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Cours de science politique et sociale

Publié le 26/08/2012

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 Il existe deux façons de réagir à ce décalage:  - Soit on retient plutôt la leçon du comportement que celle du discours  - Soit le décalage conduit à un rejet, parfois violent du processus de socialisation en cause.  Ainsi, dans un quartier difficile, on entend tous les jours qu'il faut bien travailler à l'école pour trouver du travail et à côté, on voit tous les adultes de son entourage au chômage (alors qu'ils sont allés à l'école). Au bout du compte, on n'y croit plus et on finit par rejeter l'école.  · Le troisi�me niveau est celui des modes de production des messages, c'est-à-dire des conditions dans lesquelles les messages sont élaborés et transmis.  Au-delà du message transmis par une personnalité politique, le moment choisi, le décor, le ton, le vocabulaire ont leur importance. Là encore, il peut y avoir un décalage avec son comportement.  Cette dimension apparait aussi dans le cadre familial, au travers de la décoration du domicile, des loisirs, des lectures, etc. Les enfants parviennent ainsi à se positionner dans la société (notion de classe sociale).    Au final, cette pluralité de niveaux sur lesquels s'op�re la socialisation la rend assez difficile à mesurer. Les messages peuvent se contredire suivant les niveaux et suivant les milieux de socialisation.  Au moins deux facteurs ont été identifiés comme favorisant le processus de socialisation et donc la reproduction de cultures politiques:  - La cohérence entre les différents niveaux de production des messages  - L'interaction entre les différents milieux de socialisation concernant une même personne. Ici aussi, la convergence favorise la reproduction.    Le processus de socialisation n'est donc bien ni linéaire, ni monolithique, ni unidirectionnel.    Section 3: Le rôle des media    Le rôle des media dans le processus de socialisation politique est évident, puisque c'est en grande partie par eux que passe l'information politique qui va permettre aux individus de se forger une opinion politique.  Compte tenu de l'importance considérable de ces media, le pouvoir politique a longtemps hésité entre contrôle et indépendance des media.    I Les media et la liberté d'expression    A La presse écrite et la liberté d'expression    La premi�re réaction du pouvoir devant le développement de la presse a été de la contrôler, avant que la liberté d'expression ne s'impose progressivement.  La principale menace à laquelle fait face la presse écrite aujourd'hui, ce n'est pas tant la mainmise du pouvoir politique que la mainmise, supposée ou réelle, de grands groupes privés.    En effet, la presse écrite connait actuellement une crise profonde causée par un double mouvement:  - un besoin d'investissement important, lié aux mutations technologiques  - un recul considérable des habitudes de lecture.  Ce recul, visible partout en Europe, est particuli�rement marqué en France.  En 2005, on comptait en France 164 quotidiens diffusés pour 1 000 habitants, contre 705 en Norv�ge et 402 au Royaume-Uni. Ce recul concerne principalement les 15-25 ans.  Cette situation entraîne à la fois la diminution du nombre de quotidiens (certains font faillite) et celle du nombre d'exemplaires vendus.  - En 1946, on comptait en France 28 quotidiens pour 6 millions d'exemplaires par jour  - En 2007, 9 quotidiens pour moins de 2 millions d'exemplaires vendus.  On assiste parall�lement à la montée en puissance de groupes financiers, qui contrôlent un (voire plusieurs) organes de presse écrite, ce qui peut poser des probl�mes en termes de pluralisme de la presse.    B La radio et la télévision    Ces nouveaux media ont fait l’objet d’un contrôle accru de la part des gouvernants, qui avaient bien compris la puissance de leur méthode de communication. C’est la raison pour laquelle ils ont souvent été pris en charge par les autorités publiques.  Ce monopole s’est progressivement effrité, même s’il subsiste encore des chaines d’Etat: France Télévision, Radio France. C’est en France le Président de la République qui nomme le président de ces chaines d’Etat.  Cela ne veut pas dire que les groupes audiovisuels privés sont indépendants. L’audio-visuel nécessite un financement tr�s important.    II Les medias et la socialisation politique    A L’influence des émetteurs de message    Cette influence est beaucoup moins simple que ce qu’on pourrait penser. De nombreuses études ont démontré que les media avaient de grandes difficultés à provoquer des changements d’opinions.  En effet, il faut prendre en compte le fait qu’il n’y a pas un lecteur-type ou un téléspectateur-type mais des publics différenciés qui vont apposer un filtre sur les messages qu’ils reçoivent. Ce filtre peut conduire à atténuer l’importance d’une information ou à ignorer ce qui ne concerne pas notre grille d’analyse: il est donc plus facile pour les medias de "convaincre" quelqu'un qui est déjà convaincu que de faire changer quelqu'un d’avis.  Plusieurs chercheurs ont montré que l’influence des media s’exerçait en deux temps: les leaders d’opinion (politiques, journalistes) perçoivent un message, souvent conçu avant tout pour eux, et vont le diffuser à leur tour, créant une caisse de résonance.  Ce mod�le permet de comprendre le syst�me du microcosme du journalisme et des éditorialistes au sein duquel tout le monde se cite et s’influence réciproquement.  Cela débouche sur la pensée unique: les messages relayés correspondent aux mêmes codes culturels et font l’objet d’une sélection, ce qui explique que l’on va par exemple parler du tremblement de terre à Haïti mais pas des inondations au Pakistan. Cela dépend directement des choix des leaders d’opinion.    B L’influence du vecteur    Le chercheur canadien Macluhan a mis en évidence la différence entre les media écrits et les media audiovisuels.  Selon lui, les media écrits sollicitent l’intelligence, la participation voire l’esprit critique du lecteur, d'où leur caract�re élitiste.  L’audiovisuel fait beaucoup plus appel aux sensations. Les media audiovisuels tirent leur influence moins de ce que dit l’intervenant à l’écran que de l’hypnose du son et de l’image. Le téléspectateur est passif, car il s'agit d'un media unidirectionnel.  Enfin, la capacité d’influence de ces media audiovisuels tient moins aux informations apportées qu’aux valeurs-symbole et mod�les véhiculés dans l’ensemble des productions.  Ce mod�le a été construit dans les années 1960. Il ne prend donc pas en compte Internet et les nouvelles technologies de l'information et de la communication.    C L'influence réelle des media    Cette influence n'est perceptible que sur la longue durée, et davantage sur des représentations de la réalité politique que sur des th�mes précis. Autrement dit, l'influence des media se fait sentir sur la façon dont les citoyens voient la politique mais pas sur ce qu'il faut penser de tel ou tel th�me.  