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Toute prise de conscience est elle libératrice ?

Publié le 22/02/2012

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conscience
Celui qui agit de manière inconsciente , et qui est incapable de savoir ce qu'il fait, peut facilement être conduit à des actions dangereuses, pour lui ou pour les autres. Il dépend de forces impulsives qui peuvent le mener n'importe où, et qui suppriment ses choix volontaires possibles. Au contraire, la prise de conscience de soi-même, et de ses actions, permet d'en évaluer les conséquences, et de savoir ce qui nous est bénéfique. Ce sont mes propres choix qui interviennent alors. De ce fait, il semble bien établi que la conscience puisse être libératrice . Mais, comme le montre la distinction entre la conscience et la spontanéité, une prise de conscience peut aussi conduire à entraver certaines de nos actions. Comment, par exemple, un mille-pattes pourrait-il arriver à se déplacer correctement, et rapidement, s'il devait réfléchir à la présence de chacun des membres qui le lui permettent ? Celui qui fait trop intervenir sa conscience ne devient-il pas timoré, et toujours à peser interminablement le pour et le contre, de la moindre action comme de la moindre pensée ? Pouvons-nous alors, véritablement, qualifier de libre quelqu'un qui est dans l' incapacité d'agir ? De manière générale, une liberté et une action ne s'inscrivent-elles pas dans une prise sur le monde, qui permet leur intervention concrète, mais aussi qui en limite l'étendue ? Autrement dit, la conscience et la liberté n'admettent-elles pas des limites nécessaires, et ne faut-il pas considérer l'impact de ces limites sur l'émergence de la conscience ?
conscience

« aussi être synonyme d' enfermement .

Nous en voyons une illustration si nous revenons à la conception qui est cellede Descartes.

Les deux principales conséquences de sa philosophie de la conscience sont, en effet, d'aboutir à uneséparation du corps et de l'âme , et à une très grande difficulté pour intégrer la présence d'autrui dans cetteconscience individuelle.

La séparation du corps et de l'âme provient de cette formulation sur laquelle débouchel'expérience du cogito : « Je pense, donc je suis.

» Si l'homme peut tout mettre en doute, et si la seule chose quirésiste à ce doute c'est le fait que je suis en train de douter, ou de penser, cela entraîne l'idée que l'homme doit sedéfinir, avant tout, par ses capacités d'être pensant et réflexif.

La pensée seule est susceptible de me donner unecertitude quant à mon existence, pensée qui peut elle-même se connaître bien plus facilement que ce qui vient ducorps.

La pensée de moi-même, ou de toute autre chose, lorsqu'elle devient une intuition intellectuelle, peutm'assurer de la vérité d'une telle pensée, tout simplement parce qu'il est impossible de penser à cette chose d'uneautre manière, comme lorsque j'évoque l'essence d'un triangle, qui ne peut que correspondre à une figure dont lasomme des angles est égale à deux droits.

Par opposition, la pensée de mon corps reste confuse , incertaine, etdépend de ce qui vient me toucher en dehors de ma volonté.

Ainsi, l'homme n'est-il plus qu'un pur esprit, et tout cequi vient du sensible se voit dévalorisé.

De la même manière, la présence d'autrui est écartée, ou du moins nes'impose pas comme une évidence ou une chose connue.

L'expérience du cogito me garantit de l'expérience que jepeux faire, et que chacun peut faire pour son compte.

Mais c'est une expérience qui ne m'assure que de moi-même .C'est moi qui pense, ou qui doute, et si un autre peut le faire tout aussi bien que moi, ce sera sa propre expérience,à laquelle je ne pourrais jamais me substituer.

Ainsi, nous aboutissons à des consciences séparées, enfermées enelles-mêmes, et dans une véritable vision solipsiste.

Autrui ne peut pas être pris en considération, car c'est d'abordet avant tout ma propre subjectivité qui intervient. B.

La conscience, source d'obsessions et de culpabilité Ces défauts de la conscience réflexive, chez Descartes,apparaissent bien dans la critique que peut en faire Leibniz, notamment dans sa préface des Nouveaux Essais surl'entendement humain .

Il y montre notamment que la conscience, telle que l'envisage Descartes, conduit àl'impossibilité de renouveler sa pensée.

L'exigence d'une conscience transparente à ellemême fait que ce à quoi jepense doit se redoubler de la pensée de cette pensée.

