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Corrigé : Y-a-t-il une vérité des apparences ?

Publié le 23/07/2010

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L’apparence désigne la surface de l’être, ce qui paraît à un sujet, par la sensation immédiate. Comme telle, pour une connaissance démonstrative de la vérité comme recherche de l’essence, cette immédiateté est suspecte, tout autant que le médium de cette réalité, la sensation. Une apparition (épiphanie en grec ce qui, de Dieu, devient visible ) implique une réalité, même si je n’en comprend pas la nature ; l’origine latine apparentia assez douteuse, signifierait présence ou aspect sensible. Celui qui sauvent les apparences, ne laisse rien voir de ses malheurs et de même le sujet pose la question de savoir si l’on peut sauver les apparences de leur superficialité en leur accordant quelque vérité, comme Socrate, dont le premier mot d’ordre était :  « Sauver les phénomènes ! « de leur apparente irrationalité. Il y a donc une dimension péjorative dans l’apparence pour la langue commune, un aspect réducteur, qui ferait d’elle le reflet, le nécessaire pendant du « caché «, du « secret «, du « profond « ou de « l’inaccessible «. Par conséquent, si les apparences ne livrent qu’une partie de ce dont elles sont le reflet, elles nous mentent, nos sens ont été souvent trompés par les illusions perceptives, elles nous éloignent de la vérité au sens ontologique, de l’être même des choses et devront être dépassées, voire niées, pour la découvrir.  Cependant est-il possible de supprimer les apparences ? De décider de ne plus percevoir ? Kant ne nous enseigne-t-il pas que sans l’intuition sensible, le concept et l’entendement sont aveugles ? Nous constatons une irréductible réalité de ce qui apparaît (phainomenon en grec) dans la mesure où nous n’avons affaire qu’à des phénomènes, au sens où le phénomène représente en général, une apparence naturelle extérieure un « spectacle dans le monde «, mais l’on peut étendre cette définition de l’apparence à tout ce qui apparaît à notre conscience : une image, une sensation, un souvenir, une idée… tous nos états de conscience peuvent être envisagés comme des apparences, ma conscience elle-même définit la façon dont je m’apparais à moi-même. Dès lors, c’est bien plus du côté du sujet qu’il faudra chercher, avec la phénoménologie, la fausseté ou la vérité de l’apparence, puisque l’être même des choses semble tout entier donné dans l’apparaître.    Pyrrhon a construit son scepticisme en commençant par le trope de la critique des sens, les illusions perceptives ne nous permettent pas de fonder décemment la connaissance de la vérité sur un critère aussi instable et trompeur que la sensation. Les apparences ne sont pas dignes de confiance et elles nous conduisent à l’erreur ou pire à l’illusion et en cette voie les Sceptiques reprennent la tradition hellénique, inaugurée par Platon, la recherche de la vérité est une quête de l’essence, de l’être même de la chose, l’Idée/Forme, modèle immatériel et incorruptible, de toutes ses apparitions particulières, les apparences, un pluriel qui les oppose à la réalité intelligible dont l’unité et l’unicité garantissent la vérité. La méthode socratique elle-même ne fuit-elle pas les cas particuliers du courage contre Lachès pour chercher le Courage, qui n’est que courage. Significativement, le vocabulaire courant parle des apparences en tant qu’illusions fugaces, ce qui conduit le penseur à douter de ce qu’il voit comme si l’apparence contenait une forme d’irréalité une confusion possible entre le réel et l’irréel. La position platonicienne disqualifie par avance toute vérité des apparences et ce ne sont pas les simulacres des sophistes, les ombres projetées de l’allégorie de la caverne en « République « VII, qui nous démentiront, puisqu’il s’agit encore d’apparences, mais volontairement trompeuses cette fois, qui maintiennent les citoyens dans un état d’ignorance imposé pour l’exercice d’une domination politique. Non seulement ces apparences devront être dépassées, mais elles devront même être détruites si l’on veut créer une cité d’hommes libres, éduqués par la raison et non par l’opinion, qui transforme « ses besoins en propriété de la chose « comme la définira bien plus tard Bachelard, une opinion « qui croit savoir ce qu’en fait elle ignore «.  C’est pourquoi l’opinion se contente si souvent de l’apparence, elle suffit à une simple adaptation empirique de l’individu à son environnement et on peut même dire que, sur ce point, « croire ce que l’on voit «, serait plutôt une forme de prudence. Peut-on alors penser que cela serait suffisant pour fonder un savoir ?  