Les media ne disposent donc pas d'une influence leur permettant par exemple d'infléchir le cours d'une campagne électorale en mobilisant telle ou telle partie d'électorat.  Ce sont par contre les media qui permettent à la plupart des individus d'avoir une représentation de la réalité politique et ceux sont également eux qui fixent l'agenda, c'est-à-dire qu'ils déterminent ce dont il faut parler à un moment donné sans pour autant pouvoir déterminer ce qu'il faut en penser. Ils fixent les th�mes. On ne parle que de ce qui se dit dans les media. Ce dont les media ne parlent pas n'existe pas pour le public et, bien souvent, pour les acteurs politiques. Un sujet n'est important que si les media en parlent.  Or, les media semblent voués à une sorte d'idéologie de l'instantané qui ne favorise ni le recul ni l'analyse. Les év�nements médiatiques s'enchaînent rapidement sans temps mort. Il y a à un instant t un à trois th�mes principaux, puis on en change au gré de l'actualité et on ne revient quasiment jamais en arri�re pour voir quelles ont été les suites ou les évolutions.  Les media créent également du lien social en racontant une histoire collective, qui peut être vécue en direct par un tr�s grand nombre de spectateurs. Cela donne l'impression d'appartenir à une même communauté et un sentiment partagé de participer à une histoire commune. (Cf. enterrement de Lady Di, mondial de foot, tremblement de terre, libération des mineurs chiliens, etc.).  En ce sens, les media traditionnels peuvent créer une certaine homogénéisation culturelle et politique, tout le monde parlant de la même chose au même moment et avec les mêmes mots. Les différents points de vue des individus ne consistent le plus souvent que dans le réemploi des mots utilisés par les différents media.  Le développement d'internet permet de nuancer en partie ce phénom�ne d'homogénéisation, en donnant la possibilité à chaque groupe, minorité ou individu de faire partager ses préoccupations ou ses convictions au plus grand nombre en espérant trouver un écho.  Il devient alors facile de renforcer ses propres croyances à l'abri d'informations dissonantes ou d'arguments contradictoires (si on ne parle qu'avec des gens qui partagent notre point de vue).  Ce phénom�ne comporte à la fois des aspects positifs et des aspects négatifs:  - Cela favorise la résistance à l'homogénéisation: on peut parler de th�mes politiques qui ne sont pas "à l'agenda"  - Cela peut renforcer les idées extrêmes et les théories du complot: si on ne communique qu'avec des gens qui pensent pareil, cela ne fait que renforcer ses propres convictions, avec tous les risques que cela comporte.    Th�mes 7 et 8: Les acteurs de la vie politique    Section 1: Les citoyens    Dit simplement, le citoyen est le membre d'une communauté politique, le plus souvent l'Etat. Il bénéficie à ce titre de droits et de devoirs attachés à cette appartenance. Il s'agit bien sûr d'un statut juridique particulier, mais qui comporte également une dimension politique et sociologique importante. En effet, outre la notion de citoyenneté, les citoyens se caractérisent par la possibilité et le devoir de participer à la vie politique, c'est ce qu'on appelle la politisation.    I La notion de citoyenneté    Né dans l'Antiquité au travers de l'idée de participation à la chose publique (res publica), le concept de citoyenneté ne s'affirme qu'à partir du 18e si�cle dans le cadre des révolutions américaines et françaises. Ce contexte particulier explique en grande partie le lien particulier existant entre citoyenneté et nationalité.  Le citoyen est titulaire d'une partie de la citoyenneté nationale. Par conséquent, seuls les nationaux sont citoyens. Outre ce lien étroit avec la nationalité, la citoyenneté comporte des droits et des devoirs en lien avec la communauté politique:  · Les droits  Il en existe de plusieurs types:  - Les droits de participation politique  - Les droits civils (liberté d'expression, etc.)  - Les droits sociaux.  La Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen octroie des droits civils et politiques. Le Préambule de la Constitution de 1946 comporte une liste de droits sociaux.  · Les devoirs  Ils sont quant à eux principalement rattachés à la participation politique, c'est-à-dire à la vie de la communauté dans laquelle le citoyen évolue:  - Le vote, qui peut être juridiquement obligatoire (Belgique, Gr�ce, etc.)  - Les impôts  - Jusque récemment, le service national, voire la mobilisation militaire.  La citoyenneté peut se construire différemment selon les contextes historiques et nationaux. Cette pluralité des mod�les de citoyenneté peut être amenée, suivant une lecture politiste, à trois mod�les ou idéaux-types de citoyenneté.  · Le mod�le républicain français:  Il se caractérise par une conception à la fois individualiste et universaliste de la citoyenneté:  - Individualiste car les groupes et les communautés ne se voient accorder aucun droit politique particulier (ces droits sont réservés aux individus).    - Universaliste car la citoyenneté ne reconnait que des droits généraux et égaux: tous les individus sont considérés comme identiques et égaux.  La citoyenneté n'est pas censée prendre en compte les particularismes, d'où le rejet de la discrimination positive et des statistiques ethniques. On cherche à maintenir une fiction juridique d'égalité. C'est la conséquence du principe de laïcité, qui vise à renvoyer dans la sph�re privée l'affirmation des particularismes. Cela ne concerne toutefois pas que la religion. On peut renvoyer dans la sph�re privée tous les particularismes: sexe, origine ethnique, sociale, etc.  Au nom de ce principe, on refuse les statistiques ethniques, la discrimination positive et il a même fallu modifier la Constitution pour mettre en place la parité.  · Le mod�le consociatif:  Ce mod�le est organisé et segmenté en fonction des différents groupes qui composent la société: groupes ethniques, religieux, culturels, selon les sociétés. Chaque groupe bénéficie d'une part de représentants au sein du syst�me et s'appuie sur son propre réseau d'institutions (éducation, culture ou religion), même si le lien juridique avec l'Etat demeure intact. C'est ce qui se passe en Belgique, avec un Etat et des communautés culturelles, dotées de leurs institutions éducatives, culturelles, etc. C'est également le cas au Liban.  · Le mod�le libéral (mod�le anglo-saxon):  Ce mod�le reconnait la légitimité des différentes identités particuli�res des citoyens, qui peuvent alors se manifester et être prises en compte dans l'espace public. La citoyenneté est différenciée.  Ce syst�me se distingue des deux mod�les précédents. Cette citoyenneté différenciée ne peut pas conduire à un cloisonnement institutionnel des groupes, comme dans le mod�le consociatif. On pourra ainsi prévoir un quota ethnique dans les universités mais on ne va pas créer des universités pour chaque groupe ethnique.  