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Alain: inconscient et idolâtrie du corps

Publié le 12/04/2005

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L'Inconscient est une méprise sur le Moi, c'est une idolâtrie du corps. On a peur de son Inconscient ; là se trouve logée la faute capitale. Un autre Moi me conduite qui me connaît et que je connais mal. L'hérédité est un fantôme du même genre. « Voilà mon père qui se réveille, voilà celui qui me conduit. Je suis par lui possédé » [...] On voit que toute l'erreur consiste à gonfler un terme technique qui n'est qu'un genre de folie. La vertu de l'enfance est une simplicité qui fuit de telles pensées [...] Encore faut-il apprendre à ne pas trop croire à cette hérédité, qui est un type d'idée creuse ; c'est croire qu'une même vie va recommencer. Au contraire, vertu, c'est se dépouiller de cette vie prétendue, c'est partir de zéro. « Rien ne m'engage ». « Rien ne me force ». « Je pense, donc je suis ». Cette démarche est un recommencement. Je veux ce que je pense et rien de plus. Alain
alain

« l'unité d'un moi volontaire et en dissolvant l'inconscient dans le corps.Notre psychisme doit être conçu comme une seule et même substance et non comme un mixte hétérogèned'éléments.

Car, refuser la division du « Je pense », c'est déjà pénétrer dans la sphère morale, c'est considérer qu'iln'est de pensée qu'au niveau d'un choix libre et réfléchi.

Conséquemment, l'activité onirique se trouve relayer à unsimple déferlement d'images subies et incohérentes.

La passivité de la raison induit la non-pensée, car durant lesommeil, la conscience, en état de relâchement, est assaillie par des représentations absurdes de nature corporelle.En revanche, dans le choix volontaire et rationnel, il y a pensée authentique, activité consciente.

Que l'on songe iciau remords, où je rattache mon passé à mon moi fondateur. Si l'inconscient n'est pas la pensée, alors qu'est-il exactement? Afin d'encore mieux chasser ce fantôme menaçant,cette apparition dont je me veux délivrer, pour enfin exorciser cette puissance maléfique, il me reste à ne voir enelle que le produit , le succédané de purs mécanismes.

L'inconscient est donc matériel, physiologique: c'est unensemble de phénomènes réductibles à des relations chimiques.

Ici, Alain retrouve Descartes et son dualisme: d'uncôté, la pensée qui se pense (le cogito) et de l'autre, des phénomènes corporels sans conscience d'être.

En dehorsde la chose ou substance pensante, tout n'est que mécanisme.

Aussi, l'inconscient est rejeté à de simplesmécanismes appartenant à la chose étendue: il y a des frémissements nerfs, une activité hormonale (rien d'autre!)que je puis maîtriser et dompter, en tant que sujet libre.Voilà donc renverser la théorie freudienne et son emprise tentaculaire du « çà ».

Avec Alain, l'inconscient s'anéantitsous le joug de l'omnipotente volonté. Dans le second paragraphe, l'inconscient, conçu toujours et uniquement comme chose physiologique, n'est plusqu'une matière pour ma volonté libre.

Mais là commence l'erreur si l'on en fait un principe directif et tout-puissant,une sorte d'esclave prenant l'ascendant sur le moi.

C'est ce qu'Alain dénomme sous le vocable d'« idolâtrie du corps»: on déifie l'inconscient, on rend une dévotion à une chimère inconsistance, à une représentation insignifiante, ence sens que l'on valorise une réalité objectale, physique dénuée de sens psychique.L'inconscient, loin d'être un oracle à écouter, une pensée profonde venue des profondeurs, n'est qu'une affection ducorps, une passion au sens classique de l'acception du terme où l'âme teintée de passivité, d'animalité subit lesmouvements de l'altérité physique.Or, ce qui n'est ni oracle, ni dieu, je vais l'idolâtrer et lui rendre un culte illégitime.

Et, c'est bien là que se trouvelogée bien plus que l'erreur, la faute, c'est-à-dire infraction à l'encontre de l'éthique.En effet, revendiquer cet inconscient, c'est se référer à un second moi qui nous conduit, c'est donc se défaire de saresponsabilité morale, se réfugier derrière un déterminisme creux, vide.

La notion d'hérédité est une mêmefantasmagorie démobilisatrice du même genre: je me figure mon être déterminé par mes ascendants, en unetransmission de toutes mes dispositions psychiques par mes aïeux.

Tout est déjà écrit dans cet aliénant destin: jerenonce, je n'endosse plus le poids de mon devenir , je fuis... En un dernier lieu, Alain récapitule le raisonnement antérieur.

La notion d'inconscient n'est en elle-même pasdangereuse en ce qu'elle ne renvoie qu'à des mouvements nerveux et physiques.

Mais, si on l'hypertrophie, celarelève de l'erreur (proposition erronée) et, bien plus, de la faute (manquement moral) où la sphère de laresponsabilité et de la liberté s'évanouissent. Ce texte présente l'insigne mérite, dans notre époque, qui s'est abritée souvent derrière un freudisme paresseux, quia maintes fois voulu éluder la responsabilité humaine en se protégeant avec la notion d'inconscient, de souligner lesdifficultés éthiques inhérentes à ce concept même, du moins quand on en fait un usage illégitime.Comme le prescrit Alain, le penseur soucieux d'éthique ne peut contourner facilement le problème de la recherchedes motifs inconscients qu'a imposée la révolution psychanalytique.

Or, toute la morale s'appuie et s'édifie sur le «Je », fondement unique de notre existence.

Par conséquent, donner à l'inconscient une place excessive, voirecentrale, c'est s'opposer à la morale, car le mot même d'inconscient véhicule des mythes très néfastes:irresponsabilité, fatalisme, abandon passif devant ce qui me détermine, m'aliène...Être moral, c'est comprendre que je suis l'auteur de mes actes, mais une visionsommaire de l'inconscient façonne les mentalités modernes, tend à nous faireidolâtrer notre passé, notre enfance, nos forces instinctuelles, notre libido.

Cecontre quoi Alain réhabilité la maîtrise de soi, la volonté libre et réfléchie.En soulignant que l'homme est l'auteur de ses actes et de ses choix, l'auteur des «Propos sur le bonheur » nous invite à une reconquête de nous-mêmes et de noschoix.

Sartre dans « L'Être et le Néant » a prolongé remarquablement ces analysesen dénonçant l'abdication de nos responsabilités sous le concept de « mauvaise foi» qui ne peut se comprendre qu'à partir des postulats de la translucidité de laconscience, de son autonomie et de sa liberté.

Ce mode d'être inauthentiquequalifie l'attitude du « salaud » qui se donne bonne conscience à bon prix, le fait de la conscience qui se masque à elle-même sa propre vérité. Néanmoins, pour intéressante qu'elle soit, la thèse d'Alain présente certaines difficultés.

Le mérite de Freud étaitd'apporter du sens à toutes nos représentations: le rêve, les actes manqués, la libre association devenaientintelligibles, cohérents dans et par la biographie de l'individu.

Selon les vues d'Alain, à l'inverse, parole, geste et actequi échappent à ma conscience, ne possèdent pas de signifiance et ne relèvent que de mécanismes naturels, de FATALISME : Doctrine selon laquelle tout homme a un destininévitable, si bien que la libertéest une illusion.

L'argumentparesseux, fataliste, rapportépar Cicéron, enseigne unepassivité totale, puisqu'il estinutile d'essayer d'échapper àson destin.. »

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