À en croire la leçon sceptique, la réponse serait négative, mais peut-être pas pour les raisons que l’on croit… Sextus Empiricus, disciple de Pyrrhon écrit dans « Les Esquisses pyrrhoniennes « : « Ceux qui prétendent que les Sceptiques nient les apparences paraissent ne pas entendre ce que nous disons (…) chaque fois que nous recherchons si l’objet est tel qu’il apparaît, nous en accordons l’apparence, nous ne mettons pas en question l’apparence mais ce que l’on dit de l’apparence «. C’est donc bien plus le jugement sur l’apparence qui est trompeur que l’apparence elle-même. Descartes s’en rappellera avec son expérience du morceau de cire dans la deuxième des « Méditations Métaphysiques « ; toutes les apparences ont changé et pourtant je suis bien en présence du même morceau de cire qu’on a fait chauffer. L’instabilité des apparences serait donc liée aux changements matériels et Descartes en tire l’idée que c’est l’âme, la permanence de l’esprit humain, qui demeure le même au sein de ces changements qui autorise l’unité du concept de cire, qui se souvient de l’expérience, de ses péripéties et qui en juge. « Ainsi le miel paraît doux. Nous l’admettons ; car nous avons la sensation de douceur. « insiste Sextus Empiricus, « Nous recherchons si le miel est doux par essence ; or, ce n’est pas l’apparence mais un jugement sur l’apparence. « Il s’agit donc bien de mettre à l’épreuve nos jugements, les attributions, propriétés, prédications, prévisions qu’ils contiennent comme autant d’affirmations dogmatiques ; c’est cette prétention au « définitif «, qu’un scepticisme modéré poursuit sans relâche. Le jugement et ses fondements certains posent problème, c’est là que les autres arguments sceptiques prennent tout leur poids et surtout le trope de la régression à l’infini ; ce qui va être construit par le jugement à partir de l’apparence fait question et non pas l’apparence comme simple fait. Il y a un souci relativiste fort pour les sceptiques, non au sens d’une indifférence philosophique et morale, mais dans celui d’une exigence extrême de vérité, l’époché n’est pas une simple négation, c’est une position de prudence pour Sextus Empiricus : « Le scepticisme c’est la faculté d’opposer les apparences et les concepts de toutes les manières possibles ; de là, nous en arriverons à cause de la force égale des choses et des raisons opposées à la retenue du jugement, puis à l’ataraxie «. C’est pourquoi il peut ajouter : « Si en effet la raison est assez trompeuse pour dérober presque à nos yeux les apparences, comment ne pas la tenir pour suspecte à propos de ce qui est obscur, si l’on ne veut pas, en la suivant, tomber dans la précipitation ? «  La raison ne peut prétendre maintenir jusqu’au bout son exigence de totale démonstrabilité, lorsque Pyrrhon identifie vérité et démonstration, mais cela n’empêche pas la réalité des apparences ; il y a peut-être une insuffisance des données expérimentales ou de la lecture que nous en faisons, mais il reste que la vérité n’est pas dans les choses, elle apparaît à l’occasion de la rencontre entre une réalité et un discours ou une pensée. Heidegger le formule ainsi dans « L’Essence de la Vérité « : « Une chose n’est pas vraie ou fausse, mais elle est réelle ou irréelle «. La vérité de l’apparence se pose donc pour le sujet qui l’éprouve et dans la mesure où il la prouve. Kant a toujours rappelé à qui voulait l’entendre que l’empirisme de Hume l’avait « réveillé de son sommeil dogmatique « et que si nos connaissances ne dérivent pas toutes de l’expérience, elles commencent toutes avec elle.    Il faut donc bien maintenant penser une réalité des apparences et pourquoi pas ensuite leur vérité. L’expérience comme matériau de base de la connaissance fait de l’empirisme l’héritier de la tradition matérialiste d’Epicure, qui affirmait que la sensation est le premier critère de définition de la vérité. Qu’est-ce qu’une vérité dans un monde sans perception, sans matière ? Seul Platon peut répondre et conserver encore quelque cohérence avec un topos noetos, lieu intelligible où la réalité vraie se définirait comme pure spiritualité ; sommes nous encore capables de nous représenter une telle hypothèse, ou faut-il accepter la formule de Vernant « la religion de Platon « ?  Il y a empiriquement une priorité chronologique de l’expérience sensible sur la construction de la pensée, nous sommes des êtres percevant avant de devenir des êtres pensant. L’apparence engage notre incarnation dans le monde, c’est ce que dit Lavelle dans sa définition : « L’apparence ne peut pas être détachée de cet être dont on veut qu’elle soit l’apparence sans quoi elle ne serait rien, même pas une apparence. « Ainsi la connaissance suppose une intuition sensible, condition nécessaire pour une rationalisation de la réalité. Le réel lui-même ne peut avoir de sens si nous faisons l’économie de l’expérience et donc des apparences.  À ce stade il est souhaitable de clarifier les significations de termes aussi proche que sensation, perception, expérience et apparences. Il semble que la sensation représente le matériau de base de la perception avec les stimulis qui excitent nos organes sensoriels. Puis, la perception organise, de manière non réfléchie, ces sensations en fonction de l’activité présente du sujet selon une reconnaissance des Formes d’après la théorie psychologique de la Gestallt ou des schémas figure/fond dans lequel nous identifions une forme dans un contexte perceptif global ; nos perceptions ne sont jamais isolées. Il ne dépend donc pas de nous de percevoir le flux sensoriel, en situation nos sens nous livrent tel ou tel type d’informations. La construction réflexive de cette organisation perceptive constituera notre expérience, elle engage donc la conscience du sujet et c’est là que s’articule la notion d’apparence.  Elle suppose le jugement, nous l’avons déjà vu, mais elle suppose surtout la croyance, Husserl parle de « foi originaire dans le monde «, Uhrdoxa. L’apparence est une certaine façon d’adhérer à nos perceptions et c’est pour cette raison que la même expérience vécue par des individus différents, ne donne pas dans leur témoignage des résultats identiques. Ils ne « voient « pas, ne « ressentent « pas les mêmes choses, elles ne leur apparaissent pas de la même façon.  