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L'histoire a-t-elle nécessairement recours au témoignage ?

Publié le 16/02/2004

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histoire

Le fait historique est un fait passé, donc n'est pas observable. Mais on peut reconstruire le fait passé à partir de ses « traces « présentes, des « documents « qui subsistent (nous avons vu que même en physique il n'est pas d'observation passive du donné). Ces documents sont d'abord les témoignages, les récits qui nous ont légués les générations précédentes. Mais ces récits, malheureusement, n'ont pas toujours été établis selon les exigences de l'esprit scientifique. Nous pouvons connaître l'histoire romaine d'après Tite-Live, mais Tite-Live n'a fait que reprendre les écrits de ses prédécesseurs Polybe ou Valérius Antias. Et quelle garantie nous offrent les premiers témoins ? On a dit que l'historien se trouve dans la condition d'un physicien qui ne connaîtrait les faits que par le compte rendu d'un garçon de laboratoire ignorant et menteurs.         

L'historien ne peut utiliser un témoignage qu'en prenant toute une série de précautions dont l'ensemble constitue la Critique.

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« Les faux se décèlent généralement, soit par des erreurs matérielles, soit par desinvraisemblances commises par le faussaire.

Voici exemple : « au mois de juillet 1857, le mathématicien Michel Chasles communiqua à l'académie des Sciences tout un lot de lettres inédites de Pascal , que lui avait vendues le faussaire Vrain-Lucas .

Il en ressortait que l'auteur des « Provinciales » avait, avant Newton , formulé le principe de l'attraction universelle.

Un savant anglais s'étonna.

Comment expliquer, disait-il, que ces textes fassentétat de mesures astronomiques effectuées bien des années après la mort de Pascal et dont Newton lui-même n'eut connaissance qu'une fois publiées les premières éditions de son ouvrages ? » ( Boch ).

Vrain-Lucas ne s'embarrassa pas pour si peu : il fabriqua de prétendues lettres de Galilée à Pascal , où l'illustre astronome fournissait à celui-ci les mesures en question.

C'était peu vraisemblable : car, à la mort de Galilée , Pascal n'avait que 18 ans ! Mais quoi ! ce n'était qu'une raison de plus d'admirer la précocité de songénie ! Malheureusement, dans une de ces lettres, Galilée se plaignait de n'écrire qu'au prix de beaucoup de fatigue pour ses yeux.

La lettre était datée de 1641.

Or Galilée était complètement aveugle depuis 1637 ! ! ! Mais l'histoire scientifique ne repose pas seulement sur des témoignages, sur des textes (comme leshistoriens français l'ont cru au XIX ième parce qu'ils avaient reçu à l'Ecole Normale supérieure une formationexclusivement littéraire).

A côté des témoignages volontaires, il y a des vestiges, « documents involontaires que sans préméditation le passé a laissé tomber le long de sa route », monnaies, poteries, édifices : d'où l'utilité des sciences auxiliaires, archéologie, numismatique.

Marrou (in « De la connaissance historique ») écrit : « Grâce au progrès de la documentation accumulée et exploitée par nos sciences auxiliaires, grâce aux monnaies, auxinscriptions, aux papyrus, nous pouvons aujourd'hui connaître Tibère , Claude ou Néron par bien d'autres voies que les Annales de Tacite ».

C'est ainsi que les « tables claudiennes » de Lyon exhumées par l'archéologie nous ont conservé le texte authentiques d'un discours de l'empereur Claude .

On peut confronter cette inscription avec le discours tel qu'il est rapporté par Tacite .

Tacite (comme l'a montré Carcopino ) avait le texte authentique sous les yeux et l'a quelque peu transformé avec ses préjugés sénatoriaux.

Ainsi du même coup nous rétablissons le discoursde Claude en sa vérité et nous avons des lumières sur le point de vue de Tacite . Mais la reconstruction du passé présente inévitablement d'énormes lacunes.

Ce ne sont pas nécessairementles documents les plus importants qui se sont conservés.

Certains documents demeurent inaccessibles ( La compagnie de Jésus ne livre pas ses « Collections au profane », la Banque de France ne permet pas aux historiens du Premier Empire de consulter ses registres).

D'autres documents sont perdus, détruits.

Alain disait : « Un document est un vieux papier que la dent des rats, la négligence des héritiers, les flammes de l'incendie...

lesexigences de la chaise percée ont épargné par hasard ! ». Mais de toute façon l'esprit critique ne suffit pas pour révéler le fait historique.

L'esprit critique, dit Marrou , peut nous empêcher de communiquer avec une époque passée.

L'attitude des historiens positivistes ressembleraittrop à celle que prête Stendhal à ses personnages (« je suppose toujours que la personne qui me parle veut me tromper »).

Marrou demande à l'historien « sympathie » et « amitié » pour les témoins qu'il convoque à son tribunal (« on ne peut connaître personne sinon par l'amitié », dit Augustin ).

Pour faire un travail d'histoire religieuse, il faut avoir fait soi-même l'expérience de la vie spirituelle et ne pas être dépourvu de sens religieux.

De même, ce n'estpas l'impartial et indifférent Xénophon qui nous fait le mieux connaître Socrate , mais bien Platon , le disciple enthousiaste.

Seulement, une nouvelle difficulté surgit ici.

Si l'historien est en communication affective avec lepassé, ne risque-t-il pas en croyant découvrir le passé vivant en une « résurrection intégrale » ( Michelet ) de le recouvrir à son insu de ses propres passions, de projeter en lui sa propre subjectivité ? Ce sont précisément lesépoques qui ont le plus vénéré le passé (moyen âge, romantisme) qui ont, affectivement, attaché le plusd'importance aux traditions, aux origines, ce sont ces époques qui ont fait précisément les récits les moins objectifs,les plus entachés de passion, les plus mensongers ! Cette difficulté est largement soulignée d'ailleurs par lesphilosophes et par les historiens contemporains, comme nous allons le montrer maintenant. [1] La critique externe porte sur la forme du document, c'est-à-dire : 1) sur son intégrité (critique de restitutiondestinée à rétablir le document, qui a pu être plus ou moins altéré, dans sa forme originelle) ; 2) sur sonauthenticité (critique de provenances destinée à s'assurer si le document est bien de la source : auteur, époque,etc., à laquelle il est attribué). [2] La critique interne porte sur le contenu du document, c'est-à-dire d'abord sur sa signification (critiqued'interprétation) : bien des documents doivent être déchiffrés ( Champollion ), traduits etv aussi interprétés (allusions à d'autres faits, métaphores, symboles, etc.) – Tout ce travail constitue ce qu'on appelle la critiqued'érudition, car l'historien a besoin de s'appuyer ici sur certaines sciences spéciales, souvent très techniques, qu'onappelle parfois les « sciences auxiliaires de l'Histoire » : archéologie, épigraphie, paléographie, numismatique etc.... Ce travail, déjà fort complexe, qui suffit pour les documents ordinaires, ceux qui ne sont que des traces, desvestiges du passé, se complique encore pour ceux qui sont des témoignages, c'est-à-dire qui impliquent l'assertiond'un « témoin », parce qu'ils sont destinés à renseigner, soit les contemporains, soit la postérité.

Ce sera alors la. »

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