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Que signifie, dans l'expérience humaine, la référence à un absolu ?

Publié le 11/02/2011

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• Une tradition assez ancienne définit la métaphysique, comme ce qui concerne l'inconditionné, l'absolu, l'éternel, et par conséquent va au-delà de la physique. La philosophie critique de Kant en a défini plus précisément le statut en la concevant comme le domaine de tout ce qui dépasse la possibilité même de l'expérience humaine.    • Si l'on suit le point de vue kantien, la métaphysique ne peut en aucun cas prétendre produire des connaissances. Elle n'est pas une science. Mais cela ne l'empêche pas d'avoir une fonction, une valeur normative — dans le domaine de la connaissance comme dans celui de l'action. C'est à une définition de cette fonction éventuelle que le sujet se réfère.   

« réel qu'il « rend visible »), et référence ultime de toute sagesse pratique. Sur le seul plan de la connaissance, où les notions mathématiques ont une valeur exemplaire par l'idéalité qui lescaractérise, l'Idée du Bien définit un inconditionné (les notions mathématiques restant malgré tout solidaires d'unpoint de départ qui les conditionne, donc hypothétiques). — Descartes.

Recours à un inconditionné dans la mesure où, dans l'expérience humaine, la validité des véritésmathématiques ou des relations évidentes ne saurait être pleinement assurée au sujet connaissant indépendammentd'une «caution» qui garantisse ces vérités ou relations.

Le thème de la véracité divine (Dieu, infiniment bon, ne peutpas vouloir me tromper) assujettit en fin de compte la possibilité d'une connaissance à la démonstration del'existence de Dieu.

Celle-ci repose sur Vidée de parfait qui, selon Descartes, implique l'existence d'un être qui luicorresponde (cf.

Méditations métaphysiques, V).

« ...

il n'y a pas moins de répugnance de concevoir un Dieu, c'est-à-dire un être souverainement parfait, auquel manque l'existence, c'est-à-dire auquel manque quelque perfection,que de concevoir une montagne qui n'ait pas de vallée.

» Une telle référence à l'absolu sera contestée par Kant, quirécusera l'argument cartésien, qui outrepasse les limites de l'expérience et confond sans vergogne ce qui est del'ordre de la conception (l'essence) et ce qui est de l'ordre de l'existence réelle. — Kant.

Critique de la métaphysique classique et des confusions qu'elle a opérées en prétendant connaître l'absolu— et en affirmant dogmatiquement son existence.

Il y a certes, présent en l'homme, un besoin presque naturel dese référer à un absolu.

Mais cela ne justifie aucune transgression dogmatique des limites de l'expérience.

Lamétaphysique traditionnelle est tombée dans l'illusion de pouvoir ériger en données existant réellement les produitsde simples conjectures (suppositions).

Or l'absolu, par définition, ne peut être qu'un objet de croyance.

Une telleredéfinition de son statut, reposant sur une stricte délimitation des pouvoirs respectifs de la raison, del'entendement et de la sensibilité, permet d'échapper aux impasses que constituent les contradictions incessantesdes thèses métaphysiques classiques (les fameuses « antinomies» décrites dans la Critique de la raison pure).

Faut-il donc abandonner toute métaphysique, comme semble le dire un Voltaire lorsqu'il tourne en dérision les follesaventures de la métaphysique traditionnelle? (cf.

Candide et le thème du jardin, sphère rigoureusement délimitée dela modeste expérience humaine).

Kant pense que non, et il critique vivement ceux qui reprochent à Platon d'avoircherché à définir des normes idéales — inutiles du seul fait qu'elles seraient irréalisables.

La référence à de tellesnormes est au contraire nécessaire et précieuse pour susciter un progrès effectif de l'homme. « Qu'un homme n'agisse jamais d'une manière adéquate à ce que contient l'idée pure de vertu, cela ne prouve pasqu'il y ait dans cette notion quelque chose de chimérique.

Cela n'empêche pas, en effet, que tout jugement sur lavaleur ou le manque de valeur morale ne soit possible qu'au moyen de cette idée; par suite, cette idée sertnécessairement de fondement à tout progrès vers la perfection morale...

» (Critique de la raison pure.

Dialectique transcendantale, (livre I, première section, édition des Presses Universitairesde France, page 264). Le recours à l'absolu, dans l'expérience humaine, est donc légitime à un double point de vue : dans le domaine moral.

Valeur de l'hypothèse du libre arbitre (postulat de la raison pratique), qui permet deconcevoir un acte échappant au strict déterminisme naturel des inclinations sensibles (c'est-à-dire désintéressé etpur).

La possibilité d'un tel acte rend compte du fait moral.

Elle fait de la volonté un pouvoir d'initiative autonome(cf.

la rubrique la personne : texte de Kant montrant l'implication entre la visée de l'humanité comme fin en soi et lecaractère inconditionnel de l'acte moral, lié à la représentation d'un impératif catégorique) ; dans le domaine de la connaissance.

Les idées de la Raison, définies comme principes régulateurs et non commeconnaissances effectives, peuvent jouer le rôle de points de repère, de guides dans l'explication.

Ainsi, l'hypothèsede la finalité naturelle peut-elle se révéler féconde dans l'explication des phénomènes de la vie (cf.

Critique de laraison pure, édition citée, page 452: «De l'usage régulateur des idées de la Raison»). — Note annexe.

Il faut remarquer, dans le plaidoyer kantien en faveur de Platon, un souci capital de ne jamaisaligner le droit sur le fait.

Qu'une idée ne soit pas jugée réalisable dans une situation de fait ne l'invalide pas en tantqu'idéal, dont la fonction critique et dynamique reste intacte.

La position de Kant par rapport aux détracteurs «réalistes » de Platon est comparable à celle de Rousseau par rapport à Voltaire.

Même refus de régler le droit sur lefait, même refus de disqualifier une exigence idéale au nom d'un prétendu réalisme [cf.

sur ce point la querelleRousseau/Voltaire à propos de l'égalité : pour Voltaire, celle-ci est une chimère; pour Rousseau, elle s'impose commenorme à atteindre.

Comparer, pour approfondir : Voltaire, Dictionnaire philosophique, article «Égalité» (ÉditionsGarnier-Flammarion, page 172), et Rousseau, Du contrat social, livre II, chapitre II].. »

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