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Article de presse: La transition au cinéma

Publié le 22/02/2012

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1er avril 1966 - Dix années de Ve République, qui verront, après la fin de la guerre d'Algérie, une société agitée de secousses, dont la plus forte sera celle de mai 1968, le départ du général de Gaulle et le septennat inachevé de Georges Pompidou. Dix années où le cinéma français bouge de diverses façons, s'engage dans une voie de transition entre la révolution du langage cinématographique apportée par la " nouvelle vague " et ce qui deviendra, au milieu des années 70, la nouvelle qualité française. En 1963, la " nouvelle vague " qui, nous l'avons vu, avait provoqué pas mal de chimères, connaît son reflux. Reste un autre cinéma, d'essence littéraire, représenté par Alain Resnais (Muriel, 1963 La guerre est finie, 1966 Je t'aime, je t'aime, 1968), Alain Robbe-Grillet, l'un des créateurs du " nouveau roman " (l'Immortelle, 1963 Trans-Europ-Express, 1966 L'homme qui ment, 1968 l'Eden et après, 1971) et Marguerite Duras (la Musica, 1967, avec Paul Seban Détruire, dit-elle, 1970 Jaune le soleil, 1971 Nathalie Grangier, 1971 la Femme du Gange, 1973). A quoi peuvent s'ajouter, même s'ils relèvent de la littérature française d'analyse traditionnelle, les " contes moraux " d'Eric Rohmer, enfin touché par le succès public avec Ma nuit chez Maud (1969). Autre événement important : la naissance, dans le sillage d'Agnès Varda (le Bonheur, 1965 les Créatures, 1966 Lion's love, 1969), d'un cinéma de femmes avec Nina Companeez (tournant sans Michel Deville à partir de 1971), Yannick Bellon (Quelque part quelqu'un, 1972 la Femme de Jean, 1973), Nelly Kaplan (la Fiancée du pirate, 1969 Papa les petits bateaux, 1972), Nadine Trintignant (Mon amour, mon amour, 1966 le Voleur de crimes, 1969 Ça n'arrive qu'aux autres, 1971 Défense de savoir, 1973). La montée des mouvements féministes, leur action ont favorisé, sans toutefois l'expliquer globalement, la montée de ce cinéma féminin. Sous l'influence des événements politiques, des courants marginaux traversent la production française, mais s'adressent surtout à un public de militants (gauchisme, contraceptions, droit à l'avortement, mouvements sociaux ainsi débutera Marin Karmitz). Par ailleurs, Claude Lelouch s'impose (Un homme et une femme, 1966 Vivre pour vivre, 1968 la Vie, l'Amour, la Mort, 1968 le Voyou, 1970 la Bonne Année, 1973) comme un auteur, même s'il n'a pas les faveurs de la critique soutenant la fameuse politique issue des Cahiers du cinéma. De la Peau douce à la Nuit américaine, François Truffaut construit son univers personnel sur lequel les événements contemporains ont peu de prise. Claude Chabrol, après des travaux commerciaux, sort de son purgatoire et filme, à partir de 1967 (le Scandale), une fresque romanesque quasi balzacienne de la bourgeoisie française (la Femme infidèle, Que la bête meure, le Boucher, la Rupture, Juste avant la nuit, les Noces rouges) qui se durcit politiquement contre l'esprit de droite, les combinaisons d'argent, les intrigues souterraines. Côté auteurs, on trouve aussi Michel Deville, qui prend un nouveau départ (la Femme en bleu, le Mouton enragé), et Robert Bresson, toujours orgueilleusement placé au-dessus de tous : Au hasard Balthazar (1966) Mouchette (1967) Une femme douce (1969) les Quatre Nuits d'un rêveur (1971). Jean-Pierre Melville continue à perfectionner le " film noir " à la française (le Deuxième Souffle, le Samouraï, le Cercle rouge, Un flic). Edouard Molinaro, Georges Lautner, Gilles Grangier représentent un cinéma commercial qui se porte, alors, très bien. Jean-Pierre Mocky épingle par l'ironie les moeurs et la politique (la Grande Lessive, Solo, l'Etalon, l'Albatros). Yves Boisset inaugure un nouveau cinéma d'intervention parfois menacé par une censure encore vivace (Un condé, l'Attentat, RAS) et Claude Sautet devient, à partir des Choses de la vie (1969), le peintre de la classe moyenne des cadres et des quadragénaires affrontés à la liberté féminine. La roue de l'histoire et de la société avait tourné. Jean-Luc Godard-dont le cas est traité à part-était, lui, resté le témoin de " l'avant-68 ". JACQUES SICLIER Avril 1986

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