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Le mot "foudre" dans l'oeuvre de DESCARTES

Publié le 29/07/2010

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descartes

LES METEORES, DISCOURS PREMIER, DE LA NATURE DES CORPS TERRESTRES.

 Et quoique les nues n’excèdent guère les sommets de quelques montagnes, et qu’on en voie même souvent de plus basses que les pointes de nos clochers, toutefois, à cause qu’il faut tourner les yeux vers le ciel pour les regarder, nous les imaginons si relevées que même les poètes et les peintres en composent le trône de Dieu, et font que là il emploie ses propres mains à ouvrir et fermer les portes des vents, à verser la rosée sur les fleurs et à lancer la foudre sur les rochers, Ce qui me fait espérer que si j’explique ici leur nature, en telle sorte qu’on n’ait plus occasion d’admirer rien de ce qui s’y voit ou qui en descend, on croira facilement qu’il est possible en même façon de trouver les causes de tout ce qu’il y a de plus admirable dessus la terre.

 Je n’oublierai pas aussi les tempêtes, le tonnerre, la foudre et les divers feux qui s’allument en l’air, ou les lumières qui s’y voient.

  LES METEORES, DISCOURS SEPTIEME, DES TEMPETES, DE LA FOUDRE ET DE TOUS LES AUTRES FEUX QUI S’ALLUMENT EN L’AIR.

Mais pour les orages qui sont accompagnés de tonnerre, d’éclairs, de tourbillons et de foudre, desquels j’ai pu voir quelques exemples sur terre, je ne doute point qu’ils ne soient causés de ce qu’y ayant plusieurs nues l’une sur l’autre, il arrive quelquefois que les plus hautes descendent fort à coup sur les plus basses.

 Pour les différences des éclairs, des tourbillons et de la foudre, elles ne dépendent que de la nature des exhalaisons qui se trouvent en l’espace qui est entre deux nues et de la façon que la supérieure tombe sur l’autre.

 mais lorsqu’elle tombe tout entière et assez vite, elle peut causer avec cela des tourbillons et de la foudre :

 Et lorsqu’il a rompu ainsi cette nue, il descend avec grande force vers la terre, puis de là remonte en tournoyant, à cause qu’il trouve de la résistance de tous côtés qui l’empêche de continuer son mouvement en ligne droite aussi vite que son agitation le requiert, et ainsi il compose un tourbillon qui peut n’être point accompagné de foudre ni d’éclairs, s’il n’y a point en cet air d’exhalaisons qui soient propres à s’enflammer ;

 mais lorsqu’il y en a, elles s’assemblent toutes en un tas, et étant chassées fort impétueusement avec cet air vers la terre, elles composent la foudre.

 Et cette foudre peut brûler les habits et raser le poil sans nuire au corps, si ces exhalaisons qui ont ordinairement l’odeur du soufre, ne sont que grasses et huileuses, en sorte qu’elles composent une flamme légère qui ne s’attache qu’aux corps aisés à brûler.

 Enfin, la foudre se peut quelquefois convertir en une pierre fort dure qui rompt et fracasse tout ce qu’elle rencontre, si parmi ces exhalaisons fort pénétrantes, il y en a quantité de ces autres qui sont grasses et ensoufrées, principalement s’il y en a aussi de plus grossières, semblables à cette terre qu’on trouve au fond de l’eau de pluie, lorsqu’on la laisse rasseoir en quelque vase ;

 Que si la nue s’ouvre par le côté, comme vers G, la foudre, étant élancée de travers, rencontre plus tôt les pointes des tours ou des rochers que les lieux bas, comme on voit vers H.

 Mais, lors même que la nue se rompt par le dessous, il y à raison pourquoi la foudre tombe plus tôt sur les lieux hauts et éminents que sur les autres :

 Enfin, ce n’est pas sans raison qu’on tient que le grand bruit, comme des cloches ou des canons, peut diminuer l’effet de la foudre ;

Mais comme nous avons déjà remarqué qu’il éclaire quelquefois sans qu’il tonne, ainsi aux endroits de l’air où il se rencontre beaucoup d’exhalaisons et peu de vapeurs, il se peut former des nues si peu épaisses et si légères que tombant d’assez haut l’une sur l’autre, elles ne font ouïr aucun tonnerre, ni n’excitent en l’air aucun orage, nonobstant qu’elles enveloppent et joignent ensemble plusieurs exhalaisons, dont elles composent non seulement de ces moindres flammes qu’on dirait être des étoiles qui tombent du ciel, ou d’autres qui le traversent, mais aussi des boules de feu assez grosses, et qui, parvenant jusques à nous, sont comme des diminutifs de la foudre.

 Mais tous ces feux ont fort peu de force à comparaison de la foudre ;

 au lieu que la foudre est principalement composée de ces plus vives et pénétrantes qui étant fort violemment pressées et chassées par les nues, emportent les autres avec soi jusqu’à terre.

  LES PRINCIPES DE LA PHILOSOPHIE, QUATRIEME PARTIE, Art. 87.

 Ainsi tous les mouvements violents suffisent pour produire du feu, et cela fait voir comment la foudre, les éclairs et les tourbillons de vent se peuvent enflammer ;

  LES PRINCIPES DE LA PHILOSOPHIE, QUATRIEME PARTIE, Art. 89.

Et la cause qui presse ainsi les exhalaisons pour faire qu’elles s’enflamment quand elles composent la foudre ou les éclairs est évidente, parce qu’elles sont enfermées entre deux nues, dont l’une tombe sur l’autre.

  Correspondance, année 1638, RÉPONSE DE Monsieur DESCARTES A Monsieur MORIN, 13 juillet 1638.

 car il semble à tels esprits que les vents, la foudre et les canons causent les plus impétueux mouvements qui puissent être.

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