LA MORT DE STENDHAL

   Il en était là, il était en pleine possession de son talent, à la veille peut-être de quelque création nouvelle, lorsqu'en août 1839, un changement de ministère, la chute de Molé brise son élan, met fin à son congé, le rejette à Civita-Vecchia, dans l'isolement, dans l'ennui. Et pendant des mois, en effet, il y traîne misérablement sa vie. Un jour pourtant, en octobre 1840, son ciel s'illumine. Naguère, comptant peu sur le succès, il avait écrit dans ses Souvenirs d'égotisme : « Je regarde, et j'ai toujours regardé mes ouvrages comme des billets mis à la loterie. « Et voici qu'il a gagné un gros lot. Il trouve dans son courrier un numéro de la Revue parisienne, revue que Balzac vient de fonder et rédige à lui tout seul, et ce numéro n'est qu'un long dithyrambe à la gloire de la Chartreuse ! Soixante-dix pages où il n'est question que de lui, où il est successivement comparé à Machiavel, à La Rochefoucauld, à Byron, à Corneille, à Shakespeare !