On retrouve bien dans ces trois mod�les les différents aspects de la citoyenneté. Ces mod�les ont une influence sur la façon dont les citoyens perçoivent leur citoyenneté et donc la politique. Ils se fondent tous sur l'idée selon laquelle les citoyens participent à la vie politique. Or, entre cette vision théorique et la réalité, il y a un écart parfois important, que l'on peut appréhender au travers de la notion de politisation.    II La notion de politisation: les citoyens et la politique    Politisation: Intérêt et attention accordés au fonctionnement du champ politique, c'est-à-dire aux compétitions (élections) et aux acteurs politiques.  L'analyse de cette politisation met en évidence un désintérêt croissant pour la politique, qui est toutefois variable.    A Un désintérêt croissant pour la politique    En mars 2006, seulement 43% de la population déclaraient être intéressés par la vie politique.  L'identification partisane, signe de politisation, est en baisse constante depuis les années 1970. 37% des Français refusent de situer sur un axe gauche-droite. 60% des Français pensent que ce clivage est dépassé.  Ce désintérêt semble lié à une méfiance croissante vis-à-vis du syst�me politique.  En 1978, 38% des Français pensaient que les hommes politiques sont corrompus, contre 58% en 2002. Les affaires politico-financi�res n'y sont pas pour rien…  Ce sont les individus les moins politisés qui sont les plus méfiants, ce qui est assez logique.  Ce développement de l'indifférence citoyenne face au jeu politique est un phénom�ne central des démocraties contemporaines. Il s'accompagne nécessairement d'une baisse du niveau de compétence politique des citoyens. En effet, plusieurs études ont montré que le degré de politisation était étroitement lié à celui de compétence politique, c'est-à-dire connaissance et compréhension du champ politique.  La compétence politique peut se mesurer à l'aide d'une enquête par sondage, pour savoir si les sondés connaissent les hommes politiques, les enjeux du débat politiques ou s'ils parviennent à maîtriser les crit�res de classifications de l'échiquier politique.  Ces enquêtes mettent en évidence que les citoyens qui ont la plus grande compétence politique sont aussi ceux qui s'intéressent le plus à la politique, selon une logique cumulative.  A l'inverse, les citoyens qui ont une faible compétence politique sont assez peu réceptifs aux informations politiques dans les media, ce qui montre l'incapacité des media à permettre la politisation des individus.  Le type de questions posées: "le premier ministre peut-il dissoudre le parlement?"; "les étrangers qui vivent en France depuis cinq ans peuvent-ils voter aux élections présidentielles?"; "Y avait-il des ministres communistes dans le gouvernement Jospin?"?  Une étude a également été menée aupr�s des étudiants, à l'initiative des instituts d'études politiques.  La faiblesse de la compétence politique ne se traduit pas nécessairement par l'abstention. L'appréciation du jeu politique se fait par des crit�res différents de ceux des "savants": des crit�res symboliques et affectifs ("il a l'air sympa"), d'où l'intérêt de la communication politique; "il porte un nom à particule, donc il est éloigné des préoccupations des gens"; "il est postier, donc proche de nos préoccupations" ("jeune facteur sympa").  Même ceux qui ont des compétences politiques peuvent privilégier des crit�res symboliques et/ou affectifs.  Cela doit également amener à relativiser la théorie du "vote sanction". Au bout de cinq ans, les électeurs ont souvent oublié les engagements initiaux et reviennent aux crit�res affectifs.    B Un désintérêt variable suivant les catégories sociales    Trois clés peuvent être utilisées: la position sociale, l'âge et le sexe.  · Position sociale:  Plus celle-ci est élevée plus les citoyens déclarent s'intéresser à la vie politique. Ainsi les artisans (33%) et les ouvriers (24%) sont les catégories qui déclarent s'intéresser le moins à la politique. Les cadres et professions intellectuelles supérieures sont ceux qui déclarent s'y intéresser le plus (62%).  Les résultats sont similaires si on prend en compte le niveau des revenus ou le niveau d'études. En 2007, 58% des non-diplômés déclarent ne s'intéresser que peu ou pas du tout à la politique, contre 20% des titulaires d'un bac+5 ou +8.  Cette faiblesse de la politisation s'accompagne d'une faible compétence politique, qui transparaît dans la faiblesse des taux de réponse à certaines questions formulées en termes techniques. Cela est beaucoup moins marqué lorsque les questions sont formulées en termes généraux.  Ce crit�re est le crit�re déterminant. Les deux autres facteurs ne jouent qu'à la marge  · Age:  Sur la longue durée, on constate que l'indifférence à la politique diminue avec l'âge jusqu'à 60-65 ans, pour augmenter à nouveau apr�s. Cette différence s'explique principalement par les rôles sociaux ("je suis jeune, je ne suis pas censé m'intéresser à la politique", si on s'y intéresse c'est même mal vu; apr�s, c'est valorisé) et par le partage du travail: on s'y intéresse davantage quand on travaille et qu'on paie des impôts: on sent davantage l'importance des décisions politique.    · Sexe:  En moyenne, les femmes manifestent un moindre intérêt et une moindre connaissance du jeu politique que les hommes, même si cela c'est estompé. On retrouve ici les deux facteurs déterminants: rôles sociaux et partage du travail. Historiquement, femme = domaine privé et homme = domaine public.  La société n'est donc pas monolithique en mati�re de politisation, ce qui permet aux hommes politiques de cibler une catégorie de population.    Section 2: Les partis politiques    Les partis politiques jouent un rôle central dans la vie politique contemporaine, aussi bien dans les démocraties que dans les régimes autoritaires. Pour comprendre la vie politique, ils font comprendre le fonctionnement des partis.    I Définition des partis politiques    Les partis politiques peuvent être définis en termes simples comme des organisations participant directement à la compétition pour les postes et les positions de pouvoir.  Cette définition peut être affinée en se référant à quatre crit�res, définis par deux politistes américains (Wagner et La Palombara):  · Les partis politiques sont dotés d'une organisation durable, c'est-à-dire ayant vocation à survivre à leurs dirigeants. Cette caractéristique permet de les distinguer des réseaux de client�le.  · Les partis politiques sont des organisations "nationalisées", qui bénéficient d'unités de base sur tout le territoire. Cela les distingue des groupes parlementaires (pas de relais local) et des comités de notables (pas de dimension nationale). Il faut donc les deux éléments: local et national.  · Les partis politiques ont vocation à accéder au pouvoir politique, notamment en se présentant aux élections. Ce crit�re les distingue des groupes d'intérêt (lobbying), qui se contentent d'influencer les hommes politiques et les partis.  · Les partis ont la volonté délibérée de trouver un soutien populaire, ce qui les distingue des think tanks, souvent proches des partis politiques, qui ne visent qu'à brasser des idées qui pourront ensuite être reprises (Fondation Jean Jaur�s, associée au Parti Socialiste, ou Fondation pour l'innovation politique, associée à l'UMP)  Un parti politique est donc une organisation durable, implantée sur l'ensemble du territoire, dont le but est d'accéder au pouvoir politique grâce au soutien populaire.  A partir de cette définition, on peut apporter un complément d'information en étudiant les fonctions des partis:  · Fonctions manifestes (revendiquées par les partis):  - fonction programmatique: adoption d'un programme politique qui va structurer les débats  - fonction de sélection: recrutement et sélection des professionnels de la politique  - fonction d'encadrement: encadrement de l'action des élus, notamment au travers des groupes parlementaires  · Fonctions implicites:  Certains partis peuvent exercer une fonction d'intégration sociale. C'était notamment le cas de partis tr�s structurés, comme le parti communiste, grâce auquel on pouvait connaître une véritable ascension sociale.  Tous les partis politiques permettent la légitimation et la stabilisation du syst�me politique en acceptant de jouer le jeu de la conquête du pouvoir. C'est moins net en démocratie mais dans certains pays un peu "limite", un parti peut refuser de participer à une élection considérée comme une mascarade, donc ceux qui y participent le cautionnent.    II Typologies des partis politiques    Derri�re ces quelques points communs (crit�res et fonctions), il existe une réelle diversité des partis politique. Plusieurs typologies ont été proposées:  Maurice Duverger distingue partis de classe et partis de masse.  Seymour Martin Lipset et Stein Rokkan posent le crit�re des clivages.    A La distinction entre partis de cadres et de masse de Maurice Duverger    Les partis de cadres sont composés essentiellement de notables, que le passage du suffrage censitaire au scrutin universel a contraints à se réunir. Leur activité est centrée sur les élections et ils attirent les membres des élites sociales, leur permettant de disposer d'importantes ressources électorales.  Ces partis ont en général des structures assez lég�res et sont peu centralisés, s'articulant autour de réseaux de notables relativement autonomes.  En France, l'UDF a longtemps correspondu à ce mod�le, ainsi que le parti radical des Troisi�me et Quatri�me Républiques. Aucun parti ne correspond actuellement exactement à ce mod�le.  Les partis de masse se caractérisent par la recherche du plus grand nombre d'adhérents, dont les cotisations permettent de financer la plupart des activités du parti, qui ne se limitent pas aux seules élections, et c'est la participation de ces adhérents qui permet de faire vivre l'appareil du parti.  Ces partis naissent avec le suffrage universel et permettent donc à des acteurs dépourvus de ressources personnelles de s'engager dans le jeu politique et de bénéficier des ressources collectives de l'organisation. Les partis ouvriers sont les meilleurs exemples de ce type de partis (parti communiste).  Cette premi�re typologie est loin d'être parfaite et de permettre de saisir toute la variété des partis politique. Elle visait à présenter les partis des années 1950. Les évolutions pressenties (généralisation des partis de masse) ne se sont pas réalisées. On n'a plus aujourd'hui ni partis de cadres ni partis de masse. Cette premi�re typologie est néanmoins fondatrice. Elle a permis la construction de mod�les plus aboutis.    B Le mod�le des clivages    Ce mod�le des clivages s'interroge sur les fondements socioculturels et les origines idéologiques entre les différents partis en compétition. Cela revient à dire que ces partis représenteraient des groupes sociaux différents.  Il s'agit d'identifier les clivages auxquels correspondent les différents partis. Certains clivages sont toujours valables, d'autres non.  Les deux auteurs identifient deux conflits historiques majeurs ayant engendré quatre clivages distincts:  - La révolution industrielle aurait ainsi créé deux clivages: urbain/rural et capital/travail.  - La construction nationale aurait donné naissance à deux clivages: Etat/Eglise et centre/périphérie.  Ces quatre clivages ont eu des traductions politiques différentes mais ont parfois donné naissance des partis politique.  - Clivage Etat-Eglise:  Ce clivage a opposé partis cléricaux et partis anticléricaux (défendant la séparation du politique et du religieux). Ce clivage a été particuli�rement important en France au 19e si�cle. Il s'est ensuite déplacé sur le terrain scolaire (débats sur l'enseignement privé). En France, ce clivage n'a pas engendré de partis politique mais il a fortement structuré le débat politique. En Allemagne, la CDU est née dans le cadre de ce clivage.  - Clivage centre-périphérie  Il a opposé les tenants de la centralisation et ceux de la décentralisation. Il traverse le clivage gauche-droite (Cf. réforme territoriale). Ce clivage s'est exprimé au travers de partis politiques régionalistes (corse, pays basque).  - Clivage urbain-rural  Ce clivage a quasiment disparu, malgré une résurgence avec le parti "Chasse pêche, nature et traditions".  - Clivage capital-travail  Il renvoie plus ou moins explicitement à la lutte des classes: les intérêts des patrons seraient opposés à ceux des employés. Ce clivage correspond à la division française entre gauche et droite.  Ces quatre clivages seraient à l'origine des principaux partis politiques.  Cette théorie a été critiquée:  - Le clivage rural-urbain aurait disparu  - Le clivage Etat-Eglise serait nettement moins structurant qu'avant, notamment en raison de la baisse de la participation religieuse.    - Il en serait de même pour le clivage capital-travail, lui aussi affaibli, en raison de la montée en puissance de la classe moyenne et de l'augmentation générale du niveau de vie, expliquant une modération des partis sur ces questions.  Pour attirer le centre (classes moyennes), il faut modérer les propos. Les grands partis auraient tendance à essayer de capter le maximum d'électeurs en appauvrissant leur bagage idéologique et en rapprochant peu à peu leurs programmes.  - De nouveaux clivages seraient apparus: égalité des sexes, protection de l'environnement, reconnaissance des identités. On retrouverait ici une opposition entre les forces libertaires, favorables à l'interventionnisme étatique sur le plan économiques et à une libéralisation globale au niveau sociétal (Cf. Europe-Ecologie/les Verts) et des partis extrêmes anti-libertaires et autoritaires (FN, FPO en Autriche, Ligue du Nord en Italie).  - Il existerait également un clivage au niveau européen (souverainistes et fédéralistes).  