à tout instant nous sommes intimement conscients de ce que nous appelons notre moi, que nous sentons son existence et sa continuité dans l’existence, et que nous sommes certains, par une évidence plus claire que celle de la démonstration, de sa parfaite identité et de sa parfaite simplicité.

Pour ma part, quand je pénètre au plus intime de ce que j’appelle moi, je tombe toujours sur telle ou telle perception particulière, de chaud ou de froid, de lumière ou d’ombre, d’amour ou de haine, de douleur ou de plaisir. À aucun moment je ne puis me saisir moi sans saisir une perception, ni ne puis observer autre chose que la dite perception. Quand pour un temps je n’ai plus de perceptions, dans un profond sommeil par exemple, je cesse d’avoir conscience de moi-même pendant ce temps ; et on peut dire vraiment que je n’existe pas. Et si j’étais privé par la mot de toute perception et que je pusse ni penser ni sentir, ni voir, ni aimer, ni haïr après la dissolution de mon corps, alors je serais entièrement réduit à rien et je ne vois pas ce qu’il faudrait de plus pour faire de moi un parfait néant […].

[J’]ose affirmer du reste des hommes qu’ils ne sont rien d’autre qu’un faisceau ou une collection de différentes perceptions qui se succèdent les unes les autres avec une inconcevable rapidité et qui sont dans un perpétuel flux et mouvement. Notre œil ne peut tourner dans son orbite sans varier nos perceptions. Notre pensée varie encore plus que notre vue ; et tous nos autres sens, toutes nos autres facultés participent à ce changement ; et il n’y a pas un seul pouvoir de l’âme qui demeure le même un seul moment ou presque, sans se modifier. L’esprit est une sorte de théâtre où diverses perceptions font successivement leur apparition ; elles passent, repassent, se perdent, et se mêlent en une variété infinie de positions et de situations. Il n’y a en lui proprement ni simplicité à un moment, ni identité dans des moments différents, quel que soit notre penchant naturel à imaginer cette simplicité et cette identité. La comparaison avec le théâtre ne doit pas nous égarer. Les perceptions successives sont seules à constituer l’esprit ; et nous n’avons pas la moindre notion du lieu où ces scènes sont représentées ni des matériaux dont il est constitué. «

 

Hume, Traité de la nature humaine, I, IV, VI, §§1-6, traduction de Michel Malherbe

 

 

 

Qu’est-ce que le moi ? Le moi s’identifie-t-il à la conscience comme le soutient Descartes ? Plus profondément demander : Qu’est-ce qui assure la permanence, l’identité et l’unité du divers de mes représentations ? Peut-on parler d’un subjectum, d’une substance spirituelle qui supporterait la multiplicité de nos perceptions de notre existence psychique ?

 

La critique de Hume s’attaque implicitement au cogito cartésien. On se souvient que Descartes, dans le Discours de la méthode (IV) fait apparaître le premier principe de la philosophie : je ne suis rien d’autre qu’une chose qui pense, une res cogitans. Le cogito, « Je pense donc je suis «, mieux dira Descartes, « Je suis, j’existe « (ego sum, ego existio), est la vérité du moi. Que suis-je moi ? Je suis un être pensant et le corps n’est qu’une contingence. Je suis une pensée et j’ai un corps. Mais interroge Hume : comment savoir que derrière chacune de mes représentations se tient un moi pensant ? N’est-ce pas là une hypothèse gratuite, le fruit de l’imagination ? Car où et comment trouver ce principe spirituel qui ferait de moi une unité alors que je n’éprouve que de multiples sensations ? De ce passage critique, la thèse humienne s’en détache : à proprement parler le moi n’existe pas ! L’homme ne peut que ressentir des sensations, des émotions, des passions. 

hume

« Qu’est-ce que le moi ? Le moi s ’identifie-t- il à la conscience comme le soutient Descartes ? Plus profondément demander : Qu’est-ce qui assure la permanence, l’identité et l’unité du divers de mes représentations ? Peut-on parler d’un subjectum , d’une substance spirituelle qui supporter ait la multiplicité de nos perceptions de notre existence psychique ? La critique de Hume s’attaque implicitement au cogito cartésien.

