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Commune de Paris (1871) - Histoire

Publié le 11/02/2013

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histoire

1   PRÉSENTATION

Commune de Paris (1871), nom donné au mouvement et au gouvernement insurrectionnel mis en place par les Parisiens à l’issue de la guerre franco-allemande (1870-1871), du 18 mars au 28 mai 1871.

2   ORIGINES

Depuis les années 1860, dans le cadre de l’Empire libéral, le mouvement ouvrier français décapité par les Journées de juin 1848 (voir Ateliers nationaux) s’est reconstitué ; il est influencé principalement par la tradition mythifiée du gouvernement de l’An II, par les thèses anarcho-syndicalistes de Pierre Joseph Proudhon et surtout d’Auguste Blanqui ; l’Association internationale des travailleurs (voir Internationales ouvrières), fondée en 1864 à Londres, a acquis une certaine audience dans les milieux ouvriers militants.

Les événements politico-militaires de septembre 1870 favorisent les tendances révolutionnaires : le 2 septembre 1870, l’empereur Napoléon III se rend aux Prussiens après la bataille de Sedan. Puis, le 4 septembre, par une révolution pacifique, la déchéance du second Empire et l’instauration de la IIIe République sont proclamées sur la place de l’Hôtel de Ville, à Paris. Un gouvernement provisoire, dit gouvernement de la Défense nationale, est mis en place en attendant les élections législatives qui doivent avoir lieu le 8 février 1871. Mais dès septembre 1870, sous l’influence des militants de l’Internationale, se constituent dans chaque arrondissement des clubs et des comités de vigilance. Le 15 septembre, le « Comité central des vingt arrondissements « — organe centralisateur des ambitions démocratiques des Parisiens — publie son programme (rationnement et réquisition ; guerre à outrance ; gouvernement républicain et démocrate), lequel n’est à l’origine qu’une simple proposition d’aide au gouvernement provisoire. Avec les semaines, le mouvement s’essouffle, excepté dans les quartiers « rouges «.

L’armistice, signé le 28 janvier 1871 entre le gouvernement provisoire et le IIe Reich allemand, réveille les Parisiens : le traité de paix doit être voté par une représentation nationale, restant à élire (élections prévues pour le 8 février). Mais l’Assemblée finalement élue, réunie à Bordeaux le 12 février 1871, comprend de nombreux royalistes favorables au rétablissement de la monarchie. Une majorité de députés est disposée à accepter les conditions du chancelier Otto von Bismarck, lesquelles reflètent l’opinion conservatrice de la province. En revanche, les républicains radicaux et les socialistes parisiens, galvanisés par leur résistance héroïque lors du siège de la capitale (18 septembre 1870-29 janvier 1871), trouvent l’offre de Bismarck humiliante (perte de l’Alsace-Lorraine et occupation jusqu’au paiement d’indemnités de guerre) et veulent poursuivre la guerre.

La signature des préliminaires de paix (26 février) — qui prévoient l’occupation de l’ouest de Paris par les Allemands (1er mars), la suppression par l’Assemblée nationale, le 8 mars, de la solde des gardes nationaux (seule ressource des ouvriers mobilisés) ainsi que du moratoire sur les loyers et les effets de commerce — et surtout le défilé des Prussiens dans la capitale (1er mars) finissent d’exaspérer les Parisiens. Une Fédération des bataillons de la Garde nationale se constitue alors, dont le mot d’ordre n’est autre que la République. Le Comité central des vingt arrondissements fraternise bientôt avec ce peuple en colère. L’Assemblée prend peur et s’installe à Versailles, la ville des rois ; armée grâce à la Garde nationale, Paris bouillonne et la rébellion couve.