Ces critiques (affaiblissement des crit�res traditionnelles et apparition de nouveaux crit�res) doivent être nuancées:  - Certes, le clivage urbain/rural a disparu  - En revanche, le clivage Etat/Eglise n’est pas mort, loin s'en faut. Cela se voit notamment à travers les débats sur l'euthanasie, le statut de l'embryon, l'avortement, la contraception, le mariage homosexuel, etc.  - Le clivage capital/travail, même s'il a perdu une part de son acuité, continue à structurer l'opposition entre droite et gauche (Cf. la gauche qui veut imposer le capital et la droite qui s'y oppose largement).    III Professionnalisation contemporaine des partis politiques    Les partis politiques sont surtout des partis de professionnels. On assiste à la disparition des partis de cadre et à une crise profonde des partis de masse, au travers d’une chute importante de leurs effectifs et de leurs résultats électoraux.  Ce phénom�ne s’explique par les mutations du monde du travail, qui rendent le militantisme plus difficile, au travers de la précarisation et de la déstructuration des relations de travail.  Il y a aussi le développement du financement étatique des partis politiques, qui permet de ne plus avoir besoin des militants et de leurs cotisations.  Cet affaiblissement des partis de masse a ouvert la voie au développement de partis politiques aux structures lég�res, composés essentiellement d’élus et de professionnels politiques.  Ces nouveaux partis se distinguent des partis de cadres et de masse sur différents aspects:  - structure lég�re  - partis composés de professionnels  - fort lien d’allégeance au parti.  Le parti est devenu une machine électorale ayant vocation à rassembler des financements, pour ensuite sous-traiter certains aspects de la campagne électorale.  Cette derni�re dimension expliquerait par ailleurs que les partis tentent de diversifier leurs offres politiques, afin de rallier un maximum d‘électeurs.  Ces nouveaux partis se distinguent par une forte compétition en leur sein. Ils sont tous traversés par des logiques de coopération, mais il existe tout de même des concurrences, notamment dans l’élection du candidat officiel du parti.  Plus on monte dans la hiérarchie des partis, et moins les dirigeants ressemblent aux adhérents. On assiste à une surreprésentation des catégories sociales élevées.    IV Syst�mes de partis et modes de scrutin    Le syst�me varie selon le nombre de partis et les relations qu’il y a entre eux.    Comment expliquer les différences?    Le choix du mode de scrutin pour commencer, c'est-à-dire la loi électorale, qui détermine la modalité de transformation des voix en si�ges.  A partir des modes de scrutins, Maurice Duverger a dégagé trois lois permettant d’expliquer les différentes formes des syst�mes de partis:  - Le scrutin majoritaire à un tour tend à favoriser un syst�me bipartisan composé de partis indépendants à structure rigide.  Il tend à renforcer le vote utile. Il favorise les grands partis. Il a des effets d’amplification qui peuvent permettre à un parti ne réunissant pas la majorité des voix d’avoir la majorité des si�ges au Parlement.  - Le scrutin majoritaire à deux tours tend à engendrer un syst�me multi-partisan au sein duquel les partis sont dépendants les uns des autres.  Il permet plus de diversité au premier tour et provoque des alliances pour remporter le si�ge au second tour. Ce syst�me renforce la bipolarisation de la vie politique, autour de deux camps pouvant comprendre plusieurs partis. Ce syst�me est plus équitable mais il conduit dans une certaine mesure à des distorsions de représentation.  - Le scrutin proportionnel favorise un syst�me multi-partisan formé de partis indépendants à structure rigide car toutes les formations politiques peuvent être représentées sans avoir besoin de faire d'alliances pré-électorales.  Ce syst�me assure une meilleure représentation de l’électorat mais il engendre aussi l’instabilité gouvernementale puisque les alliances postélectorales entre les partis peuvent fluctuer.    En pratique, les syst�mes de partis en France et en Allemagne sont comparables, puisque dans ces deux pays on a un syst�me multi-partisan organisé en deux pôles. Pourtant, les modes de scrutin sont différents:  - En France: scrutin majoritaire à deux tours  - En Allemagne: scrutin proportionnel  On peut tirer deux enseignements de ces lois:  - Il faut prendre en compte plus finement les r�gles électorales, par exemple le seuil de représentation dans le scrutin proportionnel.  - Il faut s’interroger sur la relation entre mode de scrutin et syst�me de partis. Le lien est plus complexe que l'idée selon laquelle le mode de scrutin définit le syst�me de partis. Le parti bénéficiant du mode de scrutin tend à le préserver des évolutions.  Selon Duverger, il faut prendre en compte l’histoire constitutionnelle, qui peut expliquer les situations différentes.  Section 3: Les professionnels de la politique    Parler de professionnels de la politique, c’est reconnaitre que la politique est réservée à des gens qui en font leur métier. Si on regarde la classe politique française, on remarque que c’est le cas, à l'exception de quelques uns, issus de la société civile.  Normalement, dans une démocratie ce sont les citoyens qui décident, mais en pratique, c’est une catégorie de personnes qui prend les décisions, les professionnels de la politique.    I Le phénom�ne de professionnalisation de la politique    Ce phénom�ne est lié à la perte de vitesse des notables et au développement des nouveaux entrepreneurs politiques. Deux hypoth�ses :  - soit la politique est une activité parmi d’autres: ceux qui l'exercent ont une passion pour la politique: on vit pour la politique  - soit c’est un véritable métier: on vit de la politique  Ces deux hypoth�ses correspondent à deux périodes historiques différents.  - Vivre pour la politique signifie que l’on a des ressources économiques importantes, suffisamment importantes pour ne pas passer tout son temps à travailler pour gagner de l’argent et subvenir à ses besoins. Cela correspond à la période pendant laquelle la vie politique était monopolisée par les nobles et les bourgeois. C'est la période des notables.  - La généralisation progressive du suffrage universel a progressivement poussé dehors ces acteurs politiques au profit d’individus n’ayant pas de moyens financiers suffisants pour vivre pour la politique, et vivant donc de la politique. Ce processus a mis en place un syst�me d’indemnités associées aux différents postes politiques. On a parall�lement assisté au développement de postes permanents dans les partis politiques. Le développement des partis politiques aura accompagné la disparition progressive de l’administration des notables. C’est à partir du 19e si�cle que s’enclenche ce mouvement de professionnalisation de la vie politique.    