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Article de presse: Qualité France au cinéma

Publié le 22/02/2012

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1946 - Peu épuré, parce que peu compromis sous l'Occupation, le cinéma français, passé les mois difficiles qui suivront la Libération, dans l'attente de la fin de la guerre, réussira à redémarrer brillamment, à s'imposer, dès 1946, malgré le tort économique que pouvaient lui causer les accords Blum-Byrnes sur l'important quota des films américains distribués chez nous, accord contre lesquels se mobilisa toute la profession. Le contrôle et l'aide de l'Etat par l'institution du Centre national de la cinématographie (structure modifiée d'une législation amorcée sous le gouvernement de Vichy) favorisent la production. 1946 est l'année de prestige du premier Festival international de Cannes où la Bataille du rail, de René Clément, apporte un témoignage authentique sur la résistance des cheminots; après le courant d'exaltation patriotique (sans nuances et sans allusions aux ambiguïtés de la France de Pétain) de l'année 1945 : Nuits d'alerte, Mission spéciale, les Clandestins, les Démons de l'aube, Fils de France, Vive la liberté, le meilleur film étant, alors, Jéricho, d'Henri Galef. Mais la France ne connaîtra pas, comme l'Italie, le néo-réalisme et, après le Père tranquille, de Noël-Noël, exaltant la résistance du Français moyen, et les exploits des parachutistes de Bataillon du ciel (tout cela en 1946), ce courant de circonstance laisse vite la place à ce qu'on appellera, plus tard, " la tradition de la qualité " : des adaptations d'oeuvres littéraires aux scénarios soigneusement construits, à la mise en scène et à l'interprétation soignées. Jean Delannoy donne le ton avec la Symphonie pastorale, d'après Gide (qui marque le retour de Michèle Morgan exilée aux Etats-Unis), Claude Autant-Lara s'impose définitivement avec une version virulente du Diable au corps (1946), où un jeune acteur déjà célèbre, Gérard Philipe, devient un mythe pour les dix ans à venir, adapte le Blé en herbe, de Colette (1954), puis le Rouge et le Noir, de Stendhal, où Gérard Philipe, qui a déjà été Fabrice del Dongo dans La Chartreuse de Parme de Christian Jaque (1947). René Clément avec les Maudits (1946), Au-delà des grilles (1948), le Château de verre (1949), Jeux interdits (1951), Monsieur Ripois (1954), affine son art de la mise en scène et sa thématique personnelle. Le réalisme noir d'Yves Allégret (Dédé d'Anvers, Une si jolie petite plage, Manèges, de 1947 à 1949) et surtout de Clouzot (Quai des Orfèvres, 1947, Manon, 1949, le Salaire de la peur 1954) remplace le " réalisme poétique " de Carné et Prévert dont les Portes de la nuit (1946) ont été un échec. Carné continu seul, assez incompris, des oeuvres fortes et originales comme la Marie du port (1949), Juliette ou la clé des songes (1951), Thérèse Raquin (1953). Jean Renoir tarde à rentrer des Etats-Unis mais est acclamé pour French-cancan (1954), René Clair a repris sa place dans le cinéma français dès 1947 (Le silence est d'or), Duvivier, après Panique (1946), d'après Simenon, se promène un peu partout. Des revues se fondent, telles " Positif " et les " Cahiers du cinéma ", qui défendent une cinéphilie moderne. Avec la " politique des auteurs ", les Cahiers soutiennent plus particulièrement Jacques Becker (Edouard et Caroline, 1951; Casque d'Or, 1952; Rue de l'Estrapade, 1953; Touchez pas au Grisbi, 1954); Jean Cocteau (Orphée, 1950), Robert Bresson et son exigeant " cinématographe " : (le Journal d'un curé de campagne, 1950), et le nouveau comique Jacques Tati (Jour de fête, 1949, les Vacances de M. Hulot, 1953), et Max Ophüls (la Ronde, 1950, le Plaisir, 1952, Madame de... 1953). Il y a, en effet, diverses notions de la qualité, et des réalisateurs de moindre envergure apportent aussi la leur à cette période où la production commerciale moyenne brille par la même médiocrité... qu'au cours des années 30 ou 40. JACQUES SICLIER Avril 1985

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