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absolu ; car les citoyens et sujets, qui sont habitués à recevoir les ordres des magistrats, ne sont pas, en ces traverses, portés à obéir aux siens ; et il y aura toujours, dans les temps troubles, pénurie de gens sur qui il puisse compter.

Publié le 01/10/2013

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temps
absolu ; car les citoyens et sujets, qui sont habitués à recevoir les ordres des magistrats, ne sont pas, en ces traverses, portés à obéir aux siens ; et il y aura toujours, dans les temps troubles, pénurie de gens sur qui il puisse compter. Un tel prince, en effet, ne peut se fonder sur ce qu'il voit par temps calme, quand les citoyens ont besoin de l'État ; car alors chacun court, chacun promet, et chacun veut mourir pour lui, quand la mort est loin ; mais dans l'adversité, quand l'État a besoin des citoyens, alors on en trouve peu. Et d'autant plus périlleuse est cette expérience, qu'on ne peut la faire qu'une fois. Aussi un prince sage doit-il s'aviser d'un moyen par où ses concitoyens, toujours et quelle que soit la nature des temps, aient besoin de l'État et de lui : et toujours, après, ils lui seront fidèles. X COMMENT SE DOIVENT ÉVALUER LES FORCES. DE TOUTES LES MONARCHIES Il convient, lorsqu'on examine les caractères de ces monarchies, de s'arrêter à une autre considération : à savoir, si un prince a un État suffisant pour pouvoir, en cas de besoin, tenir par lui-même, ou bien s'il est toujours dans la nécessité d'être défendu par autrui. Et pour mieux éclairer ce point, je dis que je juge capables de tenir par eux-mêmes ceux qui, par abondance d'hommes ou d'argent, peuvent rassembler une armée suffisante et livrer bataille à quiconque vient les attaquer ; et de même, je juge qu'ont toujours besoin d'autrui ceux qui ne peuvent affronter l'ennemi en rase campagne, mais sont contraints de se réfugier à l'intérieur des murailles et de les garder. Pour le premier cas, nous avons exposé, et dans la suite nous dirons ce qu'il faut faire. Pour le second cas il n'y a rien d'autre à dire que d'inciter de tels princes à fortifier et approvisionner leur ville, et à ne tenir aucun compte de la campagne. Et quiconque aura bien fortifié sa ville, et quant aux autres rapports avec les sujets se sera comporté comme on a dit plus haut et dira plus loin, on hésitera toujours beaucoup à l'attaquer ; car les hommes sont toujours hostiles aux entreprises où ils voient de la difficulté, et on ne peut voir de la facilité à attaquer qui a une ville solide et n'est point haï de son peuple. Les villes d'Allemagne sont tout à fait libres, ont peu de territoire, obéissent à l'empereur quand il leur plaît et ne craignent ni lui ni aucun autre potentat de leur entourage ; car elles sont si bien fortifiées que chacun pense qu'il doit être pénible et difficile de s'en emparer. Toutes en effet ont les murailles et les fossés qu'il leur faut, ont de l'artillerie en suffisance, possèdent toujours dans les magasins publics à boire et à manger et de quoi se chauffer pour un an ; et outre cela, pour pouvoir nourrir le menu peuple, et ce sans perte pour le trésor public, la communauté a toujours pour une année à pouvoir lui donner de la besogne en ces métiers qui sont le nerf et la vie de la cité et de la pratique desquels le petit peuple tire sa subsistance. Elles tiennent aussi en grand honneur les exercices militaires, et à cet égard elles ont nombre d'institutions pour les entretenir. Un prince, donc, s'il a une ville forte et qu'il ne se fasse pas haïr, ne peut être attaqué ; et si pourtant il se trouvait quelqu'un pour l'attaquer, celui-là s'en retournerait avec sa courte honte ; car les choses du monde sont si variables qu'il est quasi impossible qu'on puisse avec ses armées rester un an au siège d'une ville sans rien faire. Et à qui répliquerait : si le peuple a ses biens au-dehors et qu'il les voie brûler, il ne l'endurera pas, et la longueur du siège et l'égoïsme lui feront oublier le prince, je réponds qu'un prince puissant et courageux surmontera toujours toutes ces difficultés, donnant tantôt à ses sujets l'espoir que le mal ne sera pas long, tantôt leur faisant craindre la cruauté de l'ennemi, tantôt s'assurant adroitement de ceux qui lui paraîtraient trop hardis. Outre cela l'ennemi, logiquement, doit brûler et ruiner le pays lors de son arrivée, et dans un temps où l'esprit des hommes est encore chaud et empressé à la défense ; c'est pourquoi le prince doit d'autant moins s'inquiéter que quelques jours après, quand les esprits sont refroidis, déjà sont faits les dommages, subis les maux, et il n'y a plus de remède : et alors ils en viennent d'autant plus à s'unir à leur prince qu'il leur paraît que celui-ci a des obligations envers eux puisque ont été brûlées leurs maisons, ruinées leurs possessions, pour sa défense. Et la nature des hommes est de s'attacher aussi bien par les bienfaits qu'ils font que par ceux qu'ils reçoivent.
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« X COMMENT SE DOIVENT ÉVALUER LES FORCES.

DE TOUTES LES MONARCHIES Il convient, lorsqu'on examine les caractères de ces monar- chies, de s'arrêter à une autre considération : à savoir, si un prince a un État suffisant pour pouvoir, en cas de besoin, tenir par lui-même, ou bien s'il est toujours dans la nécessité d'être défendu par autrui.

Et pour mieux éclairer ce point, je dis que je juge capables de tenir par eux-mêmes ceux qui, par abondance d'hommes ou d'argent, peuvent rassembler une armée suffisante et livrer bataille à quiconque vient les attaquer ; et de même, je juge qu'ont toujours besoin d'autrui ceux qui ne peuvent affronter l'ennemi en rase campagne, mais sont contraints de se réfugier à l'intérieur des murailles et de les garder.

Pour le pre- mier cas, nous avons exposé, et dans la suite nous dirons ce qu'il faut faire.

Pour le second cas il n'y a rien d'autre à dire que d'inciter de tels princes à fortifier et approvisionner leur ville, et à ne tenir aucun compte de la campagne.

Et quiconque aura bien fortifié sa ville, et quant aux autres rapports avec les sujets se sera comporté comme on a dit plus haut et dira plus loin, on hésitera toujours beaucoup à l'attaquer ; car les hommes sont toujours hostiles aux entreprises où ils voient de la difficulté, et on ne peut voir de la facilité à attaquer qui a une ville solide et n'est point haï de son peuple.

Les villes d'Allemagne sont tout à fait libres, ont peu de territoire, obéissent à l'empereur quand il leur plaît et ne. »

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