Texte Rousseau
Publié le 05/01/2013
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«
Rousseau : langage
Quand les enfants commencent à parler, ils pleurent moins.
Ce progrès est naturel : un langage est substitué à
l’autre.
Sitôt qu’ils peuvent dire qu’ils souffrent avec des paroles, pourquoi le diraient-ils avec des cris, si ce n’est
quand la douleur est trop vive pour que la parole puisse l’exprimer ? S’ils continuent alors à pleurer, c’est la faute
des gens qui sont autour d’eux.
Dès qu’une fois Émile aura dit : J’ai mal, il faudra des douleurs bien vives pour le
forcer de pleurer.
Si l’enfant est délicat, sensible, que naturellement il se mette à crier pour rien, en rendant ces cris inutiles et
sans effet, j’en taris bientôt la source.
Tant qu’il pleure, je ne vais point à lui ; j’y cours sitôt qu’il s’est tu.
Bientôt
sa manière de m’appeler sera de se taire, ou tout au plus de jeter un seul cri.
C’est par l’effet sensible des signes
que les enfants jugent de leur sens, il n’y a point d’autre convention pour eux : quelque mal qu’un enfant se fasse,
il est très rare qu’il pleure quand il est seul, à moins qu’il n’ait l’espoir d’être entendu.
ROUSSEAU, Émile , II
Raisonner avec les enfants était la grande maxime de Locke ; c’est la plus en vogue aujourd’hui ; son succès
ne me paraît pourtant pas fort propre à la mettre en crédit ; et pour moi je ne vois rien de plus sot que ces enfants
avec qui l’on a tant raisonné.
De toutes les facultés de l’homme, la raison, qui n’est, pour ainsi dire, qu’un composé
de toutes les autres, est celle qui se développe le plus difficilement et le plus tard ; et c’est de celle-là qu’on veut se
servir pour développer les premières ! Le chef-d’œuvre d’une bonne éducation est de faire un homme raisonnable :
et l’on prétend élever un enfant par la raison ! C’est commencer par la fin, c’est vouloir faire l’instrument de
l’ouvrage.
Si les enfants entendaient raison, ils n’auraient pas besoin d’être élevés ; mais en leur parlant dès leur
bas âge une langue qu’ils n’entendent point, on les accoutume à se payer de mots, à contrôler tout ce qu’on leur dit,
à se croire aussi sages que leurs maîtres, à devenir disputeurs et mutins ; et tout ce qu’on pense obtenir d’eux par
des motifs raisonnables, on ne l’obtient jamais que par ceux de convoitise, ou de crainte, ou de vanité, qu’on est
toujours forcé d’y joindre.
- 2 -.
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