Il faut donc maintenant chercher la profondeur de l’apparence si elle représente la seule « chose « à laquelle nous ayons matériellement accès et chercher aussi les moyens de contrôler la validité de nos jugements sur elle.  Le double constat de l’ambiguïté des apparences et de l’impossibilité de s’en passer conduit à penser que la seule réalité indépassable nécessaire à toute connaissance de la vérité est le phénomène tel qu’il nous apparaît, à condition qu’il soit « construit «, structuré par le jugement d’un sujet.  La conscience se définit alors simplement comme ce qui vise un objet et le phénomène visé nous donne alors à voir tout ce qu’il y a voir et à savoir sur la chose ; que l’on considère comme Kant un être en soi inaccessible au sujet percevant, derrière ses manifestations sensibles ou que l’on saute le pas avec la naissance de la phénoménologie de Hegel pour « revenir aux choses mêmes « selon le mot de Husserl, à une vérité des apparences et nier ce que Nietzsche appellera « l’illusion des arrières-mondes « dans lesquels se cacherait l’être, la vraie réalité, l’essence, l’idée.  La vérité ne doit plus être recherchée ailleurs que dans la description de la réalité du phénomène, ce qui va devenir le mot d’ordre phénoménologique repris par Husserl et Sartre. Le monde et la conscience qui nous le rend accessible, sont à décrire avec objectivité pour retrouver la naïveté de ce contact premier, donc revenir aux apparences simples en ayant tiré les leçons du scepticisme, en suspendant notre jugement, une véritable époché phénoménologique où comme le précise Sartre dans l’introduction de « l’Être et le Néant « l’apparence : « n’est pas une manifestation inconsistante de cet être (…) celle-ci devient, au contraire, pleine positivité, son essence est un « paraître « qui ne s’oppose plus à l’être, mais qui en est la mesure, au contraire. Car l’être d’un existant, c’est précisément ce qu’il paraît. «  Par exemple l’électricité, comme phénomène, n’est pas en elle-même, autre chose que l’ensemble des actions physico-chimiques (électrolyse, incandescence, déplacement de l’aiguille du galvanomètre, etc…) qui nous la rendent « apparente « : « L’apparence ne cache pas l’essence, elle la révèle : elle est l’essence. «  Ainsi l’apparence n’est pas vraie ou fausse en elle-même comme fait matériel, mais elle montre quelque chose et notre jugement va la déterminer, lui accorder ou pas certaines qualités et c’est ce jugement, cette attribution qui peut recevoir ou pas notre assentiment, notre croyance, puis se révéler vrai ou faux, ce qui implique un moyen de vérification. En fait, presque malgré nous, l’apparence nous engage dans un processus de jugement, donc de connaissance ; l’apparence, comme présence, ne pose aucun problème, elle ne devient problématique que si l’on prétend juger de sa nature ; la connaissance serait une possibilité du jugement et non une nécessité. Demander s’il y a une vérité des apparences revient, par conséquent, à se demander si un jugement sans connaissance peut être vrai et on s’aperçoit que tout jugement est prédicatif, il dit quelque chose à propos de quelque chose, il donne un prédicat, un attribut à un sujet et comme tel, s’il se réfère à une apparence, il suppose la définition thomiste de la vérité comme adéquation de la pensée et du réel. C’est l’intérêt, mais aussi la limite du projet phénoménologique, car même si l’apparence révèle l’essence, il reste que notre jugement doit se donner les moyens de ne pas la méjuger, de déduire au lieu d’induire quand cela est possible ; de calculer, de construire des méthodes à l’image des mathématiques comme le recommandait Descartes pour maîtriser ces jugements précipités et pleins de préjugés². Il faudra donc pour la suite préserver cette vérité de l’apparence comme contact primitif avec le réel.  C’est ce que Alain nous révélait dans un autre registre lorsqu’il affirmait dans ses « Propos « que : « Ceux qui opposent la réalité et l’apparence n’ont pas bien regardé l’apparence, l’apparence est toute vraie. Il n’y a point de visage dans la lune, et ces mêmes ombres que nous voulons faire mentir sont les mêmes qui permettront de mesurer montagnes et vallées de notre satellite. «    Il y a une corrélation étroite entre ce qui est vrai et ce qui est réel, il faut donc une conjonction entre les moyens de percevoir (ce sans quoi il n’y aurait même pas de monde) et les moyens de comprendre (la pensée pour laquelle il y a un monde à comprendre). L’apparence s’inscrit dans ce rapport, elle représente toujours un jugement même basique, même parfois quasi inconscient de lui-même quand il reproduit une croyance sociale ou une habitude erronée, telle l’impression de l’immobilité terrestre face aux mouvements solaires ; pour les objets il n’y a pas d’apparence et sans objet rien ne peut apparaître. La vérité sera donc ce rapport de correspondance, vérité matérielle, de fait, qui fait concorder notre entendement et les choses. Ainsi « tout ce qui est réel est rationnel et tout ce qui est rationnel est réel « disait Hegel ; tout ce qui est réel est vrai (possède l’existence et possède des causes, même l’illusion au sens où cela nous apparaît indiscutablement) et tout ce qui est vrai est réel même lorsqu’il s’agit de réalités intellectuelles comme des réalités mathématiques, puisque cela existe pour notre représentation consciente.