II Les professionnels de la vie politique    Ce phénom�ne de professionnalisation s’est traduit par le remplacement d’une élite par une autre. En effet, la classe politique présente une certaine homogénéité sociale, permettant de dresser un portrait type du responsable européen    A Portrait sociologique des professionnels de la politique    1 Le député    Le portrait type du député est le suivant: c’est un homme d’âge mûr appartenant aux classes moyennes et supérieures disposant d’un bon niveau d’éducation et devenant sans cesse davantage un professionnel de la politique.  La classe politique est un univers masculin. Il a fallu attendre un certain temps pour y voir apparaître un certain nombre de femmes. Ainsi en 1981, 5 % de femmes députés en France contre 19 % en 2007. Ce progr�s est le résultat de la loi sur la parité, qui a nécessité une modification de la Constitution.  Cependant, le résultat est mitigé, puisque les grands partis politiques préfér�rent payer des amendes que respecter la loi. On ne constate aucune progression du nombre de femmes aux mandats électifs auxquels la loi ne s’applique pas: (par exemple, les élections aux Conseils généraux).  Il existe ici un clivage entre le Nord et le Sud de l’Europe: en Su�de 45 % de femmes dans la chambre basse contre 8,7 % à Malte. La France se trouve 19�me sur 27, en nombre de femmes participant à la vie politique.  En plus d’être majoritairement des hommes, les députés sont relativement âgés. Cela montre que l’élection à un poste au sein du parlement est le résultat d’un long cheminement. Actuellement l’Assemblée Nationale comprend:  - 100 députés entre 30 et 50 ans  - 437 députés entre 50 et 70 ans  - 39 députés entre 70 et 80 ans  - 1 député de plus de 80 ans  L’univers politique est composé de personnes qui disposent d’un assez haut niveau d’études, nettement supérieur à celui de la moyenne des gens qu’ils représentent. Les députés ont souvent fait des écoles prestigieuses. A l'Assemblée Nationale élue en 2002, 52 % des députés étaient titulaires d’au moins un bac +4/+5.  Leur profession avant d’être député se répartissait ainsi:  - 17 agriculteurs  - 113 cadre/ingénieurs  - 42 chefs d’entreprise  - 117 professions libérales  - 98 fonctionnaires  - 78 enseignants  - quelques journalistes  - 1 ouvrier (PCF, P. Gremetz).    2 Le ministre    Les traits généraux des ministres sont globalement similaires à ceux des députés, si ce n’est que cet univers était jusque récemment encore plus masculin et d’un niveau socioprofessionnel encore plus élevé.  En France, il faut attendre les années 1970-1980, pour que les femmes fassent leur entrée aux minist�res.  En 1991, Edith Cresson est la premi�re femme politique française à être Premier Ministre.  A partir de 1997, les femmes commencent à occuper des minist�res importants.  Actuellement, les femmes représentent 30 % du gouvernement. Ce qui explique la différence entre ministres et députés, c'est que les ministres sont directement nommés par le Président de la République. Le nombre croissant de femmes au gouvernement résulte d’un changement de mentalité progressif.  Concernant le niveau socioprofessionnel des ministres sur la période 1959-1985 :  - plus de 80 % des membres avaient suivi des études supérieures  - 90 % appartenaient à la classe supérieure (alors que cette classe ne représente que 4.2% des Français)  B Trois groupes dominants    En partant du constat suivant lequel la plupart des hommes politiques appartiennent aux conches moyennes et supérieures de la société, on peut distinguer trois groupes dominants au sein de la classe politique:  - Les purs professionnels de la politique  - Les fonctionnaires  - Les professions libérales.  La proportion de ces trois catégories varie.    1 Les purs professionnels de la politique  Il s’agit des professionnels de la politique ayant fait carri�re au sein des appareils de parti. Ce groupe est assez peu important en France, mais il est central en Allemagne et en Italie (où il représente le tiers de la classe politique).    2 Les fonctionnaires  Ils sont tr�s présents en France mais aussi en Allemagne. Dans ces deux pays, pr�s de 30% des hommes politiques sont des fonctionnaires. C’est le résultat de la conjonction de plusieurs facteurs, parmi lesquels le statut de la fonction publique, qui permet de ne pas avoir besoin de démissionner pour briguer un mandat politique. Un autre facteur important est la faiblesse de la bureaucratie des partis politiques.    3 Les professions libérales  C’est une catégorie qui est globalement sur le déclin: en France, seuls 20 % des députés sont issus des professions libérales.    III Les carri�res politiques    A Les deux mod�les de cursus politique    Philippe Braud distingue deux profils :  · Le profil ascendant: du local vers le national  Il commence classiquement par une implantation locale, s’appuyant sur un ou plusieurs mandats locaux. La seconde étape est l’obtention d’un mandat de maire d’une grande ville, ou de Président du Conseil Général, considéré comme un marchepied pour arriver au mandat de député. S'il devient député, il cumule plusieurs mandats, car il a conservé celui qu'il exerçait avant de devenir député: maire, Président du Conseil général, etc.  Cela lui permet de faciliter sa réélection. Une fois qu’il est député, il va essayer de développer sa carri�re politique au niveau national, obtenir un poste ministériel, voir même devenir Premier ministre.  Ce mod�le comporte une variante, qui suppose que le parti favorise le militantisme.    · Le profil descendant: du national vers le local  Ce profil est en plein développement en France.  En général, le futur homme politique est issu d’une formation d’excellence (Sciences po, ENA), qui le conduit à exercer des fonctions au sein d'un cabinet ministériel, des instances dirigeantes d’un parti, voire qui l’am�ne directement à un poste de ministre.  Le cursus passe par une phase d’implantation locale: une fois la reconnaissance nationale acquise, il faut obtenir un mandat local.    B La particularité du cas français    La spécificité française réside dans les liens tr�s étroits unissant haute administration, carri�re politique et toutes les fonctions dans le secteur privé. Il existe une véritable circulation entre ces fonctions. C'est ce qui donne le concept d’élites politico-administratives.  Cela pose des probl�mes de conflits d’intérêts.  Ce phénom�ne s’explique par le prestige accordé à la haute fonction publique, et par l’existence de grandes écoles ayant vocation à former les hauts fonctionnaires: Sciences po Paris/ENA. L’ENA est le passage quasi-obligé pour avoir des hautes responsabilités nationales.  Cela aboutit à l’homogénéité de l’élite française, puisque elle a eu la même formation.    Section 4: L’opinion publique    L'opinion publique se trouve dans une situation ambigüe, car la démocratie représentative place le fondement de la légitimité des dirigeants dans l’élection par le peuple. La démocratie représentative postule que les dirigeants politiques doivent garder une certaine indépendance vis-à-vis de l’opinion publique. En effet, leur mission est de poursuivre l’intérêt général sans prendre forcément en compte la popularité des mesures adoptées.    