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Une oeuvre d'art gagne-t-elle à être commentée ?

Publié le 03/01/2006

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La question est de savoir si justement une oeuvre possède déjà son statut artistique en-soi ou si c'est justement le commentaire ou plus généralement le discours qui lui confère un statut qu'elle ne possédait pas. Dans le second cas, le commentaire, une fois que l'oeuvre est instituée en oeuvre d'art, semble ne plus servir à rien. Pourtant les critiques continuent à commenter les oeuvres classiques. Il faudra donc encore se demander à quoi le commentaire peut-il bien servir.   Nous pouvons hiérarchiser les problèmes de la manière suivante : I - A qui profite le commentaire ? II - Y a-t-il des oeuvres d'art indépendamment d'un discours sur l'art ? III - A quoi sert le commentaire d'une oeuvre universellement reconnue comme artistique ?       Proposition de plan :   I - A qui profite le commentaire ?   Cette première approche présuppose le fait que l'oeuvre d'art est une oeuvre en-soi, ce que notre seconde partie examinera plus précisément. Nous nous intéressons d'une manière générale à l'effet que peut produire un commentaire, et plus précisément, tentons de déterminer sur qui ou sur quoi cet effet s'applique.

En demandant ce que gagne une œuvre d’art à être commentée, nous interrogeons la fonction, le statut, de l’historien de l’art, du critique d’art, etc. : du manière générale, il s’agit de s’intéresser à la relation entre l’art lui-même et le discours sur l’art.

Le premier problème est de savoir si c’est bien l’œuvre qui gagne quelque chose par le discours. N’est-ce pas plutôt celui qui s’intéresse à une œuvre qui étend ses connaissances en art, dans le sens où un commentaire lui permettrait de mieux comprendre une œuvre ?

Cependant, en en dévoilant le sens, un commentaire peut susciter l’intérêt pour des œuvres qui restaient obscures ou inconnues. Ce serait alors le discours comme institution qui dévoilerait la valeur artistique d’une œuvre. La question est de savoir si justement une œuvre possède déjà son statut artistique en-soi ou si c’est justement le commentaire ou plus généralement le discours qui lui confère un statut qu’elle ne possédait pas. Dans le second cas, le commentaire, une fois que l’œuvre est instituée en œuvre d’art, semble ne plus servir à rien. Pourtant les critiques continuent à commenter les œuvres classiques. Il faudra donc encore se demander à quoi le commentaire peut-il bien servir.

 

Nous pouvons hiérarchiser les problèmes de la manière suivante :

I – A qui profite le commentaire ?

II – Y a-t-il des œuvres d’art indépendamment d’un discours sur l’art ?

III – A quoi sert le commentaire d’une œuvre universellement reconnue comme artistique ?

« Référence : Bergson « L'influence du langage sur la sensation est plus profonde qu'on ne le pensegénéralement.

Non seulement le langage nous fait croire à l'invariabilité de nossensations, mais il nous trompera parfois sur le caractère de la sensationéprouvée.

Ainsi, quand je mange d'un mets réputés exquis, le nom qu'ils portent,gros de l'approbation qu'on lui donne, s'interpose entre ma sensation et maconscience ; je pourrais croire que la saveur me plaît, alors qu'un léger effortd'attention me prouverait le contraire.

Bref, le mot aux contours bien arrêtés, lemot brutal, qui emmagasine ce qu'il y a de stable, de commun et par conséquentd'impersonnel dans les impressions de l'humanité, écrase ou tout au moinsrecouvre les impressions délicates et fugitives de notre conscience individuelle.Pour lutter à armes égales, celles-ci devraient s'exprimer par des mots précis ;mais ces mots, à peines formés, se retourneraient contre la sensation qui leurdonna naissance, et inventés pour témoigner que la sensation est instable, ils luiimposeraient leur propre stabilité » La thèse que soutient Bergson est que le langage impose une stabilité auxsensations qui par essence sont instables.Appliqué au cas de l'oeuvre d'art, cela signifie que le commentaire (qui s'exprimejustement dans le langage) impose une stabilité aux sensations que nous pouvons ressentir face à une oeuvre d'art.

Autrement dit, en fixant le sens de l'oeuvre, le commentaire détermine la« bonne » manière d'appréhender cette oeuvre, de la percevoir, etc.A qui profite-t-il ? Supposons que quelqu'un reste froid et ne ressente rien face une oeuvre d'art.

Le commentairejoue alors le rôle d'un « déclencheur » : il va permettre à celui qui perçoit l'oeuvre d'être touchée par celle-ci.

Lacontrepartie, si nous restons bergsoniens, est qu'il n'y aura qu'une manière de percevoir l'oeuvre, qui sera justementcelle que le commentaire impose, d'où l'intérêt de multiplier les commentairesL'oeuvre, quant à elle, gagne en intelligibilité, au sens où le commentaire fournit une grille de lecture, ou plusexactement une « grille de sensations » de l'oeuvre.

Quant à son essence d'oeuvre d'art, elle ne gagne cependantrien dans cette perspective.

II – Y a-t-il des oeuvres d'art indépendamment d'un discours sur l'art ? Partons d'une première série d'exemples concrets : les masques africains exposés au musée des arts premiers à Parispossédaient à l'origine une fonction rituelle ; les pyramides d'Égypte sont avant tout des tombeaux ; on peut de lamême manière supposer à bon droit que les peintures de Lascaux étaient des manuels de chasse.

Cela ne signifiepas que les pyramides, les masques et les peintures rupestres n'étaient pas en-soi des oeuvres.

Cependant, ellesn'ont été admises comme telles qu'à partir du moment où l'institution que constituent les musées et l'histoire de l'arts'y sont intéressé.

La question est de savoir si ces institutions, au travers des discours qu'elles produisent, ontdécouvert le caractère artistique des ses oeuvres où si elles leur ont conféré ce statut.

Il est impossible derépondre à partir de ces exemples.

Considérons un autre cas : supposons qu'un faussaire soit capable de peindre des tableaux qui, quant au style, à latechnique, etc., puissent passer pour des toiles de Leonard de Vinci.

Il ne s'agit à proprement parler pas d'oeuvresd'art mais de faux.

Cependant, si ces toiles font parfaitement illusion et que la supercherie n'est pas découverte,alors un musée pourra bien les exposer, on pourra produire dessus un discours, les commenter, les insérer dans lesmanuels d'histoire de l'art, etc.

Autrement dit, dans ce cas, l'institution aura conféré un statut artistique à ce qui enréalité n'est pas une oeuvre d'art mais une contrefaçon.Si maintenant la supercherie est découverte, alors le musée retirera bientôt les faux des salles d'exposition, lapresse publiera un démenti, les commentaires deviendrons nuls et non avenus.

Autrement dit, l'institution pourradémettre le statut d'oeuvre d'art à ces faux.Elle possède par conséquent le pouvoir de définir ce qui est de l'art et ce qui n'en est pas.

Le discours, etnotamment le commentaire, confère une « essence » artistique à ce qu'il souhaite.

III – A quoi sert le commentaire ?. »

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