« La raison ne peut prétendre maintenir jusqu'au bout son exigence de totale démonstrabilité, lorsque Pyrrhon identifievérité et démonstration, mais cela n'empêche pas la réalité des apparences ; il y a peut-être une insuffisance desdonnées expérimentales ou de la lecture que nous en faisons, mais il reste que la vérité n'est pas dans les choses,elle apparaît à l'occasion de la rencontre entre une réalité et un discours ou une pensée.

Heidegger le formule ainsidans « L'Essence de la Vérité » : « Une chose n'est pas vraie ou fausse, mais elle est réelle ou irréelle ».

La véritéde l'apparence se pose donc pour le sujet qui l'éprouve et dans la mesure où il la prouve.

Kant a toujours rappelé àqui voulait l'entendre que l'empirisme de Hume l'avait « réveillé de son sommeil dogmatique » et que si nosconnaissances ne dérivent pas toutes de l'expérience, elles commencent toutes avec elle. Il faut donc bien maintenant penser une réalité des apparences et pourquoi pas ensuite leur vérité.

L'expériencecomme matériau de base de la connaissance fait de l'empirisme l'héritier de la tradition matérialiste d'Epicure, quiaffirmait que la sensation est le premier critère de définition de la vérité.

Qu'est-ce qu'une vérité dans un mondesans perception, sans matière ? Seul Platon peut répondre et conserver encore quelque cohérence avec un toposnoetos, lieu intelligible où la réalité vraie se définirait comme pure spiritualité ; sommes nous encore capables denous représenter une telle hypothèse, ou faut-il accepter la formule de Vernant « la religion de Platon » ?Il y a empiriquement une priorité chronologique de l'expérience sensible sur la construction de la pensée, noussommes des êtres percevant avant de devenir des êtres pensant.

L'apparence engage notre incarnation dans lemonde, c'est ce que dit Lavelle dans sa définition : « L'apparence ne peut pas être détachée de cet être dont onveut qu'elle soit l'apparence sans quoi elle ne serait rien, même pas une apparence.

» Ainsi la connaissance supposeune intuition sensible, condition nécessaire pour une rationalisation de la réalité.

Le réel lui-même ne peut avoir desens si nous faisons l'économie de l'expérience et donc des apparences.À ce stade il est souhaitable de clarifier les significations de termes aussi proche que sensation, perception,expérience et apparences.

Il semble que la sensation représente le matériau de base de la perception avec lesstimulis qui excitent nos organes sensoriels.

