Devoir de Philosophie

Y a-t-il plusieurs vérités ?

Publié le 27/02/2008

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Nous ne pouvons que nous moquer alors d'une justice qui « change de qualité en changeant de climat », justice qui doit être davantage objet de plaisanterie (« plaisante justice ») que de respect. ■ Ce à quoi s'oppose cet extrait: Pascal ne se contente pas ici de dénoncer l'incapacité de la raison à déterminer les principes de la justice authentique et universelle. Sur cette impuissance, nous dit-il, les hommes tirent des conclusions sur la nature de la justice, contre lesquelles il s'oppose. Les philosophes, en effet, au lieu de remettre en cause la relativité des conceptions du juste et de l'injuste, ne trouvent rien de mieux que d'essayer de la légitimer, ajoutant encore plus à la confusion. L'un, confondant la justice de Dieu et le pouvoir du souverain, affirmera que « l'essence de la justice est l'autorité du législateur » et que c'est lui, qui du haut de l'arbitraire de son bon-vouloir, décide de ce qui doit être considéré comme juste ou injuste. Tel autre affirmera que cette autorité repose sur « la commodité du souverain », sur ce qui lui agrée et constitue son intérêt propre. D'autres enfin soutiennent que la seule autorité de la justice provient de la force de la coutume, le temps et l'usage ayant ainsi force de loi. Cette forme de SCEPTICISME : Philosophie selon laquelle ou bien la vérité n'existe pas, pu, bie, si elle existe, elle est inconnaissable. scepticisme moral repose sur l'idée que la raison ne nous découvre aucune justice absolue. Or, ici, les philosophes établissent, selon Pascal, un faux lien causal et concluent abusivement, de l'impuissance de la raison à déterminer les critères de la justice universelle à sa relativité fondamentale.

« façon quand je suis gai ou triste) et même selon les perspectives d'observation (une tour vue carrée de prèsparaît ronde de loin).

Pour les sceptiques il n'y a pas de vérités objectives mais seulement des opinionssubjectives toutes différentes. Le sophiste Protagoras , écrit Diogène Laerce « fut le premier qui déclara que sur toute chose on pouvait faire deux discours exactement contraires, et il usa de cetteméthode ». Selon Protagoras , « l'homme est la mesure de toute chose : de celles qui sont en tant qu'elles sont, de celles qui ne sont pas en tant qu'elles ne sont pas » Comment doit-on comprendre cette affirmation ? Non pas, semble-t-il, par référence à un sujet humainuniversel, semblable en un sens au sujet cartésien ou kantien, mais dans le sens individueldu mot homme, « ce qui revient à dire que ce qui paraît à chacun est la réalité même » (Aristote , « Métaphysique », k,6) ou encore que « telles m'apparaissent à moi les choses en chaque cas, telles elles existent pour moi ; telles elles t'apparaissent à toi, telles pourtoi elles existent » (Platon , « Théétète », 152,a). Les critères du juste sont relatifs "Sur quoi [le souverain] la fondera-t-il, l'économie du monde qu'il veutgouverner ? Sera-ce sur le caprice de chaque particulier ? Quelleconfusion ! Sera-ce sur la justice ? Il l'ignore.Certainement, s'il la connaissait, il n'aurait pas établi cette maxime, laplus générale de toutes celles qui sont parmi les hommes, que chacunsuive les moeurs de son pays ; l'éclat de la véritable équité qui auraitassujetti tous les peuples, et les législateurs n'auraient pas pris pourmodèle, au lieu de cette justice constante, les fantaisies et les capricesdes Perses et Allemands.

On la verrait plantée par tous les États dumonde et dans tous les temps, au lieu qu'on ne voit rien de juste oud'injuste qui ne change de qualité en changeant de climat [...].Plaisante justice qu'une rivière borne ! Vérité au-deçà des Pyrénées,erreur au-delà.De cette confusion arrive que l'un dit que l'essence de la justice estl'autorité du législateur, l'autre la commodité du souverain, l'autre lacoutume présente ; et c'est le plus sûr : rien, suivant la seule raison,n'est juste de soi ; tout branle avec le temps.

La coutume fait toutel'équité, par cette seule raison qu'elle est reçue ; c'est le fondementmystique de son autorité.

Qui la ramène à son principe, l'anéantit."Blaise Pascal, Pensées (1670). Ce que défend ce texte: Ce texte de Pascal s'ouvre sur une question qui s'adresse à tout gouvernant d'un État : sur quel principecelui-ci doit-il fonder l'organisation (« l'économie ») de la société qu'il veut gouverner ?S'agit-il de fonder le droit sur « le caprice de chaque particulier» ? Pascal rejette cette solution qui ne peutaboutir qu'à une confusion, celle qui résulte des désirs changeants et contradictoires de chacun, où nulgouvernement ne peut trouver sa cohérence.S'agit-il de le fonder sur l'idée de la justice et de régler les lois sur ses exigences ? Or, pour Pascal, les princesignorent ce qu'est la justice universelle, et c'est cette thèse qu'il va tenter de démontrer dans ce texte.S'ils connaissaient une telle justice, en effet, ils n'auraient pas établi cette règle, « la plus générale de toutescelles qui sont parmi les hommes », qui consiste à affirmer que « chacun suive les moeurs de son pays » et laconception de la justice que les traditions développent chacune en particulier.

Descartes lui-même, dans leDiscours de la méthode, reprendra à son compte une telle règle, lorsqu'il adoptera une « morale provisoire »pour accompagner l'épreuve du doute : suivre les moeurs de son pays et les valeurs qu'elles établissent.Une telle règle, si communément admise, prouve que nul n'a pu déterminer la justice universelle, celle qui seserait imposée à tous les peuples avec l'évidence de la vérité.

Si une telle vérité existait, elle aurait soumistous les peuples, non par la contrainte qu'imposent les guerres, mais par la seule force de la reconnaissance «de la véritable équité ».

Celle-ci se serait imposée d'elle-même, enracinée (« plantée ») dans le coeur deshommes et dans leurs États, en tout lieu et en tout temps.Or, l'histoire nous montre une « relativité » des conceptions du juste et de l'injuste qui parle d'elle-même.

Cequi est juste ici est considéré comme blâmable là et réciproquement.

Ce qui est le bien en France (au-deçàdes Pyrénées) est une erreur ou un vice en Espagne (au-delà des Pyrénées).

Nous ne pouvons que nousmoquer alors d'une justice qui « change de qualité en changeant de climat », justice qui doit être davantageobjet de plaisanterie (« plaisante justice ») que de respect.. »

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