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Est-il raisonnable de critiquer le progrès technique ?

Publié le 20/01/2004

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technique

L'ensemble des moyens dont se sont dotés les hommes pour transformer la nature leur ont assuré une existence moins rude, mais ces progrès immenses réalisés par la technique s'accompagnent aussi de quelques conséquences néfastes. On peut assurément adresser à la technique moderne certaines critiques, mais comment s'assurer que celles-ci sont toutes raisonnables? Est-il vraiment raisonnable de critiquer le progrès technique ?

[I. Quelles sont les critiques qui peuvent être adressées au progrès technique? En quoi certaines peuvent-elles être considérées comme déraisonnables ?]

[II. Mais ne serait-il pas encore plus déraisonnable de s'abstenir de toute critique à l'égard de la technique ? Comment critiquer raisonnablement le progrès technique ?]  

 

technique

« [II.

Mais ne serait-il pas encore plus déraisonnable de s'abstenir de toute critique à l'égard de la technique? Comment critiquer raisonnablement le progrès technique ?] L'actualité nous fournit presque quotidiennement des exemples de dégâts considérables et peut-être irréversiblessubis par la nature du fait du développement non maîtrisé de nos techniques: pollution des océans, grandesmétropoles devenues irrespirables, diminution de la couche d'ozone, risque de modifications climatiques...

MichelSerres, dans Le Contrat naturel, parle d'une nouvelle forme de violence moderne qui n'oppose plus seulement lesindividus entre eux, mais l'ensemble des hommes contre la nature.Le rapport des forces entre les hommes et la nature semble s'être modifié: jadis, face à la nature en dépit de toutesses forces, l'homme restait toujours infiniment petit.

C'est aujourd'hui la nature qui révèle les signes de savulnérabilité.

Peut-on vouloir pour les hommes à venir une existence invivable sur une planète dévastée? Ne serait-ilpas temps d'entendre l'avertissement d'Antoine de Saint-Exupéry: « Nous n'héritons pas la Terre de nos parents,nous l'empruntons à nos enfants » ? Le projet d'une destruction programmée de la planète ne paraît pas plusraisonnable que celui d'une mise en cause radicale du progrès technique.

Entre ces deux projets déraisonnables,est-il possible de trouver une voie médiane ?Dans Le Principe Responsabilité, Hans Jonas propose à ce sujet une analyse intéressante des nouveaux rapportsentre l'homme et la nature.

Selon cet auteur, les progrès techniques accomplis par l'homme au cours de cesdernières décennies ont considérablement élargi le champ de la responsabilité humaine et nous obligent à reformulerles termes de notre éthique.

Les morales du passé étaient fondées sur la proximité et la réciprocité.

Ellesconseillaient à l'homme de ne pas nuire à son prochain ou de faire avec celui-ci comme on ferait envers soi-même.Mais les pouvoirs accrus acquis par l'homme du fait de sa puissance technique lui donnent aujourd'hui la possibilitéde faire du mal à un être qui est fort éloigné de lui et à l'égard duquel ne peut se poser la question de la réciprocité:un homme qui n'existe pas encore, celui des générations à venir.

Ainsi, selon Hans Jonas, devrions-nous repensernotre éthique de façon à l'adapter aux conditions présentes.

Il propose ainsi un nouvel impératif catégorique quiprendrait en compte notre responsabilité à l'égard des hommes à venir.

Un impératif adapté au nouveau type del'agir humain et qui s'adresse au nouveau type de sujets de l'agir s'énoncerait à peu près ainsi: « Agis de façon queles effets de ton action soient compatibles avec la permanence d'une vie authentiquement humaine sur Terre »; oupour l'exprimer négativement : « Agis de façon que les effets de ton action ne soient pas destructeurs pour lapossibilité future d'une telle vie.

»Sans doute est-ce dans ces termes que l'on pourrait raisonnablement limiter leseffets de notre puissance technique. onas: " La technique moderne a introduit des actions d'un ordre de grandeur tellement nouveau, avec des objets tellement inédits et des conséquences tellement inédites, que le cadre de l'éthique antérieure ne peut plus lescontenir.

[...] Sans doute les anciennes prescriptions de l'éthique du prochain - les prescriptions de la justice, de lamiséricorde, de l'honnêteté, etc.

-, en leur immédiateté intime, sont-elles toujours valables pour la sphère la plusproche, quotidienne, de l'interaction humaine.

Mais cette sphère est surplombée par le domaine croissant de l'agircollectif dans lequel l'acteur, l'acte et l'effet ne sont plus les mêmes que dans la sphère de la proximité et qui parl'énormité de ses forces impose à l'éthique une nouvelle dimension de responsabilité jamais imaginée auparavant.Qu'on considère par exemple [...], la vulnérabilité critique de la nature par l'intervention technique de l'homme - unevulnérabilité qui n'avait jamais été pressentie avant qu'elle ne se soit manifestée à travers les dommages déjàcausés.

Cette découverte, dont le choc conduisait au concept et aux débuts d'une science de l'environnement(écologie), modifiait toute la représentation de nous-mêmes en tant que facteur causal dans le système plus vastedes choses.

Par les effets elle fait apparaître au grand jour que non seulement la nature de l'agir humain s'estmodifiée de facto et qu'un objet de type entièrement nouveau, rien de moins que la biosphère entière de la planète,s'est ajouté à ce pour quoi nous devons être responsables parce que nous avons pouvoir sur lui.

Et un objet dequelle taille bouleversante, en comparaison duquel tous les objets antérieurs de l'agir humain ressemble à des nains !La nature en tant qu'objet de la responsabilité humaine est certainement une nouveauté à laquelle la théorie éthiquedoit réfléchir.

Quel type d'obligation s'y manifeste ? Est-ce plus qu'un intérêt utilitaire ? Est-ce simplement laprudence qui recommande de ne pas tuer la poule aux oeufs d'or ou de ne pas scier la branche sur laquelle on estassis ? Mais le « on » qui y est assis et qui tombe peut-être dans l'abîme sans fond : qui est-ce ? Et quel est monintérêt à ce qu'il soit assis ou qu'il tombe ? " Avez-vous compris l'essentiel ? 1 Pourquoi « l'éthique du prochain s'avère-t-elle aujourd'hui insuffisante ?2 Quel est l'objet nouveau de l'agir humain dans la technologie moderne ?3 Quelle est la conséquence morale du pouvoir accru que nous procure la technique moderne ? Réponses: 1 - Parce que cette conception morale valait essentiellement sur le plan de l'action individuelle, réglait des rapportsde proximité entre individus.

Dans notre monde technique, ni les décisions, ni les actions, ni leurs effets ne sont duressort d'un individu seul, quel qu'il soit, ils ne supposent pas non plus des rapports de proximité, et en conséquencede tels préceptes restent lettre morte.2- Rien de moins que la nature elle-même, l'univers matériel dans sa totalité.

Les actions humaines ont désormaisdes effets planétaires.

Et pas seulement pour le présent, mais aussi pour l'avenir.. »

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