Puis, la perception organise, de manière non réfléchie, ces sensationsen fonction de l'activité présente du sujet selon une reconnaissance des Formes d'après la théorie psychologique dela Gestallt ou des schémas figure/fond dans lequel nous identifions une forme dans un contexte perceptif global ;nos perceptions ne sont jamais isolées.

Il ne dépend donc pas de nous de percevoir le flux sensoriel, en situationnos sens nous livrent tel ou tel type d'informations.

La construction réflexive de cette organisation perceptiveconstituera notre expérience, elle engage donc la conscience du sujet et c'est là que s'articule la notiond'apparence.Elle suppose le jugement, nous l'avons déjà vu, mais elle suppose surtout la croyance, Husserl parle de « foioriginaire dans le monde », Uhrdoxa.

L'apparence est une certaine façon d'adhérer à nos perceptions et c'est pourcette raison que la même expérience vécue par des individus différents, ne donne pas dans leur témoignage desrésultats identiques.

Ils ne « voient » pas, ne « ressentent » pas les mêmes choses, elles ne leur apparaissent pasde la même façon.Il faut donc maintenant chercher la profondeur de l'apparence si elle représente la seule « chose » à laquelle nousayons matériellement accès et chercher aussi les moyens de contrôler la validité de nos jugements sur elle.Le double constat de l'ambiguïté des apparences et de l'impossibilité de s'en passer conduit à penser que la seuleréalité indépassable nécessaire à toute connaissance de la vérité est le phénomène tel qu'il nous apparaît, àcondition qu'il soit « construit », structuré par le jugement d'un sujet.La conscience se définit alors simplement comme ce qui vise un objet et le phénomène visé nous donne alors à voirtout ce qu'il y a voir et à savoir sur la chose ; que l'on considère comme Kant un être en soi inaccessible au sujetpercevant, derrière ses manifestations sensibles ou que l'on saute le pas avec la naissance de la phénoménologie deHegel pour « revenir aux choses mêmes » selon le mot de Husserl, à une vérité des apparences et nier ce queNietzsche appellera « l'illusion des arrières-mondes » dans lesquels se cacherait l'être, la vraie réalité, l'essence,l'idée.La vérité ne doit plus être recherchée ailleurs que dans la description de la réalité du phénomène, ce qui va devenirle mot d'ordre phénoménologique repris par Husserl et Sartre.

Le monde et la conscience qui nous le rend accessible,sont à décrire avec objectivité pour retrouver la naïveté de ce contact premier, donc revenir aux apparencessimples en ayant tiré les leçons du scepticisme, en suspendant notre jugement, une véritable épochéphénoménologique où comme le précise Sartre dans l'introduction de « l'Être et le Néant » l'apparence : « n'est pasune manifestation inconsistante de cet être (…) celle-ci devient, au contraire, pleine positivité, son essence est un« paraître » qui ne s'oppose plus à l'être, mais qui en est la mesure, au contraire.

Car l'être d'un existant, c'estprécisément ce qu'il paraît.

»Par exemple l'électricité, comme phénomène, n'est pas en elle-même, autre chose que l'ensemble des actionsphysico-chimiques (électrolyse, incandescence, déplacement de l'aiguille du galvanomètre, etc…) qui nous larendent « apparente » : « L'apparence ne cache pas l'essence, elle la révèle : elle est l'essence.

»Ainsi l'apparence n'est pas vraie ou fausse en elle-même comme fait matériel, mais elle montre quelque chose etnotre jugement va la déterminer, lui accorder ou pas certaines qualités et c'est ce jugement, cette attribution quipeut recevoir ou pas notre assentiment, notre croyance, puis se révéler vrai ou faux, ce qui implique un moyen devérification.

En fait, presque malgré nous, l'apparence nous engage dans un processus de jugement, donc deconnaissance ; l'apparence, comme présence, ne pose aucun problème, elle ne devient problématique que si l'onprétend juger de sa nature ; la connaissance serait une possibilité du jugement et non une nécessité.

Demander s'ily a une vérité des apparences revient, par conséquent, à se demander si un jugement sans connaissance peut êtrevrai et on s'aperçoit que tout jugement est prédicatif, il dit quelque chose à propos de quelque chose, il donne unprédicat, un attribut à un sujet et comme tel, s'il se réfère à une apparence, il suppose la définition thomiste de lavérité comme adéquation de la pensée et du réel.

C'est l'intérêt, mais aussi la limite du projet phénoménologique,car même si l'apparence révèle l'essence, il reste que notre jugement doit se donner les moyens de ne pas laméjuger, de déduire au lieu d'induire quand cela est possible ; de calculer, de construire des méthodes à l'image des. »

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