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Le Corricolo --Ce que je veux savoir, dit-elle en essayant de donner a sa voix l'assurance de l'ironie; je desire savoir le passe: il m'indiquera la foi que je puis avoir dans l'avenir.

Publié le 11/04/2014

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Le Corricolo --Ce que je veux savoir, dit-elle en essayant de donner a sa voix l'assurance de l'ironie; je desire savoir le passe: il m'indiquera la foi que je puis avoir dans l'avenir. --Vous etes nee a Salerne, dit la vieille; vous etes riche, vous etes noble, vous avez eu vingt ans a la derniere fete de la Madone de l'Arc, et vous avez epouse dernierement un homme dont vous avez ete longtemps separee et que vous aimez profondement. --C'est cela, c'est bien cela, dit Lia en palissant; et voila pour le passe. --Voulez-vous savoir le present? dit la vieille en fixant sur la comtesse ses petits yeux de vipere. --Oui, dit Lia apres un instant de silence et d'hesitation; oui, je le veux. --Vous vous sentez le courage de le supporter? --Je suis forte. --Mais si je rencontre juste, que me donnerez-vous? demanda la vieille. --Cette bourse, repondit la comtesse en tirant de sa poche un petit filet enrichi de perles, et dans laquelle on voyait briller, a travers la soie, l'or d'une vingtaine de sequins. La vieille jeta sur l'or un regard de convoitise, et etendit instinctivement la main pour s'en emparer. --Un instant! dit la comtesse, vous ne l'avez pas encore gagne. --C'est juste, signora, repondit la vieille. Rendez-moi votre main. Lia rendit sa main a la bohemienne. --Oui, oui, le present, murmura la vieille, le present est une triste chose pour vous, signora; car voici une ligne qui va du pouce a l'annulaire, et qui me dit que vous etes jalouse. --Ai-je tort de l'etre? demanda Lia. --Ah! cela, je ne puis vous le dire, reprit la bohemienne, car ici la ligne se confond avec deux autres. Seulement ce que je sais, c'est que votre mari a un secret qu'il vous cache. --Oui, c'est cela, murmura la comtesse; continuez. --C'est une femme qui est l'objet de ce secret, reprit la bohemienne. --Jeune? demanda Lia. --Jeune?... oui, jeune, repondit la bohemienne apres un moment d'hesitation. --Jolie? continua la comtesse. --Jolie? Je ne la vois qu'a travers un voile; je ne puis donc vous repondre. --Et ou est cette femme? --Je ne sais. DEUXIEME PARTIE. 204 Le Corricolo --Comment, tu ne sais? --Non! je ne sais pas ou elle est aujourd'hui. Il me semble qu'elle est dans une eglise, et je ne vois pas de ce cote-la; mais je puis vous dire ou elle sera demain. --Et ou sera-t-elle demain? --Demain elle sera dans une petite chambre de la rue San-Giacomo, no. 11, au troisieme etage, ou elle attendra votre mari. --Je veux voir cette femme! s'ecria la comtesse en jetant sa bourse a la bohemienne. Cinquante sequins si je la vois. --Je vous la ferai voir, dit la vieille; mais a une condition. --Parle. Laquelle? --C'est que, quelque chose que vous voyiez et que vous entendiez, vous ne paraitrez point. --Je te le promets. --Ce n'est pas assez de le promettre, il faut le jurer. --Je te le jure. --Sur quoi? --Sur les plaies du Christ. --Bien. Ensuite il faudrait vous procurer un vetement de religieuse, afin que, si vous etes rencontree, vous ne soyez pas reconnue. --J'en ferai demander un au couvent de Sainte-Marie-des-Graces, dont ma tante est abbesse; ou plutot... attends... J'irai des le matin sous pretexte de lui faire une visite; viens m'y prendre a dix heures avec une voiture fermee, et attends-moi a la petite porte qui donne dans la rue de l'Arenaccia. --Tres bien, dit la bohemienne; j'y serai. Lia rentra chez elle, et la vieille s'eloigna en branlant la tete et en comptant son or. A deux heures Odoardo rentra. Lia l'entendit demander au valet de chambre si l'on n'avait pas apporte quelque lettre pour lui. Le valet de chambre repondit que non. Lia fit semblant de n'avoir rien entendu que les pas du comte, pas qu'elle connaissait si bien, et elle ouvrit la porte en souriant. --Oh! quelle bonne surprise! lui dit-elle. Tu es rentre plus tot que je n'esperais. --Oui, dit Odoardo en jetant les yeux du cote du Vesuve; oui, j'etais inquiet. Ne sens-tu pas qu'il fait etouffant? ne vois-tu pas que la fumee du Vesuve est plus epaisse que d'habitude? La montagne nous promet quelque chose! DEUXIEME PARTIE. 205

« —Comment, tu ne sais? —Non! je ne sais pas ou elle est aujourd'hui.

Il me semble qu'elle est dans une eglise, et je ne vois pas de ce cote-la; mais je puis vous dire ou elle sera demain. —Et ou sera-t-elle demain? —Demain elle sera dans une petite chambre de la rue San-Giacomo, no.

11, au troisieme etage, ou elle attendra votre mari. —Je veux voir cette femme! s'ecria la comtesse en jetant sa bourse a la bohemienne.

Cinquante sequins si je la vois. —Je vous la ferai voir, dit la vieille; mais a une condition. —Parle.

Laquelle? —C'est que, quelque chose que vous voyiez et que vous entendiez, vous ne paraitrez point. —Je te le promets. —Ce n'est pas assez de le promettre, il faut le jurer. —Je te le jure. —Sur quoi? —Sur les plaies du Christ. —Bien.

Ensuite il faudrait vous procurer un vetement de religieuse, afin que, si vous etes rencontree, vous ne soyez pas reconnue. —J'en ferai demander un au couvent de Sainte-Marie-des-Graces, dont ma tante est abbesse; ou plutot... attends...

J'irai des le matin sous pretexte de lui faire une visite; viens m'y prendre a dix heures avec une voiture fermee, et attends-moi a la petite porte qui donne dans la rue de l'Arenaccia. —Tres bien, dit la bohemienne; j'y serai. Lia rentra chez elle, et la vieille s'eloigna en branlant la tete et en comptant son or. A deux heures Odoardo rentra.

Lia l'entendit demander au valet de chambre si l'on n'avait pas apporte quelque lettre pour lui.

Le valet de chambre repondit que non. Lia fit semblant de n'avoir rien entendu que les pas du comte, pas qu'elle connaissait si bien, et elle ouvrit la porte en souriant. —Oh! quelle bonne surprise! lui dit-elle.

Tu es rentre plus tot que je n'esperais. —Oui, dit Odoardo en jetant les yeux du cote du Vesuve; oui, j'etais inquiet.

Ne sens-tu pas qu'il fait etouffant? ne vois-tu pas que la fumee du Vesuve est plus epaisse que d'habitude? La montagne nous promet quelque chose! Le Corricolo DEUXIEME PARTIE.

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