On se souvient que Descartes, dans le Discours de la méthode (IV) fait apparaître le premier principe de la philosophie : je ne suis rien d’autre qu’une chose qui pense, une res cogitans .

Le cogito, « Je pense donc je suis », mieux dira Descartes, « Je suis, j’existe » ( ego sum, ego existio) , est la vérité du moi.

Que suis -je moi ? Je suis un être pensant et le corps n’est qu’une contingence.

Je suis une pensée et j’ai un corps.

Mais interroge Hume : comment savoir que derrière chacune de mes représentations se tien t un moi pensant ? N’est-ce pas là une hypothèse gratuite, le fruit de l’imagination ? Car où et comment trouver ce principe spirituel qui f erait de moi une unité alors que je n’éprouve que de multiples sensations ? De ce passage critique, la thèse humienne s’en détache : à proprement parler le moi n’existe pas ! L ’homme ne peut que ressentir des sensations, des émotions, des passions.

La question de fond est de savoir d’où vient la matière de la pensée ? Provient-elle de notre réalité spirituelle ou de l’ expérience, du vécu ? Si pour Descartes, les idées et les impressions des sens trouvent leur seule origine dans l’esprit, dans la pensée ; pour Hume, tout découle de la seule expérience.

La polémique s’instaure dès lors au niveau de la connaissance à deux endroits : de la source du savoir et de la manière de vérifier la véracité d’une hypothèse.

Dans l’optique du rationalisme cartésienne, la raison est l’origine du savoir et n’est vrai que ce qui fait l’objet d’une démonstration.

En revanche, pour l’empiris me humien, la connaissance se fonde sur le vécu, sur la méthode expérimentale et ne reçoit se validité que par le recours aux faits.

Le ton de la critique acerbe s’initie par le soupçon que « certains philosophes », c’est -à -dire les rationalis tes et plu s singulièrement les cartésiens, d’« imaginer » l’existence du moi est sous -tendue par un un moi profond compris comme substance pensante qui « à tout moment » garantirait le sens intime de ce que nous sommes.

Cette hypothèse métaphysique prétend donc comprendre quatre phénomènes : la permanence de la conscience intime du moi, la continuité de l’existence, de son identité et enfin de sa « simplicité parfaite ».

En effet, dans le cartésianisme, la conscience de soi est la connaissance de soi.

La conscience immédiate, intuitive du sujet est une idée claire et distincte.

Elle est une évidence, c’est- à-dire ce que je ne peux pas ne pas voir.

Dans la Seconde Méditation des Méditations Métaphysiques , Descartes met en place la méthode : dout er absolument de tout pour tout savoir absolument.

Le doute hyperbolique s’appuie sur l’hypothèse d’un dieu trompeur, d’un « malin génie » qui s’évertuer ait à me tromper incessamment sur ma propre existence.

Mais cette hypothèse d’être le jouet du dieu trompeur se retourne cont re elle -même.

Car pour être trompé encore faut -il que j’existe.

Même si je suis dans l’erreur, il n’en demeure pas moins que je suis, que j’existe.

C’est pourquoi Descartes au terme d’une « intuition rationnelle » qui n’es t pas une démonstration, peut affi rmer cette première vérité : « je doute, je suis ».

Cette première vérité est double : elle affirme comme indubitable que j’existe, mais aussi que ma nature, ce que je suis, n’est autre qu’une « chose pensante ».

J’existe donc pour autant qu’il est de mon essence d’être un être pensant.

Cette substance pensante assure, outre mon existence, la continuité de mon être puisque je suis permanent à mon être, mais aussi l’identité — je suis constamment identique à moi- même quelque soit la pluralité de mes impressi ons et de mes idées.

Ce qui dans le même mouvement affirme mon unité, je forme un seul tout.

Je suis une conscience d’être une conscience.

D’autres cartésiens comme Malebranche dans La Recherche de la vérité de défendre la thèse d’une connaissance de notr e existence et de ses qualités par le sentiment de soi.

Locke, quant à lui, dans Les. »

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