I Eléments historiques sur la notion d’opinion publique    L’histoire de l’opinion publique est en fait l’histoire de ceux qui ont prétendu l’exprimer.  Le terme apparait en France au 18e si�cle. A l’époque, l’opinion publique est celle de l’élite cultivée des salons: on critique le pouvoir royal.  Avec le développement de la démocratie représentative, ce sont les élus de la nation qui détiennent le monopole de l’opinion publique. Représentants du peuple, ils sont les mieux placés pour savoir ce que veut le peuple.  La presse va contester de plus en plus ce monopole en essayant de se faire le porte-voix de l’opinion.  L'opinion publique va ensuite commencer à s’exprimer toute seule, via des manifestations de rue.  La situation change radicalement à partir des années 1960, avec la montée en puissance des instituts de sondage, qui s’imposent progressivement comme les seules instances habilitées à dire ce qu’est et ce que veut l’opinion publique.  En effet, une nouvelle croyance collective s’impose dans les années 1970: les sondages seraient une technique scientifique qui permettrait de faire parler le peuple directement sans intermédiaire.  La technique de sondage est mise en place dans le début des années 1930 par Georges Horace Getup. Il va réussir à démontrer l’efficacité de sa technique lors de la réélection de Roosevelt, en prévoyant sa victoire, sur la base d’un échantillon de 5 000 personnes. Il va falloir attendre en France la premi�re élection présidentielle au suffrage universel direct en 1965pour que les sondages fassent leur apparition, et montrent leur efficacité. France Soir publie la veille de l’élection un sondage qui n'attribue à De Gaule que 43 % des voix et annonce le ballotage avec Mitterrand. Les sondages ont établi leur légitimité sur leur capacité à anticiper les résultats d’une élection. L’élection est en effet le seul moment où il est possible de comparer les chiffres de sondage avec la réalité.  Il existe trois types de sondages:  - Les sondages d’intention de vote ou à la sortie des urnes  - Les sondages qui portent sur les caractéristiques sociales de l’électorat. Les résultats sont mis en relation avec les préférences politiques des électeurs.  - Les enquêtes d’opinion, qui rév�lent l’état de l'opinion publique au travers de questions. C’est sur ce type de sondage que portent d’importantes critiques.    II Controverse autour des sondages    Les sondages peuvent être perçus comme susceptibles de renforcer la démocratie, encore qu'on peut se demander si l’opinion publique existe vraiment. Mais ces sondages ont une influence réelle sur la vie politique.    A Le renforcement de la démocratie par les sondages    Malgré un certain nombre d’erreurs importantes lors des élections récentes, leur force repose entre autres sur leur prétendu caract�re scientifique. Les sondages permettraient d’avoir une vision scientifique, donc objective, de l’opinion publique. Si on accepte cette idée, les sondages sont évidement un élément de renforcement de la démocratie: ils permettent de réaliser le vieux rêve de la démocratie directe puisque la volonté des citoyens, pouvant être connue à tout moment, devrait être prise en compte par les gouvernants. Selon cette idée, les sondages peuvent intervenir à trois niveaux:  - La sélection des gouvernants et, indirectement, le choix des candidats, à travers leur cote de popularité  Via les sondages, on peut choisir le candidat (ex: Ségol�ne Royale en 2007, qui a obtenu l'investiture du PS grâce à sa côte de popularité).  - L'intervention durant le mandat des gouvernants, puisqu’au travers de sondages sur les réformes projetées ou en cours, les électeurs pourraient obliger les responsables politiques à prendre en compte la volonté populaire. Serait mise en place une sorte de contrôle démocratique sur le pouvoir en dehors des élections.  - Possibilité pour les citoyens d'intervenir dans les débats majorité/opposition, en rappelant à la majorité qu’elle ne fait pas l’unanimité.  De ce point de vue, les sondages jouent un rôle de contre-pouvoir. Ils permettraient une véritable démocratie d’opinion, une démocratie au sein de laquelle l’opinion publique aurait une place centrale.  B L’opinion publique existe-t-elle?    1 Critique technique: l’échantillonnage    Le principe du sondage est d’obtenir des informations sur une population à partir d’une enquête réalisée sur une fraction de population. Il faut que cette fraction de population soit correctement sélectionnée pour qu’elle soit la plus représentative de l’ensemble. Il existe deux méthodes d’échantillonnage:  - L’échantillonnage aléatoire  Il proc�de d’un simple tirage au sort. Cette technique permet de calculer une marge d’erreur statistique. C’est la plus fiable scientifiquement. Elle est d’autant plus fiable que l’échantillon retenu est important. Cette technique est assez peu utilisée car elle est plus lourde à mettre en place, donc plus ch�re.  - L’échantillonnage par quotas  On proc�de à une sélection de l'échantillon en fonction de la représentativité. L’échantillon doit refléter le mieux possible la population réelle en termes d’âge et de catégorie socioprofessionnelle.  On obtient un échantillon plus restreint, ce qui rend cette méthode moins coûteuse, donc plus employée.  Cependant, c’est la méthode la moins rigoureuse scientifiquement puisqu’elle ne permet pas de calculer une marge d’erreur et que chaque institut de sondage a sa propre recette.  Les instituts de sondage se heurtent de plus en plus aux répondants fantômes, ce qui signifie qu'il y a de plus en plus de personnes qui refusent de répondre aux sondages.  Il faut alors savoir si les personnes qui acceptent de répondre sont vraiment représentatives des personnes que l’on avait prévu de contacter. Dans les faits, elles ne le sont pas.  On peut penser que les répondants fantômes appartiennent plutôt aux classes sociales les plus défavorisées, ce qui semble être confirmé car les diplômés du supérieur sont deux fois plus nombreux dans les sondages que dans la population générale.  Il faut également prendre en compte le fait que les sondés ne disent pas forcément la vérité.    2 Critique épistémologique: le principe même des sondages  Les instituts de sondage fabriquent l’opinion publique. L’élément central de cette critique est de dire que le sondage d’opinion repose sur un outil à tr�s haut risque d’artefacts, c'est-à-dire de résultats produits accidentellement par les méthodes de recherche employées.  L’outil est presque toujours un questionnaire à questions fermées, car ce type de questionnaire est plus facile à exploiter que si on laisse aux sondés le choix de composer une réponse. Ce type de questionnaire conduit à une déformation importante de la parole des sondés, dont les réponses aux questions doivent se mouler dans un moule prédéfini. Le résultat du sondage dépend de la façon dont les questions sont formulées. 

