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Ce n'est point une nécessité qu'il y ait du sang et des morts dans une tragédie. Racine

Publié le 22/02/2012

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Racine aurait pu, à la rigueur, appeler sa tragédie une tragi-comédie, qui n'est qu'une tragédie à fin heureuse. Ce genre avait été fort en vogue jusque vers 1640 (fin du règne de Louis XIII). Pour affirmer sa singularité, la tragédie s'est distinguée de la tragi-comédie par le caractère funeste de son dénouement, pendant la première moitié du XVIIe siècle, du moins. Alexandre Hardy, mort en 1632 et auteur de vingt-six tragi-comédies et de douze tragédies, ne répugne pas, dans une tragédie comme Alcméon, par exemple, à accumuler les meurtres : le héros tue ses enfants dans une crise de folie; les frères de sa femme s'entretuent pour venger celle-ci. On sait que Pierre Corneille avait d'abord intitulé tragi-comédie Le Cid (1637), rebaptisée tragédie bien plus tard. Les « doctes » de l'époque (Scudéry, l'abbé d'Aubignac) militent en faveur des dénouements heureux. Corneille, dans Cinna (tragédie jouée à la fin de 1640 ou au début de 1641)) conclut sa pièce sans effusion de sang, sur le pardon d'Auguste.
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« Tout le développement de la pièce repose sur l'attente, repoussée d'acte en acte mais jamais rompue, de l'inévitableséparation.

Au nom de la raison d'Etat, Titus renonce à Bérénice, mais c'est au prix d'une violence intérieure queconsomme le sacrifice de l'amour.

La « violence des passions» qu'évoque Racine dans sa Préface se déclare à l'occasion de ce choix, apparemment impossible, entredeux passions, la passion du pouvoir et la passion amoureuse.Titus se montre prêt à mourir si Bérénice, à son tour, ne consent pas à accomplir le sacrifice, qui s'impose, de lapossession amoureuse.

Bérénice comprendra que vivre, en un moment qu'elle juge «funeste», c'est se résigner à uneséparation qui équivaut à la mort : «Ce n'est pas tout : je veux, en ce moment funeste,Par un dernier effort couronner tout le reste :Je vivrai, je suivrai vos ordres absolus.Adieu, Seigneur, régnez : je ne vous verrai plus.

»(acte V, scène 7, v.

1491 à 1494) Au XVIIIe siècle, la tragédie a perdu de son attrait auprès du public.

On lui reproche, avec Beaumarchais, sonimmoralité, vu que le héros ne saurait être coupable de subir la persécution de la fatalité.

Avec Fénelon, onréprouve même l'existence des passions qui l'animent.

En tout cas, on ne comprend plus que les héros puissentsurgir d'un autre temps, d'un autre rang que ceux" auxquels appartiennent les bourgeois du XVIII' siècle et l'ondemande, avec Voltaire, que le spectacle parle d'abord aux yeux.Bref, le genre tragique se meurt.

Le XVIII' siècle fera peu à peu l'abandon de cette distinction des genres qui avaitcours au XVII' siècle.

La tragédie cédera le pas au drame bourgeois.

Un siècle plus tard, le drame romantique, qui apour credo la liberté dans l'art, se soucie de mêler le rire et les larmes, le comique et le tragique et renonce presqueentièrement aux fameuses règles classiques.Dans la mesure où la fatalité, quelles qu'en soient la nature et les modalités, ne cesse de peser sur la conditionhumaine, la lutte qui met aux prises l'homme et les forces qui agissent sur lui n'a pas pour autant cessé de semanifester : ce conflit éternel de l'homme trouve un champ d'action dans le pathétique du drame moderne, sous lemode du sérieux ou de la dérision. Le dénouement des drames modernes s'accompagne de la présence du malheur et de la mort mais il arriveégalement que le dénouement n'ait plus de véritable raison d'être.

Il est alors à l'image du commencement : safonction, purement répétitive, est de suggérer l'absurdité de l'existence. Ainsi, dans La Leçon, de Ionesco, l'arrivée de l'Elève, au dénouement, reproduit l'arrivée de l'Elève précédente, inscrite au commencement de la pièce.

Chez Beckett, la même question, ou plutôt, la même problématique, demeureà l'oeuvre, du début à la fin de la pièce.

On attend toujours Godot (En attendant Godot).

Clov, dans Fin de partie, reste sur le pas de la porte, incapable, à la fin comme au début, de quitter Hamm.

Le temps, conçu comme cyclique,interdit à l'action de se développer, au personnage d'évoluer, à l'existence de se découvrir un sens : le tragiques'impose mais la tragédie, méconnaissable, se passe de dénouement.. »

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