La Bruyère : « La moquerie est souvent indigence d’esprit»
Publié le 04/09/2015
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Relevons en passant que La Bruyère, plus réservé que Mme de Lambert, ne prétend pas porter un jugement universel : ce n’est pas toujours, maïs souvent, que la moquerie est indigence d’esprit; de plus, l’extension de ce jugement reste assez imprécise, car si « souvent « peut signifier « dans la majorité des cas «, ce mot signifie au sens strict : « dans un grand nombre de cas «, nombre qui peut ne représenter qu’une petite minorité.
Le terme dont la signification est le plus difficile à préciser est celui d’ « indigence d’esprit «. « Indigence « dit plus que « manque « et indique, dit Littré, un « manque de choses utiles à la vie « : on n’est pas indigent pour ne pas disposer d’une puissante voiture ou d’un hôtel particulier; de même, au sens figuré, on ne qualifiera pas d’indigent celui qui n’a pas le don des réparties inattendues et des improvisations étincelantes. Par « indigence d’esprit «, il faut entendre, semble-t-il, un défaut d’intelligence, de pénétration ou de jugement.

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DE LA LITTÉ~A1URE A LA PHILOSOPHIE 3tl
qui révèlent un vice plus profond affectant la pers·onnalité même du
moqueur.
Relevons en passant que LA BnuYÈRE, pln:; réservé que Mme DE LAMBEHT, ne prétend pas porter un jugement universel : ce n'est pas toujours, mais souvent, que la moquerie est indigence d'esprit; de piao:, l'extension de ce jugement reste assez imprécise, car si "souvent " peut signifier « dan·s la majorité des cas "• ce mot s·ignifie au sens strict : « dans un grand nombre de ca.s "• nombre qui peut ne représenter qu'une petite minorité.
Le terme dont la signification est le plus difficile à préciser est celui d'« indigence d'esprit"· «Indigence" dit plus que «manque" et indique, dit LITTHÉ, un « manque de choses utiles à la vie " : on n'est pas indigent pour ne pas disposer d'une puissante voiture ou d'un hôtel particulier; de même, au sens figuré, on ne qualifiera pas d'indigent celui qui n'a pas le don des réparties inattendues et des impvovi&ations étincelantes.
Par «indigence d'es•prit "• il faut entendre, semble-t-il, un défaut d'intelligence, de pénétration ou de jugement.
Il.
Discussion.
- A.
La pen:s·ée de La Bruyère surprend d'abord, car la moquerie est avant tout indigence de cœur : nous nous moquerions beau coup m-oins des autres si nous le.s aimions; nous badinons ceux qui n-ous s-ont chers, mais d'une manière qui, loin de les blesser comme la moquerie, les réjouit et leur donne confiance en eux-mêmes.
Il est vrai aussi que le moqueur est souvent un homme d'esprit : il sail voir le.s ridicules et les travers; surtout, il a l'art de les relever d'une façon piquante.
B.
~fais, étant donnée la réserve exprimée par l'adverbe «souvent "• l'affirmation de La Bruyère reste juste.
Sans doute, la moquerie est indi gence de cœur; mais cœur et esprit ne sont pas radicalement indépendant.s; quand il s'agit de nos semblables en particulier, il ne peut pas y avoir de véritable compréhension sans sympathie; ainsi la moquerie s'explique hien souvent par une indigence d'esprit résultant d'une indigence de cœur.
De plus, certaines moqueries s'expliquent par une indige11ce d'esprit indé
pendan,te de l'indigence du cœur : « Les gen•s moqueurs, dit Mme DE GENLIS (citée par LITTRÉ ne savent rien approfondir; ils sont toujours ~Super ficiels.
" On se moque parce qu'on ne cqmprend pas, et on ne comprend pas par manque de réflexion ou par manque de pénétration intellectuelle.
Enfin, 1 'indigence du cœur elle-même s'explique, dans une grande mesure, par une indigence d'esprit : si nous nous montrons méchants envers les autres, c'est, bien s-ouvent, parce que nous sommes incapables.
de nous mettre à l.
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