« en compte uniquement les avantages matériels.Ainsi le choix du candidat pour lequel on va voter est aussi basé sur les valeurs et non uniquement sur les avantages matériels qu'on espère en retirer.

L'électorat degauche aussi bien que celui de droite est très large sur le plan économique.

On trouve aussi bien des riches de gauche, même si la gauche veut augmenter les impôtset donc aller contre leurs intérêts économiques personnels, que des pauvres de droite, même si la droite veut baisser les impôts et donc nécessairement baisser leursprestations sociales, ce qui va là encore contre leurs intérêts.

Les élections sont donc moins prévisibles que si on pouvait compter les riches et les pauvres pour enprévoir le résultat!Il existe un autre courant de l'individualisme méthodologique, qui met l'accent sur la rationalité mais écarte l'aspect utilitariste.

Les phénomènes sociaux sontanalysés comme le résultat d'activités individuelles: chaque individu choisit mais ses choix sont guidés· Soit par les intérêts des individus tels qu'ils les perçoivent (les individus peuvent avoir une vision déformée de leurs intérêts)· Soit par les valeurs qui sont les leursPour l'ensemble des approches individualistes, c'est toujours l'individu qui choisit et non la société qui choisit pour lui.Présentées ainsi, les deux approches (holistes et individualiste) peuvent sembler inconciliables. III Tentatives de conciliation et/ou de dépassement de cette opposition Chacune de ces deux approches est irréaliste si elle est caricaturée.Il est tout aussi faux de dire que l'individu est sujet à un déterminisme absolu, niant toute marge de manœuvre que de considérer que l'individu est étranger à toutecontrainte sociale.Les thèses défendues par les différents auteurs précités sont d'ailleurs beaucoup plus nuancées.Ainsi, pour Bourdieu, l'influence des déterminismes sociaux sur l'individu se fait en prenant en compte sa trajectoire personnelle.

L'individu a donc une marge dechoix.

Weber ne nie pas les faits sociaux.Ces deux approches doivent davantage être vues comme des grilles de lecture que comme des positions idéologiques fermes.Plusieurs auteurs ont proposé des approches pour dépasser l'opposition individu/société: Norbert Elias par exemple.

Il propose de considérer les relations entreindividus selon le nombre d'acteurs dans la relation.

Plus les acteurs sont nombreux et plus il est difficile de faire entendre sa voix, son choix individuel.

La vie ensociété est composé de plusieurs niveaux de relation qui sont hiérarchisés (couple, famille, lieu de travail, syndicat, association, nation, Etat).

Suivant la relation,l'individu va, soit pouvoir imprimer sa marque, soit être conditionné par le corps social.Cette vision permet de concilier les deux approches.

Deux conclusions:- Le poids de l'autonomie individuelle est fonction de la nature de l'interaction- Même lorsque la marge de manœuvre de l'individu est faible, les activités sociales sont toujours rapportables aux individus.

Sans les individus il n'y aurait ni sociéténi faits sociaux. La sociologie politique n'est pas une science exacte. Section 2: le rapport entre le réel et le symbolique Le champ politique se prête particulièrement bien à cette dialectique entre réel et symbolique.La marge d'action du politique sur le réel (prendre des décisions qui changent réellement la réalité quotidienne) est de plus en plus faible (mais elle n'a jamais ététotale) dans le contexte de la mondialisation et de la juridicisation de la société.· De nombreux textes juridiques encadrent le politique, à commencer par la Constitution.· Le contexte européen limite également l'action politique nationale.Ainsi, il existe des règles de droit conditionnant les règles de circulation des citoyens des Etats membres de l'UE.Le politique peut agir sur le symbolique (effets d'annonce, symboles nationaux, etc.), ce qui permet d'apporter une certaine satisfaction aux électeurs mécontents.C'est le but de la communication politique.

Moins on peut en faire, plus on crie fort.Sarkozy condamne les propos de la commissaire mais fait changer la circulaire et se prépare aux conséquences juridiques. C'est là une vision assez simple mais la réalité est un peu plus complexe.Le sociologue s'interroge sur la réalité de la réalité et remet par ailleurs en question le caractère anecdotique du symbolique.

Le symbole n'est pas si anecdotique queça. I La réalité de la réalité Les sciences sociales se posent la question suivante: le réel est-il une donnée à découvrir ou bien le produit de connaissances? A Les théories positivistes Pour ce groupe de théories, les faits sont des données objectives qui s'imposent de l'extérieur à l'observateur.

Il est impossible de les nier.

Le chercheur doit seulementsavoir distinguer la réalité des illusions que peuvent provoquer le sens commun.Il n'y a qu'un seul réel, une fois trouvé on le tient.Ces théories ont connu leur heure de gloire à la fin du XIXe siècle.

Depuis, elles ont fait l'objet de vives critiques, en raison notamment des progrès des sciencescognitives.L'idée centrale de la critique est que le réel n'a d'existence que par l'intermédiaire de la pensée, qui permet de construire le réel.

Cette approche, qui difficilementcontestable du fait des connaissances actuellement apportées par les sciences cognitives, est particulièrement intéressante en sciences sociales.

C'est une différence devisions sociales.Ainsi, dans l'analyse politique, on observe la droite et la gauche· Soit on considère que la gauche et la droite sont des réalités fixes, qui existent en tant que telles, et on place les individus dans l'une ou dans l'autre à partir de leursvaleurs.C'est là l'approche des positivistes.· Soit on observe quelle vision de la société ont les individus qui se réclament de la gauche ou de la droite.

Existe-t-il des points de vue différents au sein de ceux quise disent de gauche? Y a-t-il des points de vue entre ceux qui se disent de gauche et ceux qui se disent de droite? Pourquoi se dit-on de droite ou de gauche? Est-ce enraison de l'héritage familial, de sa classe sociale, est-ce plus valorisant pour l'individu?)Dans la démarche constructiviste, on va construire la notion de gauche ou de droite. B La démarche constructiviste. »

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