Je dois penser que je pense, et ainsi à l'infini, sans jamaispouvoir passer à une nouvelle pensée.

Le résultat est donc celui d'une idée fixe , obsessionnelle, qui m'empêche d'ensortir.

Cet enfermement de la conscience en elle-même se révèle encore mieux si nous envisageons la consciencemorale.

En effet, celui qui revient sur ses actes passés y trouvera certainement quelques défauts au niveauintentionnel.

Le regret, ou le remords, découlera de ce regard rétrospectif.

Il en naîtra un sentiment de honte, ou deculpabilité, qui va devenir une véritable torture pour celui qui est incapable d'oublier.

En se rappelant sans cesse safaute, il ne pourra envisager aucun avenir.

Il restera bloqué sur son passé, et ne pourra même plus vivre au présent.Cet enfermement aura pour conséquence une véritable action d'autodestruction, pouvant conduire au désir dusuicide.

Nous voyons donc que la prise de conscience n'est pas forcément ce qui mène à une libération.

Elle peut aucontraire rendre impossible une sortie de soi-même et une véritable rencontre avec ce qui n'est pas moi (le mondeou autrui).

Mais si la conscience peut aboutir à cela, c'est peut-être parce qu'il n'est envisagé qu'un seul aspect dela conscience (comme Descartes qui prend la conscience réflexive pour toute la conscience), ou qu'un seul usagede celle-ci. 3.

La nécessité de faire intervenir différents degrés de conscience A.

La différence entre consciences spontanée, intentionnelle et réflexive Les possibilités d'enfermement avec laconscience que nous avons pu observer en seconde partie s'expliquent par les distinctions que nous devons fairemaintenant entre différents degrés de conscience, ou différentes conceptions de celle-ci.

Comme nous l'avons vuavec Descartes, la conscience réflexive qu'il met en avant n'est pas la seule qui peut intervenir.

Une conscience nedébouche pas forcément sur une réflexion, car elle peut s'arrêter à un certain seuil.

C'est notamment ce que montreLeibniz avec les petites perceptions .

La possibilité de prêter attention à un objet dépend de l'intensité dessensations qu'il fait naître en nous, comme celui qui sera réveillé par un bruit qui atteindra un certain niveau dedécibels.

Mais cela veut dire que la conscience n'est pas entièrement d'ordre réflexif, ou du moins qu'elle ne l'est pasimmédiatement.

Avant la prise de réflexion intervient une conscience corporelle , ou spontanée, qui déjà me guidedans tous mes mouvements.

Nous n'avons plus à craindre, ici, de nous enfermer dans notre conscience tropréfléchie, puisque au contraire nous restons ouvert sur le monde qui fait naître en nous des perceptions, ni d'aboutirà une séparation trop importante entre l'esprit et le corps.

C'est aussi ce que la tradition philosophique de laphénoménologie appelle la conscience intentionnelle .

Celle-ci se caractérise par sa relation au monde.

« Touteconscience est conscience de quelque chose », écrit Husserl dans ses Méditations cartésiennes .

Cela veut dire quela conscience n'est pas clôturée sur elle-même.

Au contraire, elle n'apparaît que dans ces relations qu'elle entretientavec le monde, qui lui donne les possibilités d'être de telle ou telle forme (par exemple une conscience perceptive, sil'objet est présent là devant nous, ou une conscience imageante s'il est absent et qu'il faut s'en refaire une imagedans notre esprit). B.

Les différents usages possibles de la conscience Ainsi comprenons-nous, avec la conscience intentionnelle,comment peut intervenir une prise de conscience.

C'est l'horizon du monde qui en donne la possibilité.

Mais cethorizon n'est qu'une incitation, qui autorise différentes visées de ma subjectivité.

C'est ainsi que, pour un mêmeobjet, ma conscience peut envisager plusieurs usages.

Je peux mettre un livre dans ma bibliothèque dans l'intentionde l'étudier, ou simplement pour son apparence et son effet décoratif.

Cette différence d'usage, c'est celle quisépare une conscience réflexive d'une conscience spontanée, telle que les étudie Husserl dans son ouvrage Logiqueformelle et logique transcendantale .

Une conscience poussée au maximum de sa réflexivité donne lieu à une logiqueformelle , qui n'envisage les choses que sous l'angle de leur possibilité (un triangle conserverait son essence, mêmes'il n'en existait aucun équivalent dans la réalité perceptible).

Mais lorsque cette possibilité ne suffit plus, par. »

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