3   UNE BRÈVE EXPÉRIENCE RÉVOLUTIONNAIRE

Dans la nuit du 17 au 18 mars 1871, Adolphe Thiers, chef du gouvernement provisoire, décide de désarmer Paris, c’est-à-dire de récupérer les 227 canons de la Garde nationale regroupés à Montmartre et à Belleville (le même jour, il fait arrêter Blanqui qui s’est retiré à Figeac). Mais le 88e de ligne, chargé de prendre les canons de Montmartre, est encerclé par la Garde nationale et par la foule, avec laquelle la troupe commence à fraterniser. Les officiers sont désarmés. Les généraux Lecomte et Thomas sont arrêtés et fusillés à la mairie du XVIIIe arrondissement, malgré l’intervention du maire Georges Clemenceau et d’officiers proches des émeutiers. Thiers fuit Paris avec le gouvernement pour Versailles et, dès lors, refuse de négocier, posant comme préalable le désarmement de la Garde nationale.

Afin de combler le vide laissé dans la capitale par les instances gouvernementales, un gouvernement populaire appelé Comité central de la Garde nationale est constitué. Le 26 mars, les Parisiens élisent dans la légalité un conseil communal de quatre-vingt-dix membres ; ce conseil prend le nom de Commune de Paris (ses membres sont appelés les communards) lors de son entrée à l’Hôtel de Ville, le 28 mars ; recevant immédiatement ses pouvoirs du Comité central, elle est présentée comme un contre-gouvernement en rivalité avec celui réfugié à Versailles. Le mouvement communard est suivi dans certaines grandes villes de province (Lyon, Marseille, Narbonne, Toulouse, Saint-Étienne) sans toutefois gagner les campagnes.

Les soixante-dix membres de la Commune qui siègent effectivement (Clemenceau, élu, quitte Paris) sont de diverses origines sociales — on y compte vingt-cinq ouvriers — et politiques. Le Conseil se compose d’une majorité constituée de Jacobins (une vingtaine, dont Louis Delescluze, Félix Pyat, Gambon) désireux de voir Paris prendre les rênes du gouvernement de la France ; de neuf blanquistes (Ferré, Rigault), qui se rangent derrière Louis Auguste Blanqui, et qui, partisans de l’action directe, se réclament de la dictature montagnarde et de la Terreur ; et de moins d’une trentaine de révolutionnaires indépendants, ou radicaux (comme Clément), favorables à l’autonomie de la municipalité parisienne et à l’instauration d’une république démocratique et sociale. La minorité se compose essentiellement d’adhérents au socialisme communaliste et antiétatique de Pierre Joseph Proudhon, majoritaires au sein de la section française de l’Association internationale des travailleurs, qui soutient l’insurrection, et d’indépendants comme le peintre Gustave Courbet ou Jules Vallès.

Le fossé entre ces fervents républicains défenseurs de l’autonomie de la Commune de Paris se creuse rapidement : les partisans d’une dictature de la capitale sur le reste du pays s’opposent bientôt à ceux qui se prononcent en faveur d’une Fédération des communes de France dans laquelle l’État doit se dissoudre.

L’action du Conseil de la Commune est accaparée par la lutte contre les partisans de Thiers, surnommés les versaillais, autant que par la mise en place d’un programme de société. Elle est paralysée par les bavardages interminables qui reflètent les divergences idéologiques entre les insurgés. La création d’un Comité de salut public par les Jacobins et les blanquistes, le 1er mai, rencontre l’opposition des proudhoniens.

La Commune, constituée de dix sections, prend un certain nombre de mesures sociales d’urgence, comme le report du paiement des dettes et des loyers, et propose certaines réformes en faveur des ouvriers (liberté d’association). Elle vote également la séparation de l’Église et de l’État et la collectivisation des entreprises abandonnées par leurs propriétaires, mais la plupart de ces mesures ne peuvent être appliquées avant l’écrasement de la Commune. Certaines mesures prises revêtent un caractère symbolique : adoption du drapeau rouge et du calendrier révolutionnaire, destruction de la colonne Vendôme (16 mai) et de la maison de Thiers.

4   ÉCRASEMENT DE LA COMMUNE

Pendant six semaines à partir du 2 avril, date à laquelle commencent les combats des insurgés (de 20 000 à 30 000 hommes) contre les troupes régulières de Versailles (130 000 soldats sous les ordres de Mac-Mahon), la capitale est assiégée et bombardée. La dégradation de la situation amène le délégué à l’Intérieur, le blanquiste Raoul Rigault, à instaurer une terreur ciblée : les réfractaires au service armé, les gendarmes, les policiers, certains prêtres affichant trop ouvertement leur opposition à la Commune sont recherchés et certains arrêtés.

Le 21 mai, les versaillais, prévenus par un piqueur de la ville de Paris que la porte du Point-du-Jour est dégarnie, pénètrent dans la capitale endormie. Suit une « semaine sanglante « de combats acharnés, jusqu’au 28 mai, au cours de laquelle ils entreprennent de reprendre la ville où se dressent plus de 500 barricades. À la fusillade des 424 fédérés au parc Monceau et à Montmartre, les insurgés répliquent par l’exécution de 52 otages, rue Haxo. Avant de capituler, le 28 mai — les derniers combats ont lieu au Père-Lachaise —, les communards brûlent plusieurs édifices publics (Tuileries, Hôtel de Ville, Cour des comptes, Conseil d’État, ministère des Finances).

On estime entre 20 000 et 30 000 le nombre de fédérés massacrés (dont 3 500 exécutions sans jugement), pour 880 morts du côté des versaillais, en plus des 484 exécutés (dont le cardinal de Paris, Mgr Darboy). Plus de 38 000 insurgés sont arrêtés et jugés en conseil de guerre. Une centaine sont condamnés à mort (dont 23 effectivement exécutés), 410 aux travaux forcés, 4 600 à des peines de prison, 322 au bannissement, et 7 500 sont déportés en Algérie et en Nouvelle-Calédonie. Cinquante-six enfants sont placés en maison de correction. La répression qui s’abat sur la Commune décapite pour longtemps le mouvement révolutionnaire français même si, par les lois de 1879 et de 1880, l’amnistie est accordée aux communards survivants.

Paradoxalement, cette répression implacable mise en œuvre par le gouvernement de Thiers a pour conséquence d’enraciner la république dans le pays en démontrant qu’elle est capable de résister à l’anarchie et aux désordres populaires.

5   ANALYSE HISTORIQUE

Le théoricien socialiste allemand Karl Marx, d’abord hostile à la Commune, dans laquelle il ne voit que les discussions stériles d’une insurrection dominée par les Jacobins et les proudhoniens, se rallie au mouvement au moment de la « semaine sanglante «. En guise d’oraison funèbre, il salue dans la Commune la première révolution prolétarienne des temps modernes. La lecture marxiste de la Commune met en évidence ses caractéristiques de lutte de classes, perceptibles non seulement à travers les discours, mais aussi à travers certaines mesures prises par le gouvernement communard.

À l’origine pourtant, c’est un mouvement patriotique plus qu’un mouvement social. Dans la tradition des révolutions de 1789, 1830 et 1848, la Commune mobilise le petit peuple des artisans, des boutiquiers et des salariés préindustriels. Les ouvriers proudhoniens, qui siègent en minorité au Conseil de la Commune, comme Varlin et Tolain, appartiennent à l’élite ouvrière — instruite — des typographes. La Commune est aussi un mouvement de reconquête de Paris par une population que l’« haussmannisation « a chassée : venus des faubourgs et de la banlieue proche, un grand nombre de fédérés viennent combattre pour défendre la Commune.

La tragédie de la « semaine sanglante « et la dureté de la répression donnent corps à un mythe unificateur magnifié par le mouvement ouvrier, ainsi qu’à un lieu de mémoire, le mur des Fédérés, au cimetière du Père-Lachaise. La Commune de Paris a eu un grand retentissement international.

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